Alain Soral, nouveau chantre de Le Pen, s’est fait jeter de la 59ème journée de la dédicace de l’IEP de Paris à laquelle il avait été invité par des étudiants.
Ce week-end, il y avait du beau monde rue Saint-Guillaume pour la 59ème journée de la dédicace : Sollers, Stora, Goupil, Kouchner, Kahn, Zeller, Enthoven, Brukner… Une petite centaine d’écrivains et autant de curieux. Au programme, dégustation de thés, signatures et conférences.
L’ambiance toute germanopratine commençait à se faire un brin ennuyeuse et déjà vue. Un certain écrivain blond évaporé paradait au milieu de ses groupies adolescentes, les grosses pointures signaient un nombre honorable d’ouvrages et se faisaient interroger sur leur vie, leur oeuvre et le monde qu’en pensez vous. Pendant que ceux qui ne sont jamais invités à la télé s’ennuyaient ferme avec pour seuls interlocuteurs les jeunes élèves assistants que l’institut leur a flanqué.
Ça papotait doucement, ça souriait et ça s’est soudain mis à gueuler. « Sciences Po, ennemi de la liberté d’expression ! » C’était Alain Soral, écrivain boxeur rendu célèbre par l’émission « C’est mon choix » et encarté FN plutôt décomplexé. Arrivé avec six de ses camarades, plus proches d’un service d’ordre que d’une bande de copains, il s’est empressé d’occuper la place : une table pour dédicacer sa littérature.
Après des tentatives vaines pour le déloger, le service de sécurité a appelé la police. Et là, quel spectacle ! Un Soral refusant de sortir et revendiquant son territoire conquis par la force du nombre (six molosses) face à sept flics résolus à le mettre dehors.
La petite rixe aura duré une dizaine de minutes et a fini sur le trottoir. Soral a joué sa grande victime et ses copains en ont rajouté dans le « on est boycotté par les bien-pensants ». A sa décharge, Soral a bien été boycotté par la direction. Invité par le BDA (bureau des Arts), formé par des étudiants de Sciences Po, la direction a décidé de le déprogrammer. Gênés, les élèves nient : « on ne l’a pas invité. On n’était pas au courant. » Pourtant, Alain Soral était bien sur la première liste présentant le programme de la journée. Liste postérieure à son adhésion au FN et à son fameux voyage au Liban avec Dieudonné… La direction, pour des raisons qui se justifient, l’a contacté pour lui faire savoir qu’il était indésirable. Dans ce temple de la connaissance et des biens coiffés, on ne badine pas avec les extrêmes.
Pourtant, la raison qu’a invoquée Nadia Marik, directrice adjointe de l’IEP, pour expliquer l’exclusion de l’excité est toute autre : « on l’avait officiellement désinvité parce que ce type pose des problèmes de sécurité. Il est venu quand même et a refusé de partir. On n’a pas eu d’autres solutions que la police. » Le malaise est là : personne ne veut reconnaître que Soral a été viré à cause de ses idées nauséabondes. Sans doute parce qu’il faudrait assumer du même coup qu’un étudiant du vénérable institut l’a invité pour ces même idées. Il est vrai que ça ferait désordre.
Soral et ses petits copains ont fini par partir mais ont promis qu’ils réagiraient. Qu’ils dénonceraient ce scandale. Empêcher des lecteurs de rencontrer un écrivain, faire obstacle à la liberté d’expression… Si ça peut les rassurer, les fans de Soral ne se bousculaient pas au portillon. La seule déception notable a été celle d’un des membres, débordés, du service de sécurité de Sciences Po : « On m’avait dit qu’il était petit… »
La présence de Soral à Sciences-Po a été filmée, la vidéo circule sur internet. Vous y verrez que Soral se déclare tout prêt à se faire casser la gueule, chose qui n’arrive évidemment pas, et chose qui prouve que le prétexte du directeur de Sciences Po pour évincer Soral est complètement bidon. Descoings est ouvertement un menteur, doublé d’un couard qui refuse tout dialogue et tout échange cordial.
DimpleAddict, le même Descoings est capable de faire venir la police, c’est donc qu’il est capable d’assurer la sécurité d’un écrivain. Mais il préfère taire les voix dissidentes, il préfère les gens qui sont bien dans le moule, bien gentils, pas méchants, qui ont des idées qui ne doivent surtout déranger personne et laisser dormir tranquille tout le monde.
Face à la bêtise, il est facile de trouver des arguments. Face au mensonge, il est facile de rétablir la vérité. Si Soral était un idiot et un menteur, pourquoi ne pas lui avoir mis le doigt sur ses erreurs et ses incohérences ? Descoings serait-il devenu muet ou agoraphobe ? Soral n’est pas un gentil mouton comme tout le monde, alors on le vire.
DimpleAddict, vous vous revendiquez républicain, mais ne supportez pas les idées différentes des vôtres : c’est ça votre démocratie ? "Quiconque n’est pas démocrate doit se taire" ? C’est vous qui êtes dangereux : avec vous, la liberté d’expression en prend un sacré coup.
Et d’ailleurs, j’ai une question : en quoi Soral ne serait pas "humaniste" ? Et est-ce un crime grave que de ne pas se déclarer "humaniste" selon vos termes ? Qu’est-ce qui vous permet de dire que Soral n’est pas un humaniste, et qu’il peut donc à ce titre mériter toutes les exclusions de la scène démocratique ?
DimpleAddict, vos contradictions me laissent perplexe. Donnez-moi du contenu, donnez-moi des preuves concrètes du "non-humanisme" de Soral, ce "non-humanisme" qui vous permet de déverser votre mépris aussi rapidement. Quelles "idées haineuses" vous auraient choqué, vous qui haïssez toute idée divergente à votre grande tolérance républicaine ?
Merci de votre réponse.
Bonjour,
je suis le parcours d’Alain Soral depuis un certain temps, et je pense qu’il a clairement viré extrème-droite,mais mêm pas forcément par conviction, juste parce qu’il souffre de la non reconnaissance de ses pairs (les écrivains). Il endosse des lors cette cape d’écrivain maudit, un peu trop grande pour lui, au regard de son petit talent, ce qui lui procure au moins le sentiment d’exister. Après le macho de service, le voilà facho martyrisé de service, pourquoi pas ! Néanmoins la video cité par Fromage, très facilement repérable sur le net offre au moins une information, qui n’en est plus vraiment une. La présence du GUD des années 90 (Fréderic Chatillon, Gildas Mahé…) au côté de Soral pour assurer "sa sécuritté". Les même qui bossent pour la Syrie et qui ont fait venir Dieudo au LIban et au congrès du FN en novembre (http://reflexes.samizdat.net/article.php3 ?id_article=82).
Bonjour,
tout à fait d’accord avec le fond de l’article de Bakchich, sauf sur ce point : "qu’un étudiant du vénérable institut l’a invité pour ces mêmes idées". La précision de Zinzinho me paraît plus conforme à la réalité, même si sa condescendance vis à vis des "étudiantes" n’est pas indispensable : le seul tort des étudiants du Bureau des arts, à mon avis, est de ne pas avoir patiemment "googlé" un par un ceux qu’ils ne connaissaient pas parmi les auteurs qu’on leur proposait. Un tour sur la première page de google ou sur wikipedia permet de mesurer à quel point le cas Soral peut détonner dans cette journée dédicaces, "consensuelle depuis 1947". Question : qui a proposé Soral aux étudiants ? Je n’ai que des conjectures là-dessus, donc je me tais.
Sinon, Fromageplus, je ne pense pas que Soral ait démontré que "personne ne veut attenter à sa sécurité dans Sciences Po". Il a été viré au bout de 10 minutes. Qui dit que s’il était resté de 14 h à 18 h comme les autres auteurs, rien n’aurait été tenté contre lui ? Fallait-il qu’il soit protégé par ses "molosses", au risque d’une réaction un peu musclée ? Ou par la police, avec comme conséquence de le confirmer dans son statut de martyr de la liberté d’expression, tout en dramatisant une journée qui se veut avant tout gentiment germanopratine ?
C’est, je pense, une des deux raisons qui ont conduit le directeur de Sciences Po à "appeler le préfet" pour faire reconduire Soral vers la sortie (cf. sa laborieuse interview d’explication, URL ci-dessous) : Descoings, qui n’est pas né de la dernière pluie, devait bien se douter que Soral s’empresserait d’ajouter cet épisode à son martyrologe perso, images à l’appui.
L’autre raison, la principale, est évidemment le manque flagrant d’humanisme de Soral ; ça aurait fait tache de l’accueillir dans une institution qui se targue d’être le summum français en matière d’humanités. C’est là, toujours d’après moi, la grande erreur du directeur : ne pas avoir avoué que Soral était indésirable -si les flics eux-même le disent, ils ne l’ont pas inventé !- à Sciences Po. En faisant preuve de franchise, il aurait déclenché un tollé et reçu des foudres de toute part ; mais au moins, il aurait sans doute eu aussi pas mal de soutien. Mais je ne suis pas dans la tête de Descoings, et il est peut-être plus naïf que je le pense…
Le mot de la fin revient peut-être à René Rémond, vénérable président de la Fondation nationale des Sciences Politiques : interrogé sur cette affaire "Alain Solar" (sic !), l’historien, pas très à l’aise non plus, n’est pas de toute bonne foi ("une quinzaine de gardes du corps"). Mais il finit par dire que Sciences Po est "ouvert au débat, mais pas au rapport de force", et que "la liberté d’expression est entière pour les idées, pas pour les comportements".
Voilà l’explication : avec son verbe éructant, ses idées haineuses et son goût de la provoc, Soral n’est pas assez "calme" pour l’école de la rue Saint-Guillaume.
Rappelons la chronologie des faits :
1. Dans un premier temps, Soral est invité à Sciences Po. De toute évidence, on souhaitait sa présence parce que c’est un homme qui a des choses à dire : à Science-Po, on n’invite pas Lagaf ou Pascal Obispo, on invite des gens qui ont des idées et du style, des gens qui savent penser et s’exprimer. Même si on n’est pas forcément d’accord avec leurs idées.
2. Soudain, dans un deuxième temps, Soral n’est plus invité à Science Po. Officiellement, on lui dit que sa personne peut être sujette à agression, aussi on lui demande de ne pas venir "pour des raisons de sécurité". Soral vient quand même, et démontre que personne ne veut attenter à sa sécurité dans Sciences Po.
3. Le directeur appelle la Police pour expulser Soral. Soral demande à la Police de le protéger, puisqu’il paraît – dixit la Direction de Science Po – que sa sécurité n’est pas assurée. La Police le fait sortir manu militari, lui expliquant qu’il est expulsé pour le motif qu’il est "indésirable".
Questions :
Que s’est-il passé entre l’étape 1 et l’étape 2 ? Soral serait-il soudainement devenu le diable en l’espace quelques jours ? Les livres de Soral sont-ils soudainement devenus putrides ?
Pourquoi le Directeur de Sciences Po donne-t-il un prétexte fallacieux à Soral pour ne pas avoir à le recevoir ? Pourquoi a-t-il délibérément et éhontément menti au nez et à la barbe de Soral ? Pourquoi ne lui a-t-il pas réservé un sort démocratique et humaniste ["je ne suis pas d’accord avec ce que vous dites, mais je me battrai pour que vous puissiez le dire"] ?