La décision de Jean-Claude Marin, procureur de la République de Paris, de réclamer un non-lieu général dans l’affaire des frégates de Taiwan, survenue comme par hasard en période de vacances de nos concitoyens, est scandaleuse à plus d’un titre. Le silence assourdissant des politiques l’est tout autant.
Cette affaire qui a jeté l’opprobre sur la classe politique et industrielle de notre pays pendant tant d’années méritait une autre fin. Qui s’étonnera désormais que le citoyen juge la classe dirigeante complice de tous les coups tordus puisque l’enquête est close sans que des coupables aient été désignés ? Résoudre cette affaire était une chance de réconcilier la justice avec les citoyens. Le non lieu général réclamé par Jean-Claude Marin ruine pour longtemps le sentiment d’équité devant la justice et donne le signe aux corrupteurs et aux corrompus de tous poils qu’ils peuvent continuer, y aller de plus belle, puisque la corruption est impunie dans ce pays. Il eut été pourtant aisé de résoudre cette affaire. Il aurait suffit de répondre à la demande des juges Xavière Siméoni et Renaud Van Ruymbeke de lever le secret défense. Le secret défense levé, les juges auraient pu remonter la piste des rétrocommissionnaires.
Mais cela leur a été refusé par tous les ministres des Finances successifs. J’imagine, aujourd’hui, la déception de ces juges qui ont tant bataillé pour instruire cette affaire. Que peut faire aujourd’hui le juge Renaud Van Ruymbeke, alors que l’affaire des frégates lui a valu d’être pris dans la tourmente de l’affaire Clearstream ? Sur ce dossier sa position ne lui permet pas de s’opposer au parquet. A l’aune de ce réquisitoire, il est légitime de se demander si le juge dont personne ne doute de l’intégrité n’était pas la cible réelle de l’affaire Clearstream. Il faisait peur aux bénéficiaires des rétrocommissions, chacun connaissait son acharnement pour résoudre ce genre d’affaire. La première victime de l’affaire Clearstream est sans aucun doute le juge Van Ruymbeke et sa probité.
La France se retrouve donc dans une position tragique : le contribuable français va devoir rembourser les quelques 500 millions d’euros de rétrocommissions versées de manière illicite et réclamées aujourd’hui par Taïwan. Les bénéficiaires des rétrocommissions pourront continuer, eux à dépenser sans crainte un argent si mal gagné. Privatisations des profits et nationalisations des pertes est sans conteste un mot d’ordre bien admis sous l’ère Sarkozy : avec l’arbitrage Tapie c’est un milliard d’euros qui passe à la charge du contribuable. Comme pour l’affaire Tapie, l’affaire des frégates mérite une commission d’enquête parlementaire que je réclamerai dès l’ouverture de la session parlementaire.
Nous sommes vraiment au coeur d’un Etat voyou où les prébendes se distribuent à la pelle et les amnisties sont décrétées pour services rendus
Nous reviendrons une République lorsque sera levée l’immunité de son Président