Du pétrole sans nourriture, du terrorisme bien maîtrisé, de la religion très encadrée, on trouve de temps en Absurdistan !
Coopération militaire Algéro-Américaine. Des officiers US chez les paras à Biskra. Liberté, 24 septembre 2006
Leur séjour s’inscrit dans le cadre du programme US Capstone de formation militaire de pointe et d’échange de renseignements. Les échanges algéro-américains […] notamment dans le domaine de la lutte antiterroriste sont denses. La dernière délégation [… a] effectué une visite à l’École d’application des troupes spéciales de Biskra. […] le groupe d’officiers US, conduit par Robert Rutherford, général à la retraite, a eu à écouter les exposés d’homologues algériens sur l’expérience de l’ANP, dans la guerre livrée au terrorisme durant ces 15 dernières années. […] En de nombreuses occasions, le pentagone et le secrétariat d’État ont loué les efforts de l’Algérie visant la réduction à néant des groupes armés, bien au-delà de ses frontières, au Sud tout particulièrement. [… ] À la clé, point de contrats d’armes, mais de nouvelles perspectives de formation pour les officiers algériens. Élevée au rang de partenaire stratégique par l’administration Bush et son ministre de la défense, Ronald Rumsfeld […] l’Algérie est qualifiée de locomotive régionale. C’est sur son territoire que le centre africain de lutte contre le terrorisme est implanté. Ses forces ont participé à plusieurs manœuvres navales avec des navires de l’US Navy. Dans le Sahel, elles ont pris part à la fameuse opération Flintlock en 2005, impliquant aussi les armées du Tchad, du Mali et du Niger.
Commentaire : L’école de Biskra, c’est l’unité où ont été formés des escadrons de la mort qui ont fait tant de ravages durant la « sale guerre ». Plus inquiétant encore, la symbiose totale des hommes de Georges W. Bush et ceux de Toufik Mediene. À tel point que, affirment certaines « rumeurs », l’un des principaux chefs du GSPC – qui a justifié l’afflux des Américains dans le Sahel et ces « échanges » d’amabilités entre les généraux algériens et le Pentagone –, à savoir Amara Saïfi, alias Abderrezak el-Para – « ex-parachutiste », formé à l’école des forces spéciales de Biskra justement – accessoirement agent plus que probable du DRS, aurait, en guise de récompense pour ses services rendus tant pour le junte militaire algérienne que pour le complexe militaro-industrialo-conservateur américain, été envoyé « en stage » aux USA, sous une toute nouvelle identité… El-Para semble particulièrement apprécier le climat US. Le très documenté site http://www.recherches-sur-le-terrorisme.com/ affirme qu’il avait, entre deux maquis terroristes au milieu des années 90, suivi une formation à Fort Bragg aux USA, avant de connaître une promotion dans l’ANP (armée nationale populaire) et l’aventure médiatique qu’on lui sait à la tête du GSPC, comme « bras droit de Ben Laden en Afrique ». Une épopée qui s’est achevée par son arrestation par les rebelles tchadiens (MDJT) dans le Tibesti et sa livraison à la Sécurité militaire algérienne en octobre 2004. Jugé « par contumace » (si, si !) en juin 2005 et condamné à la prison à vie, il a été vu libre de ses mouvements dans une caserne de Blida. Un isolement qui a dû lui peser, d’où ce déplacement. Après Alger torturant secrètement pour le compte de Bush, Bush se devait d’offrir asile de villégiature aux terroristes algériens du GSPC du DRS, c’était le moindre des échanges de bons procédés. On est gentleman ou on ne l’est pas !
Des hommes d’affaires américains à Alger. La « lutte contre la terreur » en débat. El-Watan, 18 septembre 2006.
Une délégation de l’organisation américaine Business Executive for National Security (Bens) vient de séjourner en Algérie, où elle a eu des entretiens avec de « hauts » responsables du gouvernement algérien. Selon un communiqué de l’ambassade des États-Unis à Alger, la délégation du Bens était dirigée par un retraité de l’armée de l’air, le général Charles Boyd. « Les dix membres de la délégation, tous des hommes d’affaires, voyagent périodiquement à travers le monde, dans des régions qui partagent les mêmes intérêts que les États-Unis pour les questions sécuritaires », signale-t-on auprès de l’ambassade américaine. La représentation diplomatique se dit satisfaite des sujets de discussion qu’a eu à traiter la délégation du Bens avec ses interlocuteurs algériens. « Les aspects de la lutte globale contre la terreur » ayant focalisé le débat, selon le communiqué de presse. […] Bien qu’informelle, ce qui motive peut-être sa non-médiatisation par les organes officiels, la visite de la délégation américaine à Alger est qualifiée, cependant, d’importante par les analystes. Bens se branche exactement sur la même longueur d’onde que le discours officiel américain, en matière notamment du dossier sécuritaire.
Le rendez-vous est donné pour l’automne 2007 à Washington. L’Algérie présidera les assemblées annuelles du FMI et de la BM. Le Jeune Indépendant, 21 septembre 2006 Les travaux des assemblées annuelles du Fonds monétaire international et de la Banque mondiale, auxquels a pris part le ministre des Finances, M. Mourad Medelci, se sont clôturés hier à Singapour. [… ] Le ministre a conclu son intervention en déclarant que c’est un grand honneur pour l’Algérie d’accepter la présidence des conseils du FMI et de la Banque mondiale pour l’année 2007, en remerciant les pays membres pour leur confiance.
L’étude du Transsaharian Gas Pipeline. Le projet du gazoduc Algérie-Nigeria est rentable. El Watan, 20 septembre 2006.
« L’étude de faisabilité du projet de gazoduc transsaharien qui doit relier l’Algérie au Nigeria a démontré la faisabilité et la viabilité technico-économique du projet », a déclaré aujourd’hui le ministre de l’Energie et des Mines, Chakib Khelil. Le ministre qui s’exprimait dans une conférence de presse en présence du ministre des Ressources pétrolières du Nigeria, Edmund Daukuru, et du ministre de l’Energie et des Mines du Niger, Mohamed Abdullahi, a ajouté qu’« il y a un marché et des réserves, il ne peut y avoir de problèmes pour le financement ». « Il est prévu que le projet démarre en 2015, période où le marché européen sera prêt à accueillir le gaz », a indiqué M. Khelil. Selon l’étude, le prix du gaz qui établit la rentabilité du projet serait de 4,15 dollars. Pour sa part, le ministre du Nigeria a estimé le coût à 10 milliards de dollars pour le gazoduc et à 3 milliards de dollars pour les infrastructures au Nigeria telles que les installations de collecte du gaz. […] La participation du Niger d’une manière plus officielle sera annoncée d’ici quelques semaines à Niamey, a déclaré le ministre de l’Energie et des Mines, Mohamed Abdullahi, présent à la conférence. « Nous voyons des retombées importantes dans ce projet et d’ici quelques années, nous serons sur le point de rejoindre le club des producteurs de gaz et de pétrole », a estimé le ministre nigérien.
Déjà des réserves importantes de gaz sont estimées au Niger et leur exploitation aura des retombées sur le projet, a indiqué le responsable nigérien. Le caractère structurant du projet pourrait avoir des répercussions, y compris sur le tourisme en Afrique avec la disponibilité du gaz et de l’électricité dans certaines régions enclavées. Près de 5 à 6 millions d’emplois pourraient être induits dans les trois pays. L’étude sur le Transsaharien Gas Pipeline (TSGP) a été réalisée par le cabinet britannique de conseil énergétique, Penspen IPA, pour un coût de 2,04 millions. Le gazoduc de 48 à 56 pouces est prévu pour transporter 20 à 30 milliards de m3 par an. La longueur du gazoduc est de 4128 km dont 1037 sur le territoire du Nigeria, 841 km à travers le Niger et 2310 km en Algérie, jusqu’à la côte méditerranéenne, soit à Béni Saf à l’ouest ou El Kala à l’est. […]
Commentaire : C’est avec la même conviction de bienfait pour l’Algérie que Chakib Khelil a claqué des centaines des millions de dollars en études en tous genres pour faire aboutir la loi sur les hydrocarbures. Pour rappel, Chakib Khelil – autant « ancien de la Banque mondiale » que les généraux américains qu’évoquent les deux articles précédents sont « à la retraite » –, a offert aux multinationales (Exxon, Anadarko, Total, BP, etc.) une quote-part défiant toute concurrence, allant de 70 à 100 % des gisements algériens. Les arguments sur lesquels il s’appuyait étaient les mêmes, enrichir l’Algérie et moderniser son économie, offrir du travail aux Algériens, garantir des meilleurs salaires aux travailleurs, etc.
C’est la maladie de Boutef qui a (sur ce chapitre) sauvé les Algériens. Des « voix de l’au-delà » auraient-elles soufflé à un président à l’article de la mort que les juges qui sévissent aux frontières de la géhenne auraient beaucoup de mal à comprendre en quoi ce pouvait être bénéfique pour le peuple algérien de se voir privé de la seule richesse que le régime des généraux n’avaient pas encore dilapidée. Il a donc écouté les voix de la raison (Hugo Chavez aurait plaidé dans le même sens lors de sa visite à Alger au printemps dernier). C’est ainsi que la loi sur les hydrocarbures a été inexplicablement abrogée en juillet dernier et les ressources algériennes renationalisées quelques mois après qu’elles aient été privatisées.
Chakib Khelil a dû avaler son chapeau quand Bouteflika est revenu sur cette loi unique au monde tant elle était inique et qui faisait tellement plaisir aux amis pétroliers de Georges Bush. La qualité de ses promesses concernant les bienfaits d’un pipeline – qui ne semble avoir d’utilité que pour évacuer les hydrocarbures par le sud et vers le Golfe de Guinée sous contrôle américain (les pompes ont cette particularité qu’elles peuvent changer de sens de pompage aussi vite qu’il faut pour le dire) le jour où les Algériens pourront coordonner leurs révoltes pour se défaire de ce régime affreux – peut être jugée à l’aune de la même sincérité. Voici d’ailleurs comment l’inénarrable ministre prodigue « algérien » a pris les choses en apprenant la décision de Boutef…
Loi sur les hydrocarbures. Khelil minimise les amendements. L’Expression, 16 juillet 2006 .
« J’étais au courant de cette démarche et c’est mon département même qui a travaillé sur ce dossier. » Le ministre de l’Energie et des Mines, M.Chakib Khelil, sous-estime l’importance des amendements apportés à la nouvelle loi sur les hydrocarbures. […] […] Revenant aux changements apportés, il indiquera, avec un air peu convaincant, qu’ils portent sur la part de Sonatrach dans les blocs d’exploration qui dépassent les 51 % ainsi que sur les contrats de partage de production dont l’amendement impose une taxe sur les super-profits lorsque les prix du pétrole dépassent la barre des 30 dollars le baril ce qui est le cas actuellement. Alors que la loi en question a été conçue dans le but d’ouvrir davantage le secteur de l’énergie aux investisseurs étrangers, khelil garde son sang froid et refuse de reconnaître la valeur de ces changements. Pourtant, depuis son arrivée à la tête du secteur, le ministre n’a pas cessé de plaider pour une ouverture du marché de l’énergie aux compagnies étrangères. Afin d’écarter toute mauvaise interprétation sur cette histoire, le ministre dira : « J’étais au courant de cette démarche et c’est mon département même qui a travaillé sur ce dossier avant de le présenter au conseil de gouvernement ». […] Connu pour avoir défendu fermement son projet, pendant plus de quatre ans, avant son adoption en mars 2005 par les deux chambres, khelil n’a pas été de même cette fois-ci. […] « C’est la politique du pays », lâche-t-il, avant de souligner que « l’Etat a décidé d’amender de manière souveraine la loi pour assurer aux générations futures des richesses ». Ce qui explique, bien évidemment, la raison à l’origine du retard dans l’application de la nouvelle loi qui ouvre le champ libre aux opérateurs étrangers. […] Faisant semblant d’être d’accord sur les modifications, le ministre n’a pas pu dissimuler son mécontentement pour ne pas dire sa déception. « Sachant que les hydrocarbures représentent 98% des revenus du pays, il faudrait bien que les générations futures bénéficient des richesses naturelles, surtout que l’investissement hors hydrocarbures est très faible », a-t-il précisé. […] Le ministre n’a pas omis de relever, également, les conséquences d’un tel changement sur les compagnies étrangères. Celles-ci, poursuit-il, sont logiquement mécontentes puisqu’il est question de réduire leur participation dans les blocs d’exploration. […]
Débat organisé par El-Watan sur l’utilisation de l’argent du pétrole. Benbitour : “22 milliards de dollars partis en fumée”. Liberté, 23 septembre 2006
L’ancien Chef du gouvernement souligne que la démocratie favorise le développement des affaires. L’Algérie est passée d’un interventionnisme économique outrancier à un abstentionnisme de l’État rentier qui s’occupe essentiellement de la distribution des bénéfices d’une rente extérieure, en l’occurrence les exportations d’hydrocarbures. Tel est le constat établi respectivement par MM. Ahmed Benbitour, ex-Chef de gouvernement, Abderahmane Hadj Nacer, ancien gouverneur de la Banque d’Algérie, et Hocine Benissad, ancien ministre de l’Économie, lors du forum Les Débats d’El Watan, intitulé Où va l’argent du pétrole ? organisé, jeudi dernier, à l’hôtel Mercure (Alger).
L’ex-Chef du gouvernement a estimé que “le manque de liberté est un véritable frein au développement économique”, en soulignant que “l’Algérie a une économie vulnérable, volatile et dépendante et nous restons loin de la performance économique bien qu’il y ait, actuellement, une aisance financière caractérisée, notamment par un niveau élevé de réserves de changes de 68 milliards de dollars et des exportations de 46,3 milliards de dollars en 2005”. L’Algérie est un pays exportateur de richesse et importateur de pauvreté. Plus explicite, il a déclaré : “Les hydrocarbures étant une ressource non renouvelable, il faut bien considérer que chaque quantité de pétrole et de gaz exportée est un appauvrissement de la nation au profit du reste du monde.” Et pour cause, si l’on considère les deux années 2004 et 2005, l’Algérie s’est appauvrie de 78 600 millions de dollars, puisque les recettes d’exportations ont été utilisées, au niveau de la balance commerciale, à financer 19 570 millions de dollars d’importations de marchandises, telles que les médicaments, les produits alimentaires, les demi-produits et les équipements, argumente M. Benbitour. Les exportations hors hydrocarbures couvrent à peine 4 % des importations de marchandises. L’Algérie a enregistré, ajoute M. Benbitour, l’entrée de 1,020 milliard de dollars d’investissements directs étrangers et la sortie de 4,740 milliards de dollars de bénéfices rapatriés en 2005. Ces bénéfices dépasseront 10 milliards de dollars en 2007. Autrement dit, l’Algérie va transférer vers l’extérieur en bénéfices rapatriés plus qu’elle n’a payé en services de la dette (intérêts et principal) aux moments les plus difficiles de l’endettement avant le rééchelonnement.
Pour M. Ahmed Benbitour, “46,6% des recettes d’exportations ont financé des déficits anormaux et l’augmentation de réserves inutiles”, en précisant que “plus du cinquième de la richesse générée en 2005, soit 22 milliards de dollars, n’a servi à rien”. […] [Abderahmane Hadj Nacer] a souligné que “les pouvoirs publics ont profité des scandales financiers qu’a connus la place bancaire, notamment l’affaire El Khalifa Bank, pour interdire la banque aux Algériens”. Ce banquier a énuméré quatre préalables pour le développement économique, à savoir la démocratie, un État fort, une élite à forte valeur ajoutée et une bonne gouvernance.
Rapport sur la liberté religieuse dans le monde. Washington change de ton à l’égard de l’Algérie. Le Jeune Indépendant, 18 septembre 2006
Le rapport annuel du département d’Etat américain sur les libertés religieuses dans le monde a estimé, dans sa version 2006, que les libertés religieuses en Algérie ont reculé par rapport aux précédentes années. Il convient d’entendre par liberté religieuse celle qui est accordée aux non-musulmans et ne commente nullement celle qui concerne les musulmans. […] Elaboré par le bureau de la démocratie, des droits de l’homme et de la main-d’œuvre, un organe du département de Mme Condoleeza Rice, le rapport traduit la position politique des Etats-Unis sur cette question mais ne constitue pas pour autant une référence pour les experts. […] Selon lui, le « recul » des libertés religieuses en Algérie s’est traduit par l’adoption par les deux chambres du Parlement, en mars dernier, d’une ordonnance qui confine la pratique et les services religieux au sein de lieux autorisés. « Cette ordonnance a été approuvée sans consultation des groupes religieux chrétiens concernés et sans un débat sensé », a noté le rapport. La loi, dont l’entrée en vigueur a débuté en septembre, prévoit des sanctions pour toute personne reconnue coupable de prosélytisme, notamment les tentatives clandestines de conversion de musulmans au christianisme, menées en général par des évangélistes rattachés aux églises américaines.
[…] Dans son précédent rapport, le département d’Etat qualifiait l’Algérie de pays modèle dans le respect des libertés religieuses mais, depuis que les autorités ont découvert que des groupes religieux et des personnes étrangères s’adonnaient au prosélytisme illégal, principalement en Kabylie, terrain favori des évangélistes américains, elles ont décidé de réglementer efficacement la pratique religieuse pour les non-musulmans soit plus de six ans après les mesures quasi similaires ayant touché les associations islamiques. Cette loi restreint désormais l’accès des évangélistes en Kabylie. C’est sur ce chapitre que le département d’Etat américain semble exprimer son mécontentement.
Marché de l’emploi à Skikda. Le taux de chômage a atteint les 70%. Liberté, 21 septembre 2006.
Les retraités se plaignent de l’administration. « Nous sommes des laissés-pour-compte ». El Watan, 21 septembre 2006
Prostitution. Enquête de l’ONU sur la sexualité à risque des Algériens. Liberté, 15 août 2006 […] Beaucoup de personnes qui fréquentent les prostituées ne se protègent pas du sida (…) L’usage du préservatif reste très aléatoire et utilisé de façon irrégulière (…) Les campagnes de prévention n’ont eu aucun impact sur cette catégorie de la population qui fréquente les milieux de la prostitution.” C’est ce que vient de conclure une récente enquête menée dans trois villes algériennes sous l’égide de l’ONU sida et l’Association algérienne d’aide aux séropositifs (Aids). Basé sur une trentaine d’entretiens approfondis réalisés avec des prostituées à Oran, Alger et Tamanrasset, ce travail d’investigation est mené par un groupe de recherche en anthropologie de la santé “GRAS-université d’Oran”. Parmi les témoignages recueillis, celui de Fatima (prostituée dans la rue) est des plus poignants : “On vit avec le risque (…) Que faire contre le sida ? Il n’y a pas de médicaments. Le malheur, c’est qu’on a aucun moyen de déceler si tel homme a le sida ou pas. La belle voiture, le joli costume et la bonne éducation ne sont pas des garanties qu’on n’a pas le sida. C’est peut-être ces gens-là qui sont les plus dangereux parce qu’ils se déplacent souvent à l’étranger… C’est vrai que nous sommes les plus exposées au risque du sida parce que nous avons des rapports avec plusieurs hommes. Et plus le nombre de rapports est grand, plus la probabilité de tomber sur un porteur du virus est grande.” Dans d’autres témoignages, des prostituées “se disent impuissantes” à refuser le rapport sexuel face à une forme d’imposition de certains clients très indifférents aux risques du sida. […] Un homme d’apparence en bonne santé, peut être malade et porteur de virus. Le sida ne se voit pas. Celle de la rue, une fois qu’elle monte avec un client, elle ne peut plus reculer. Ce qui lui importe le plus, c’est que cela finisse le plus vite possible pour qu’elle prenne son argent et retourne à sa place habituelle. Le reste n’a pas d’importance. ”[…] Le sida ne montre pas de traces et met du temps pour apparaître. Cela ne se soigne pas. La femme, si elle ne fait pas de bilans régulièrement, elle peut l’avoir et continuer d’ignorer qu’elle est malade. Elle peut à son tour transmettre ce dangereux microbe à d’autres clients et à leur tour, le transmettre à leurs femmes. C’est la catastrophe !”
[…] Nadia, qui travaille dans une boîte de nuit, évoque les justifications des clients qui refusent les pratiques protégées : “La plupart de mes relations sont sans préservatifs pour plusieurs raisons. La majorité des clients refuse. Pour ces derniers, c’est très simple. Quand tu essaies de les convaincre de la nécessité de se protéger, ils répondent que pour ne pas prendre de risques, il faut rester sagement chez soi en compagnie de sa femme et de ses enfants. Nous prenons des risques quand nous sortons de chez nous. Un préservatif, cela gâche tout. Si on doit le mettre, il vaut mieux ne pas avoir de rapports du tout. On entend encore : Est-ce que j’ai l’air de quelqu’un qui a le sida ? Je ne suis pas n’importe qui. Je ne fréquente pas n’importe quel endroit. Face à ce genre de clients, vous ne pouvez qu’accepter. Et puis, il ne faut pas oublier que la raison pour laquelle, on est dans ces endroits, c’est de gagner le maximum d’argent.” Il est ainsi possible d’accorder des “faveurs” aux clients réguliers. Fatima (rue) confie encore : “Il y a de plus en plus de clients qui viennent avec des préservatifs, mais il y a aussi un grand nombre qui, malgré tout ce qu’on peut dire, refuse de mettre le préservatif. J’ai été obligée de leur mentir, en leur disant que j’ai le sida, et qu’ils doivent mettre par conséquent le préservatif. Moi, je fais de mon mieux pour les utiliser. Mais cela dépend du client, de l’endroit où l’on va, de la durée de la relation et aussi et surtout du montant de la somme à payer.
J’accepte de le faire sans préservatif pour certains clients. Ce sont des faveurs à des gens que l’on connaît. Ce sont des clients réguliers. Ils sont tellement gentils qu’on ne peut pas leur refuser. Il n’y a pas de risques avec eux. Ce sont des gens qui font attention. Ce ne sont pas les jeunes qui prennent des risques. Vous serez étonnés du nombre d’hommes mariés qui paient le plus pour avoir des rapports sans le préservatif. […] Ce serait vraiment bête de refuser de très bons clients à cause du préservatif et de se retrouver, malgré les précautions, contaminée. Alors il faut gérer.” […] Elle est belle, indépendante et avide de consommer. Dans une société qui a longtemps déclassé le “sexe faible”, innocente qu’elle était, Ahlam voulait sa réussite sociale et personnelle. Mais à l’ombre de l’argent qu’elle a gagné, il y a les souffrances, les cicatrices et les blessures profondes. “Je ne peux pas vous compter le nombre des rapports sexuels accompagnés de coups et de mauvais traitements de toutes sortes”, confesse-t-elle.
Une fois, un type m’a violée, m’a affamée et m’a brûlée avec sa cigarette. Trois mois plus tard, un autre m’a blessée à coups de couteau”, dit sa copine Afaf, dix-neuf ans, qui exhibe sa cicatrice. “Et, au bout du chemin, il m’a laissée crever du sida.” Sa séropositivité, Afaf dit l’avoir eue bien plus tard. “Mais mes clients ne sont pas tous des pervers. La plupart sont des citoyens ordinaires”, précise Ahlam. Des milliers de jeunes filles rejoignent, chaque année, les rangs des victimes du tourisme sexuel et de la prostitution. Les grandes villes, devenues des méga-cités, n’offrent pas aux estivants que des chambres et des bars. Après tout, “vacances et plaisirs vont de pair en été”. […]
Les suites commencent pourtant à être connues : c’est l’explosion de l’épidémie du sida, où la prostitution atteint des seuils jamais égalés. Et ce phénomène s’accompagne d’une propagation d’une industrie florissante. Car, bien des clients sont riches. La mode est à présent, pour ces filles de joie, dans les endroits de luxe où la possibilité est grande d’être hautement monnayées par les richissimes hommes qui ne comptent pas. Ce commerce qu’est l’exploitation sexuelle s’exerce aussi sur les “travailleuses” à domicile, considérées comme corvéables aux services les plus divers. Certes, entend-on, peut-être ces centaines de milliers de victimes ne sont-elles pas toutes consentantes, mais du moins ont-elles un emploi. Certes, quelques-unes d’entre elles semblent très jeunes, mais la maturité vient-elle si tôt ? Tant ce marché est devenu massif, envahissant, alourdi chaque année par de nouveaux témoignages. Les clients des prostituées craignent tant le sida qu’ils les recherchent de plus en plus jeunes, les pensant ainsi non contaminées. […]