Je ne sais pas quelle mouche m’a piqué. Je suis allé voir Paris, le dernier film du mollasson Cédric Klapisch, cinéaste dont la vision du monde est aussi percutante qu’une chanson de Patrick Fiori. Je ne m’attendais à rien, même pas au pire. J’ai eu tort.
Tout commence mal : un trentenaire de Ménilmontant (Romain Duris) apprend qu’il va mourir, ouvre sa fenêtre et découvre que la vie, c’est précieux. Le masque de la mort jette alors sur la capitale un voile soudain de générosité, d’innocence et de philanthropie. Pendant deux (très) longues heures, défile une petite galerie de personnages forcément attachants (Paris, que c’est sympa !) qui se croisent, se décroisent, se heurtent (en douceur) et se retrouvent, célébrant in fine le fantasme d’une diversité conviviale et béta.
Paris dans une boule de neige, Amélie Poulain moins la poésie. Ce qui, sous l’œil acéré de Klapisch, donne ceci : quatre donzelles des défilés de mode viennent faire mumuse à Rungis avec une bande de maraîchers, une boulangère drôle et raciste se rend compte que sa beur de stagiaire met du cœur à l’ouvrage, un prof de fac (Lucchini, en roue libre, comme chez Drucker ou Ruquier) envoie des textos djeuns à l’une de ses étudiantes (« kif » dans la bouche de Fabrice ? Rires assurés de la salle) et se trémousse sur BB King (rires, bis repetita), etc…
Klapisch n’est ni Robert Altman, ni Paul Thomas Anderson (Dieu des cinéphiles, pardonnez-moi) et choisit la forme dite « chorale » afin de pallier à une vision datée. Cette stratégie de la scénette en brochette évoque bien sûr le cinéma de Lelouch dont Paris est une version redux. Mais chez le chantre du chabadabada, il y a de la naïveté et de la bêtise, et parfois, l’une permet de faire passer la pilule de l’autre. Chez Klapisch, il n’y a plus que de la bêtise. Par respect pour le lecteur, je ne citerai aucun des dialogues du film, qu’il faudrait pourtant éditer dans une collection « humour ». Mais comment résister à cette diatribe d’Albert Dupontel qui, entre deux cageots de bananes, se prend pour Nelson Mandela : « Ce qui est formidable avec les mandarines, dit-il en substance à une nunuche vaporeuse, c’est qu’ici, les mandarines du Liban côtoient celles d’Israël et de Corse ». Extraordinaire métaphore du film dans le film prônant un métissage mou dont le film fabrique le fantasme larmoyant.
La morale du film pourrait se résumer à ce que disent parfois les télécritiques de ciné en panne d’idées face à un film qui n’en possède aucune : « Paris, c’est comme la vie ». Autrement dit, c’est bien peu de choses. Primo parce que la vie n’est pas forcément intéressante à filmer, deuxio, parce que la coïncidence entre un film et ce que l’on imagine (ici très fort) être le « réel » n’a jamais été un gage de qualité, tertio, parce que le Paris de Klapisch ressemble à tout sauf à Paris. Et c’est un Parisien qui parle.
Paris de Cédric Klapisch, avec Romain Duris, Fabrice Lucchini, Juliette Binoche, Albert Dupontel, François Cluzet, Karin Viard, Gilles Lellouche, Mélanie Laurent, Zinedine Soualem, …
Sorti le 20 février 2008
Cher Jean Baptiste Thoret,
Visiblement vous exécrez Klapisch et son cinéma, particulièrement son dernier film : Paris. J’avoue, je ne l’ai pas vu mais je ne vous écris pas pour débattre du film.
Je reste sans mot devant la critique acerbe que vous en faites, cet éreintage sans concession basé sur des arguments aussi pertinents que « le mollasson Cédric Klapisch » dont « la vision du monde est aussi percutante qu’une chanson de Patrick Fiori ».
Moi non plus je ne sais pas quelle mouche vous a piqué, peut être celle de la culture méprisante. Cette mouche redoutable et contagieuse qui force les vrais cinéphiles comme vous, ceux qui ont leur propre Dieu, à aller s’asseoir au cinéma avec le peuple inculte, la masse populaire qui a vu Un homme et une femme comme un chef d’œuvre, connaît par cœur les chansons de Patrick Fiori et a demandé pour noël le DVD collector d’Amélie Poulain.
N’avez vous jamais réfléchi à la portée de votre travail ? Ecrire sur le cinéma, sur l’art en général, c’est avant tout être passionné par son sujet et avoir envie de faire partager cette passion. La critique doit être à l’inverse de ce que vous en faites une incitation à découvrir des films, un encouragement à aller au cinéma. Evidemment on ne peut pas aimer tous les films mais la critique ne doit pas être utilisée comme une arme de destruction massive contre le cinéma. Au contraire elle doit être une loupe sur ce qui se fait de mieux, une ouverture sur des mondes et des cultures différentes.
Vous êtes pire que les « télécritiques en panne d’idée » que vous fustigez, vous ne vous positionnez non pas comme journaliste mais comme un juré de téléréalité — si vous avez aimé tapez 1, si vous avez détesté tapez 2 — sans autres arguments que la petite notoriété de votre signature.
Klapisch n’est peut être ni Altman ni Anderson mais votre Dieu des cinéphiles est témoin vous n’est heureusement ni Bazin ni Audiberti !
Pourquoi choisir de descendre Paris dans Bakchich qui j’en suis sûre ne vous impose pas le sujet de vos papiers ?
Le grand cinéphile que vous êtes ne peut pas ignorer ce que disait Carmelo Bene : "la critique c’est de la délation."
Il n’y a malheureusement rien à retirer de ce film fadasse… Mais bon, entre le casting et l’idée de départ, on pouvait malheureusement s’y attendre…
Par contre, Juno est une autre paire de manches !
Je déteste Klapisch et j’ai eu le malheur de voir "Paris" avec deux fans de ce réalisateur. J’ai osé dire que c’était superficiel et elles m’ont sorti : "Au contraire c’est super profond ! Qu’est-ce que tu trouves superficiel ? Il est question de la vie, de la mort ! De la mort, tu te rends compte ?- Ben c’est ado quoi, tous ses films sont des films d’ado qui se la jouent cools. C’est insupportable et con." Les deux copines se sont mis à me psychanalyser aussi sec : "T’aime pas t’amuser, toi ? Nous (disent les deux copines) on aime s’amuser, et quand on voit un film de Klapish, on se dit : mince alors, qu’est-ce qu’on a fait de notre jeunesse ! Dire qu’on aurait pu s’amuser PLUS !"
Bref, c’est horrible, tout le monde aime Klapish autour de moi.Même les gros bourges élitistes du 5ème ! On pourrait pas fonder un club pour les gens qui détestent Klapish ? Je trouve ses films plats, démagos, balourds et pleins de grosses ficelles, et je ne comprends toujours pas son succès auprès des bobos.