A partir d’une certaine heure de la nuit, quand les métros dorment, sortent les vélib’ pleins de grâce et d’alcool…
Place de la Bastille, Paris, vendredi soir, une heure du matin, les métros viennent de fermer. Pour rentrer chez soi, il existe une nouvelle solution, économique, bucolique voire alcoolique : les velib’. À la borne Richard-Lenoir, une quinzaine de personnes attendent, souhaitant retirer la nouvelle (pour pas dire la seule) fierté socialiste du moment. Un trio de japonais semble complètement perdu, planté devant la borne, ne comprenant qui, que, quoi, comment. Fort à propos, un autre trio, au hoquet régulier, vient à leur rescousse…Magie de la gentillesse des vapeurs de nuit. Ravis, les Japonais retirent leur Graal et partent gentiment à la queue-leuleu sur la piste cyclable prévue pour. À l’inverse, nos trois autres français godillent sur le trottoir et se marrent de leur pauvre équilibre.
Dans la lancée, une bande d’adolescents se pointe, dans un état frisant eux aussi l’Ohio. Un blondinet, les cheveux soigneusement sculptés en pétard, s’assoit sur l’un des vélos, et crie « Avec le vélib, tu t’éclates, avec le vél’ hib’ tu t’éclaaates ! » L’image de la gentille famille en velib’, écolo mais sympa, prend tout de suite une tournure plus destroy.
Place de la Bastille toujours. Christine, 26 ans, une « accroc » du velib’, n’en revient toujours pas. Elle roulait boulevard Ornano, tranquillement, quand elle aperçoit des lumières qui bougent dans tous les sens, « ils étaient au moins dix à rouler en vélib’ et pas un seul ne paraissait frais », d’où les faisceaux qui s’entrecroisent. Magique vélib’.
« Ce sont des vrais dangers publics ! », affirme le bedonnant Michel, taxi de nuit depuis vingt ans. « Déjà les vélos, ça nous emm…, mais alors là c’est n’importe quoi (…) C’est à cause de l’autre tafio…. » Proche de la caricature Michel ? Peut-être même au-delà. Oui mais Oucine, taxi depuis quatre ans, confirme : « À partir d’une certaine heure, on doit vraiment faire attention, certains sont vraiment dans un sale état. » Il poursuit : « Les touristes sont les pires, ils savent pas où aller et se déplacent très souvent en groupe. Ils roulent à deux à l’heure et prennent toute la place. » Y a-t-il déjà eu des accidents ? « Oui, répond Oucine, pas moi mais d’autres ont eu des accrochages, pas graves mais bon, ça peut arriver. » Pas tous les taxis se plaignent. Luc, 30 ans, « comprend » ces jeunes qui, « fauchés », ont trouvé « un bon moyen de rentrer chez eux ». « C’est aussi à nous, professionnels, de nous adapter. »
Sur les forums, on peut aussi lire quelques traces ethyliques du nouveau deux roues. Deux copains [1]font, par exemple, la course pour rentrer chez eux en fin de soirée, le sang bien imbibé. Ils sont déterminés à rentrer avant la demi-heure fatidique, celle de la gratuité (après, c’est payant). Une jeune femme [2]raconte elle aussi son périple et sa joie presque naturelle de prendre le vélo au dessus des 0,5g. La police, concentrée sur d’autres statistiques, laisse pour l’instant les vélos tranquilles. Nul doute que l’automne approchant (s’il n’est pas déjà là), les vélib’ deviendront plus sages, préférant le repos aux zigzags, sauf si l’été se fait indien.
[1] http://www.reseaucampus.com/forum.php/12752/velib’/recordqs
[2] http://fr.news.yahoo.com/agoravox/20070807/tot-pour-une-poignee-de-velib-s-89f340e_4.html
Salut,
Je suis Lyonnais aussi, et comme à Lyon, les taxis n’aiment pas les vélov/vélib pour cause de perte de chiffre d’affaires. Le reste, c’est du baratin. Au début, à Lyon, tout le monde criait au scandale de la sécurité routière. Avec 40 ou 50% d’augmentation du trafic vélo, aucune augmentation des accidents. Depuis, ils se sont fait une raison et on a la paix. Même eux, "les professionnels de la route" font maintenant attention aux vélov.
Laurent
Je suis lyonnais et il est vrai que ces vélos sont, hormis le vélo personnel, la seule façon de rentrer rapidement après les derniers métros un peu imbibé et sans danger pour les autres. Alors certes, on se met en danger soi-même (et encore, si on respecte les feux et qu’on choisit son itinéraire, c’est réellement sans danger), mais comparé à quelqu’un qui rentre en voiture c’est quasiment négligeable (ceci dit quand je peux, je rentre à pied, ou en poussant mon vélo).
Bon vélo prudent !