« Johnny & Sylvie » évoque les turpitudes du chanteur. Alcool, drogue, oripeaux nazis…
À l’automne 1972, le parolier Michel Mallory se présente à 10 heures du matin au domicile de Johnny Hallyday, avenue du Président Wilson, à Paris. Il souhaite lui faire chanter une adaptation d’un succès américain « Salvation ». L’idole des jeunes lui ouvre la porte. En peignoir bleu, les pieds nus. Il tient à la main une bouteille de bière, et sur la tête une casquette d’officier SS. « Derrière lui, raconte Mallory, je vois passer des gonzesses à poil… Il me tend la bouteille qu’il a à la main. Je la prends ». Une description crue, que l’on lit rarement dans la presse française. Comme si les journalistes, depuis près d’un demi siècle, s’étaient interdit de révéler la fascination du chanteur français pour les uniformes du troisième Reich.
A quelques pages d’intervalle, dans l’ouvrage Johnny & Sylvie, signé par Bernard Violet, publié ces jours-ci aux éditions Alphée, une maison récemment créée par Jean-Paul Bertrand, on apprend qu’à l’époque où Johnny chantait « Jésus est un hippie », le chanteur était toujours « fasciné par les oripeaux nazis ». L’écrivain se montre plus précis : dans la salle de musique de l’appartement, que Johnny occupe avec Sylvie, trône un mannequin masculin grandeur nature. « Casqué, botté, petite veste noire de standartenführer (colonel) SS. “Il n’y a que la culotte qu’est pas d’origine“, précise Johnny », écrit Bernard Violet.
Il est vrai que Johnny a des antécédents. Hélène, la sœur de Léon Smet, le père de Johnny, qu’il l’a élevé, est mariée à un personnage hors du commun : Jacob Adol Mar, fils d’un missionnaire protestant allemand et d’une princesse éthiopienne. Ce métis a travaillé pendant la Seconde guerre mondiale comme speaker à « Radio-Paris », la radio officielle de la collaboration avec l’Allemagne… A la fin de la guerre, l’Ethiopien Jacob Adol Mar sera condamné à cinq ans de détention pour avoir « favorisé des entreprises de toutes natures avec l’ennemi ». Certes, Johnny n’est pas responsable des excès de son tonton…
C’est surtout le ton et les révélations de l’ouvrage qui détonnent. Il suffit pour cela de lire le chapitre intitulé « Noir, c’est noir », consacré aux derniers mois de la grossesse de Sylvie : « L’abus de vin plus une kyrielle d’amphétamines : Ténédron, Corydrane, Maxiton, on en passe et des pires, l’ont peu à peu conduit sur le chemin de l’autodestruction (…) C’est devenu un habitué des piqûres en intraveineuse. Pour surmonter sa lassitude, un mélange “miracle“ : Mandrax plus whisky (…) il avouera que pendant la tournée européenne d’été, les musiciens l’avaient surnommé “Speedy Gonzalès“ eu égard à sa consommation phénoménale de speeds. »
« Il s’agit de révélations faites par Johnny lui-même. Une nouvelle fois, il est désarmant de sincérité. En fait, il fait preuve de beaucoup d’habileté. A 65 ans, il reconnaît ses turpitudes, coupant l’herbe sous les pieds à d’éventuels détracteurs. Le public appréciera sa sincérité », commente Bernard Violet, qui ne cache pas sa sympathie pour l’indémodable chanteur français. Le livre, pourtant, ne manque pas de divulgations embarrassantes. Il raconte qu’à Cracovie, en Pologne, à l’époque communiste, Johnny est passé devant un tribunal pour avoir écrasé sa cigarette sur le nez du chef local du Parti communiste, qui levait son verre à la santé de Staline. Heureusement, le consulat de France a trouvé les mots qu’il fallait pour lui éviter la prison. Johnny était en état d’arrestation pour hooliganisme.
Dans un tout autre domaine, Johnny & Sylvie raconte l’aventure de l’interprète de « J’ai un problème » avec une jolie brune au regard enjôleur, la femme d’un patron de bar dont le casier judiciaire n’a rien de très virginal. Le type veut carrément descendre à coups de flingue l’idole des jeunes. Il faut l’intervention des frères Guerini, deux « parrains » de la région méditerranéenne, pour calmer « le truand cocu ». Johnny pourra repartir indemne. « Mais l’histoire ne dit pas quel traitement sera réservé par le mari jaloux à l’épouse infidèle ».