Un historien décrypte "l’identité nationale" à travers son usage chez Sarko Ier.
Le 10 octobre, la Cité nationale de l’histoire de l’immigration (CNHI) ouvrait ses portes, remplaçant l’ancien musée des Colonies. Un chantier lancé par Raffarin et piloté par Jacques Toubon, mais qui fait alors la quasi-unanimité puisqu’il s’agit de « changer le regard des contemporains sur leur société en rappelant comment depuis deux siècles, les étrangers venus par vagues successives ont contribué à développer, transformer et enrichir la France ». Les portes de la Cité s’ouvrent… dans l’indifférence du gouvernement. Une surprise ? Pas vraiment… la création de cette Cité, c’était avant tout une initiative de ces huit vilains historiens démissionnaires du comité scientifique de la CNHI. Une abdication survenue le jour même (le 8 mars 2007) où était annoncée la formation du ministère de l’Immigration et de l’Identité Nationale (et de l’intégration et du co-développement), une démission en signe de contestation. Qui créé un certain malaise.
Et le malaise continue ! Dans un livre à paraître le 26 octobre aux éditions Agone, À quoi sert l’Identité Nationale, l’historien démissionnaire et président du Comité de vigilance face aux usages publics de l’histoire Gérard Noiriel critique l’association des termes Immigration ET Identité Nationale et analyse minutieusement les discours de Nicolas Sarkozy dans lesquels cette analogie est présente. La première étude exhaustive sur le sujet.
D’abord, l’auteur précise que l’analogie suggère une opposition entre immigration et identité nationale, qui stigmatise l’immigré « en fabriquant un clivage artificiel entre “eux” et “nous” ». (p. 7) Et indique que l’intitulé – plus certaines fonctions du ministère – font resurgir un vieux souvenir. « La première fois dans l’histoire contemporaine de la France où l’État a créé un organisme chargé de la question identitaire : le Commissariat général aux questions juives… » (p. 46). Récupérer habilement les idées aux doux relents pétainistes, « l’anti-France », est une vieille stratégie efficace en temps de crise. Aussi, la même analogie avait « permis à Jacques Chirac de remporter les élections législatives de 1986 ».
L’anti-France du Président ? Ce qui ressort de ses discours, c’est que le mauvais immigré, c’est le « Musulman-Maghrébin », ou « l’homme africain ». Sa technique pour stigmatiser : prendre un élément existant chez une minorité et le généraliser. « La soumission de la femme, c’est le contraire de la République, ceux qui veulent soumettre leurs femmes n’ont rien à faire en France. La polygamie, c’est le contraire de la République. Les polygames n’ont rien à faire en France. » Puis de s’en prendre à la pratique de l’excision, au port de la burka et au mariage forcé (discours d’investiture le 14 janvier 2007).
Le Français idéal de Nicolas ? C’est « celui qui est venu d’ailleurs, qui a gardé de sa physionomie quelque chose de ses origines, qui nous a donné un peu de son sang, mais qui a fait l’effort d’assimiler les “valeurs républicaines” et s’est dévoué corps et âme pour défendre sa patrie » (p. 91).
« Le véritable français, finalement, c’est lui, comme il le dit explicitement dans son discours de Nice du 30 mars 2007 : “Français au sang mêlé, qui doit tout à la France” » (p. 91)
perle du livre de Yasmina Reza sur Sarkozy
Réunion avec son entourage, Nicolas Sarkozy parle (non daté)
Je vous dis une chose. Si on n’avait pas l’identité nationale, on serait derrière Ségolène. On est sur le premier tour, mes amis.
Si je suis à 30%, c’est qu’on a les électeurs de Le Pen. Si les électeurs de Le Pen me quittent, on plonge