Un tuyau sur une arnaque financière ? Appelez la SEC ! Le flic de la bourse américaine dispose de 452 millions de dollars de primes à distribuer…
La vie est mal faite. Alors que le ministre de la Défense US ne sait plus à quel saint se vouer pour « neutraliser » sa bête noire dénommée Wikileaks, la SEC, le flic de la Bourse de New York à peine remise de son aveuglement coupable envers Madoff et Lehman Brothers, a décidé de son côté, qu’on ne l’y reprendrait plus, en suscitant des vocations de chasseurs de primes…
Depuis le 21 juillet 2010, date de promulgation de la loi de Réforme de Wall Street et de Protection du Consommateur dite « Dodd-Frank », elle incite en effet tous les Huggy-Les-Bons-Tuyaux qui se respectent, à lui faire des confidences sur les arnaques financières d’un certain standing dont ils pourraient avoir connaissance dans l’exercice de leur activité professionnelle.
En vertu – si l’on peut dire, s’agissant ouvertement d’un appel à la délation – de ce texte conçu par les parlementaires démocrates Barney Frank et Christopher Dodd, la SEC s’engage désormais à verser à ses indicateurs (« whistleblowers ») entre 10 et 30% du montant des sanctions qu’elle infligera aux auteurs des fraudes dénoncées, au delà d’un million de dollars.
Pour toucher sa prime, l’indicateur doit porter à la connaissance de la SEC, des faits délictueux dont elle n’a bien sûr pas connaissance. Il peut aussi prétendre à son bonus si l’information fournie permet à d’autres organisations gouvernementales à commencer par le ministère de la Justice et le Trésor, d’entrer dans la danse et de corriger les malfaisants.
A l’origine d’un droit nouveau, la loi Dodd-Frank protège dorénavant les employés contre les vengeances éventuelles de leurs patrons dénoncés. De plus, elle leur permet de garder l’anonymat pendant toute la phase de dénonciation et d’instruction de l’affaire par la SEC. Jusqu’au moment de l’encaissement du bonus, cela va sans dire. De plus, l’informateur peut même donner mandat à quelqu’un pour le représenter…
Afin de s’assurer que les nouvelles dispositions ne dégénèrent pas à la façon « Wild West » du bon vieux temps avec des affichettes « wanted » collées de manière sauvage sur tous les murs des buildings de Wall Street, l’article 21F(g)(5) de la loi a prévu l’obligation pour la SEC de rendre annuellement à la Chambre des Représentants (Committee on Financial Services) et au Sénat (Committee on Banking, Housing and Urban Affairs) un rapport annuel détaillé sur cet aspect de son activité répressive.
Ledit rapport précise notamment le nombre des primes versées et le genre de dossiers ayant justifié les paiements, ainsi que le solde des fonds disponibles pour les futures gorges profondes.
La première édition du rapport de la SEC, couvrant exceptionnellement la période comprise entre le 22 juillet et le 30 septembre 2010, est parue il y a quelques semaines :
Sans grande surprise, elle révèle qu’au 30 septembre, la SEC n’avait encore payé aucune prime au cours des 2 mois ayant suivi la promulgation de la loi considérée.
Les « Huggy » qui s’ignorent noteront également qu’à la clôture de son premier exercice, le Securities and Exchange Commission Investor Protection Fund disposait de 451 909 854,07 dollars (cf. document - page 7) pour délier les langues de ses informateurs au cours de son prochain exercice fiscal. Compte tenu du déferlement de cupidité observé ces derniers temps sur les places financières du Nouveau Monde et de l’Ancien, gageons que cet impressionnant pécule trouvera rapidement preneurs…
Au fait, comment pour sa part, l’AMF récompense-t-elle ses meilleurs informateurs ? Wikileaks devrait sûrement nous fournir la clef de l’énigme un de ces jours…