Les grands héros du festival de Cannes sont donc des collégiens qui ont été disciplinés par des méthodes non punitives. A ce propos… les jeunes profs qui chaque année débarquent dans nos collèges sont-ils formés à dompter les sauvageons qui chahutent dans les classes, comme en rêve Sarkozy ? Surprise !
Sean Penn l’avait promis : la palme d’or serait à fort contenu social. Le film "Entre les murs", du réalisateur français Laurent Cantet ne pouvait pas mieux faire en racontant l’histoire d’une classe de quatrième au collège Françoise Dolto, dans un vingtième arrondissement de Paris classé en zone d’éducation prioritaire (ZEP). Un genre d’établissement qui motive les bobo ayant fait leur loft dans le vingtième, à jouer des coudes pour inscrire leurs enfants au collège Henri IV ou même dans le privé.
C’est l’histoire d’un jeune prof de français affrontant dans sa ZEP des élèves sauvageons, comme disait Chevènement. Des enfants insolents, impolis, dissipés, qui sous Pétain, De Gaulle et même sous Pompidou auraient fini en apprentissage, au pensionnat, ou allez hop ! aux enfants de troupes. Mais à renfort de débats et de joutes verbales, le maître réussit patiemment à les intéresser et donc à les discipliner. Pour dire les choses autrement, il les convainc par sa pédagogie de rester sur leur siège.
Maintenir l’élève assis est au coeur du débat d’aujourd’hui sur l’école. Ce n’est pas le défi le plus bête à relever quand les programmes scolaires imposent à chaque enfant de connaître par coeur, entre autres, la superficie de l’Allemagne ou le chiffre annuel de sa production d’acier… En attendant des contenus plus exaltants, plus adaptés à notre intelligence, que faire quand on est prof et qu’un cancre de onze ans quitte sa chaise pour filer aux toilettes sans même solliciter la permission ? Comment se comporter lorsqu’un gibier de potence répond à une remarque par une insulte ou au mieux par une insolence ? Dans nombre de collèges d’aujourd’hui, les profs sont nus devant l’indiscipline.
Bakchich, qui a au moins une palme d’or d’avance, avait suivi, un mois avant la fin du festival cannois, une manif d’enseignants qui dénonçaient dans les rues de Paris la suppression de 11 200 postes de profs à la rentrée prochaine. Entourés de lycéens, de collégiens, ils étaient entre 20 000 et 40 000. Nous leur avons demandé s’ils avaient jamais appris, durant leur formation au métier pédagogique dans leur IUFM (Institut Universitaire de Formation des Maîtres) à "gérer" une classe sans discipline, un élève chahuteur, un refus de s’asseoir. Leur réponse surprend !
Alors que Sarkozy exige dans chaque classe du pays un retour de la politesse, le respect du maître, jusqu’à prôner l’enseignement de ces valeurs via un détour par la morale chrétienne, on apprend que les heures consacrées dans les IUFM à l’apprentissage de la pédagogie et de la psychologie… reculent ! (Pour l’entendre, cliquez sur Astérix et le jeune indiscipliné).
A la Direction Générale de l’Enseignement Supérieur, qui pour le ministère de l’Education nationale fabrique la politique pédagogique et les programmes des UIFM et des universités, on n’est pas insensible au cri des jeunes profs largués devant l’indiscipline. « On a effectivement reçue l’info selon laquelle la formation à ces problèmes ne suffit pas ». C’est déjà bien de l’avouer. Et d’ajouter : « On va donner cette année des modules de formation supplémentaires, mais au cas par cas. IUFM par IUFM ». Préparez vous. L’année prochaine, la politesse va déferler sur chaque collège de France !