Rechercher dans Bakchich :
Bakchich.info
UNE BRÈVE HISTOIRE DE BAKCHICH

Tags

Dans la même rubrique
Avec les mêmes mots-clés
RÉCLAME
Du(des) même(s) auteur(s)
MONDE / AFRIQUE

Ces mamas à fric

Prostitution / vendredi 27 juillet 2007 par Joan Tilouine
Twitter Twitter
Facebook Facebook
Marquer et partager
Version imprimable de cet article Imprimer
Commenter cet article Commenter
recommander Recommander à un ennemi

Fuir l’indigence africaine pour l’opulence européenne, sacrifier son corps pour la survie économique des siens. Telle est la sordide réalité de filles d’Afrique échouées sur le macadam de Paname où elles sont contraintes à tapiner pour le compte de mamas-proxénètes avides de fric.

Au début, c’était une coutume : l’émigrée africaine qui réussit en Europe partage ses deniers avec les siens restés au bled. Faciliter la venue d’un proche constitue le plus beau joker. Sauf que certains mauvais esprits ne se gênent pas pour abuser de la dite « solidarité africaine » et alimentent grassement leurs business de trabendo humain. Coup de poker macabre. La mise de départ a connu une inflation sombrement unique en son genre. Le prix atteint ? La liberté ! « Mon corps a été vendu mais pas mon âme. Même si la mienne ne vaut plus rien et qu’elle est souillée, elle n’a pas de prix », confie Linda entre deux passes. Agée de vingt-cinq ans selon ses dires, mais en paraît bien moins, elle erre dans le no man’s land urbain qui ceinture la capitale. Débarquée à Paname il y a trois ans en provenance du Cameroun, munie d’un « vrai-faux » visa étudiant, elle a été confiée à une prétendue tante. Cette dernière a vite révélé son vrai visage, dévoilant sans louvoyer ses intentions… Comme tant d’autres, Linda a été achetée à sa famille par ces maquerelles en quête de chaire fraîche jeune et plantureuse.

En 2006, quatorze des trente réseaux de prostitution démantelés en France provenaient du continent noir. L’Afrique de l’Ouest constitue l’épicentre de ce trafic humain. Nigeria, Cameroun et Ghana en tête de file. Cela fait dix ans que ces pays sont bien connus des services de police, en vain. Les mamas opèrent via des réseaux familiaux bien huilés ou se rendent sur place, en Afrique, pour étoffer leurs harems. «  Ce sont souvent les parents qui vendent leur fille. Ils reçoivent entre 7 000 et 10 000 euros. La fille, il est fréquent qu’elle soit mineure, devra reverser 40 000 euros à la mama pour s’affranchir », explique Emile Lain, chef de l’Office central de répression de la traite des êtres humains (OCRTEH). Après avoir âprement négocié le prix, les parents et la mama signent un contrat en bonne et due forme. Dans un exemplaire cacheté de Benin City au Nigeria, que s’est procuré Bakchich, il est stipulé qu’ « au cas où la fille ne rembourse pas sa dette, le prêteur se réserve tous les droits pour la récupérer ». Puis, direction le marabout ! Les trafiquants exploitent presque toujours les croyances et les pratiques ancestrales pour asservir leurs proies et accentuer la pression sur la famille. « La menace de sortilège qui plane sur la famille restée au village fait office de pacte tacite entre la fille et la proxénète. Si la fille s’échappe, la famille en paiera le prix », précise Amely-James Koh-Bela, porte-parole de l’association Mayina et auteur de plusieurs ouvrages sur la question. [1]

Pour quitter l’Afrique, pas de cayucos mais des Boeing rutilants. Munies de « vrais-faux visas », achetés 4 000 euros environ par la mama, les filles attachent leur chaîne de sécurité vers l’enfer. Réduites à l’état de vulgaires marchandises envoûtées par les esprits, elles se doivent d’être rentables tant pour la mama que pour les proches restés au pays. « La famille en profite en recevant ce que veulent bien envoyer les mamas et ne préfère pas savoir d’où provient l’argent. Mais la prostitution rend les gens encore plus pauvres et plus dépendants. Le trafic soutient la pauvreté », souligne Bernard Lemettre, président du Mouvement du Nid, une association venant en aide aux prostituées. Ce business engraisse les dealers d’âmes au détriment des filles et de leur entourage. La traite des êtres humains est la troisième source de profit du crime international organisé, générant plus de dix milliards de dollars par an. Selon M. Lain, « ces réseaux transnationaux connaissent et exploitent les failles de nos législations. Ce trafic est lié aux mêmes réseaux que ceux de la drogue et du trafic d’armes ». Logistique et coûts de départ dérisoires, les risques lors du transport des « marchandises » sont réduits et les pépètes garanties par une demande européenne insatiable. Un sordide marché du tourisme sexuel est mis en place. Une prostitution sans complaisance où les pratiques les plus abjectes sont les plus lucratives. Passe à la chaîne, partouze, zoophilie, scatologie, ondinisme ; la litanie est affligeante. Ces filles d’Afrique se retrouvent assujetties aux déviances sexuelles de clients sans foi ni loi qui, comme le fustige Mme Koh-Bela, « transforment le continent noir en supermarché de popotins blacks ». Tout a débuté avec une émigration subie…

Voir aussi : Contours (et détours) du jour qui vient

[1] Mon Combat contre la prostitution, Editeur : Jean-Claude Gawsewitch, Collection : Coup de gueule (2007)


AFFICHER LES
5 MESSAGES

Forum

  • Ces mamas à fric
    le mercredi 29 août 2007 à 12:30, Orange a dit :

    Quels sont les moyens mis contre ces mamas ? Et pour aider ces filles, qui sont des victimes et qu’on devrait aider.

    A part "le nid", y a -t-il d’autres associations actives pour les aider ?

    • Ces mamas à fric
      le mercredi 5 septembre 2007 à 13:53
      contacter l’asso mayina, une super équipe dynamique et sympathique qui se bouge vraiment pour tenter d’éradiquer le fléau. Voilà sinon MSF a queslques actions sporadiques sur ce sujet mais ne se consacre pas qu’à ça. Le mouvement du nid constitue aussi une asso sérieuse enfin toutes ces asso sont citées dans le papier. En afrique également quelques asso qui militent pour faire cesser le trafic mais le plus souvent dépourvus de moyens. voili voilou !!!!!!!!
  • Ces mamas à fric
    le samedi 28 juillet 2007 à 15:41, nicoducaire a dit :
    S’il vous plaît cessez d’employer l’expression "continent noir" pour désigner l’Afrique !! Outre qu’elle ne fait que reflèter la vision colonialiste d’un continent peuplé de gens "différents", "noirs", "sauvages", "cannibales" ?, a-t-on idée d’attribuer une couleur à un continent (surtout constitué d’une telle diversité de cultures, de peuples, de langues, et donc… de couleurs !) ? L’Europe serait du coup "blanche" (et tant pis pour les non-blancs, pourtant nombreux…), l’Asie jaune (et tant pis….), et l’Amérique… rouge ??
    • Ces mamas à fric
      le dimanche 29 juillet 2007 à 20:49
      je suis d’accord avec vous ,par contre il n’ya pas que les mamans fric ,il ya aussi des filles même qui sont consententes ,car certaines refusent la difficile qui est l’école au détriment de la vie facile ,en disant que je n’ai pas étudié mais j’ai réalisé beaucoup de choses par rapport à ceux qui ont étudié ,voilà mon constat
      • Ces mamas à fric
        le dimanche 9 septembre 2007 à 22:39, zegueblimi a dit :
        je partage le point de vue de beaucoupn de gens parmi vous, "continent noir" c’est vrai c’est presque de l’inculture de lapart de ceux qui le disent ; la prostitution africaine, dans les faits elle est identique aux autres, à quelque nuance près ; il y a une qui est officielle, l’autre est plus discrète où nos soeurs se vendent effectivement pour "faire une réalisation" dans leur pays d’origine, etc, ou pour s’habiller comme des princesses à paris, eh oui bon courage edgard
BAKCHICH PRATIQUE
LE CLUB DES AMIS
BEST OF
CARRÉ VIP
SUIVEZ BAKCHICH !
SITES CHOUCHOUS
Rezo.net
Le Ravi
CQFD
Rue89
Le Tigre
Amnistia
Le blog de Guy Birenbaum
Les cahiers du football
Acrimed
Kaboul.fr
Le Mégalodon
Globalix, le site de William Emmanuel
Street Reporters
Bakchich sur Netvibes
Toutes les archives de « Là-bas si j’y suis »
Le locuteur
Ma commune
Journal d’un avocat
Gestion Suisse
IRIS
Internetalis Universalus
ventscontraires.net
Causette
Le Sans-Culotte