Avant de quitter le ministère de l’Ecologie et maintenant le gouvernement, Borloo a joué le père Noël. Il a promis des centaines de millions aux élus pour leur payer de beaux tramways et des TGV. Un beau cadeau à Fillon en pleine rigueur.
Un vrai caméléon ce Jean-Louis Borloo ! Ces derniers mois, espérant être nommé à Matignon, il avait cherché à s’afficher dans les habits du ministre responsable qui ne fait pas rimer « Grenelle avec déficits publics ».
Mais revirement complet la semaine passée, alors qu’il sentait ses chances de devenir premier ministre lui échapper. Mercredi 10 octobre, dans la foulée de ce qui apparaissait comme le dernier conseil des ministre du précédent gouvernement Fillon, l’encore ministre de l’Ecologie a tenu une drôle de conférence de presse testament. Evidemment, il attendait des journalistes la question qui tardait à venir : « Etes-vous sur les rails de Matignon ? » Histoire de répondre qu’il est encore en piste et que « la décision de Nicolas Sarkozy sera la bonne ».
Mais, le thème de la conférence de presse étant les « avancées décisives dans le cadre du Grenelle Environnement, pour des infrastructures majeures de transports », il s’agissait pour Borloo de se faire mousser. Et de laisser l’image du généreux ami du BTP – dont des représentant étaient présents dans la salle - et des élus locaux de droite comme de gauche. Ce qui n’est pas inutile pour la suite de ses aventures politiques, comme éventuel candidat du centre en 2012.
Et d’égrener avec le « Grenelle grandeur nature » toutes les lignes de TGV qui vont être lancées et toutes les lignes de tramways promises par les lois Grenelle. Peu importe la crise des finances publiques ! « On va faire 1000 kilomètres de tram en 5 ans alors qu’on a mis 34 ans pour en faire 350 ! ». Ce qui représente tout compris « 26 milliards d’euros de bons investissements » a-t-il assuré. Et une aubaine pour les travaux publics et les constructeurs de TGV et trams comme Alstom ou Bombardier !
Pour enfoncer le clou, il a passé le micro à un de ses poulains, le sénateur UMP des Alpes maritimes, Louis Nègre. Un élu que Borloo soutenait pour le poste de secrétaire d’Etat aux transports, histoire de veiller à ce que les promesses du Grenelle soient transformées quand il ne sera plus là.
Nègre s’est félicité du succès de l’appel à projets pour la construction de lignes de trams et super bus, un concours où Borloo a promis de verser aux collectivités des centaines de millions d’euros. 800 millions dans une première tranche et de 300 à 500 millions pour la dernière, ce qui fait bien sûr tiquer Bercy. Ces sommes ne représenteront que 15 à 20 % du coût total des projets qui seront retenus. Aux élus avec les contribuables locaux de financer le reste.
Evidemment pléthore de villes de province ont mordu à l’hameçon. « Le second appel a encore mieux marché que le premier. Ce ne sont pas 36 collectivités locales qui ont répondu mais 46 ! » s’est réjoui Louis Négre.
Bref le tramthon est lancé comme un train fou, forcément à la grande satisfaction des élus locaux. Peu importe si ces joujoux risquent de plomber les finances des agglomérations de province, auxquelles le gouvernement réduira l’an prochain les dotations globales de fonctionnement. Fillon aura du mal à calmer les élus locaux, dont certains seront forcément déçus de ne pas être sélectionnés et c’est toujours un beau cadeau empoisonné laissé par Borloo à son rival.
« Cela représentera au total 6 milliards d’euros de travaux pour la première tranche et 8,5 milliards pour la seconde » a exulté Louis Nègre, sénateur multicartes. Car, ce proche de Christian Estrosi mélange joliment les genres et on ne sait plus à quel titre il intervenait. Il est à la tête d’une série de groupes d’intérêts, comme TDIE versé dans les infrastructures et financé en partie par le BTP. Négre préside aussi la Fédération des industries ferroviaires. « Les Français veulent le doublement du réseau TGV et des trams » a tranché Borloo.
Et pour laisser encore un meilleur souvenir, ces jours-ci, le généreux ministre a bouclé un protocole pour le financement du canal Seine Nord, engageant plusieurs régions et départements. Son creusement coûtera au moins 4,3 milliards d’euros difficiles à rentabiliser. Le marché est promis à Vinci ou à Bouygues.
Bien joué, le père Noel est passé et Fillon sera le père fouettard !