Des députés malins ont obtenu la présidence des « groupes d’amitiés », qui permettent de voyager un peu
Au Palais-Bourbon, les présidences des « groupes d’amitiés » parlementaires entre la France et les pays étrangers viennent de faire d’objet d’âpres marchandages. Ces postes honorifiques permettent de jouer les hommes influents dans les milieux économiques et diplomatiques pendant cinq ans. Et ils offrent quelques possibilités de réceptions et de voyages (12 par an) tous frais payés par l’Assemblée. Au terme de négociations discrètes entre groupes politiques, on connaît, depuis fin septembre, le détail des élus choisis pour présider les quelques 173 groupes d’amitiés agréés (voir sur le site de l’Assemblée). L’un des vainqueurs est Pierre Bédier (UMP, Yvelines), qui remplace l’ex-ministre et vétéran des relations franco-africaines Jacques Godfrain à la tête du groupe d’amitié France-Gabon.
Un poste privilégié avec vue sur le pétrole, en contact direct avec l’indétrônable président Omar Bongo. Ce dernier appréciera sans doute les échanges avec Pierre Bédier, condamné en première instance – il a fait appel – le 12 décembre 2006, par le tribunal correctionnel de Paris à 18 mois de prison avec sursis, 50 000 euros d’amende et trois ans de privation des droits civiques pour corruption passive et recel d’abus de biens sociaux. Son appel étant suspensif, Bédier a pu se faire réélire en juin et accéder ainsi aux premières loges de l’amitié franco-gabonaise.
De son côté, l’ancien magistrat Georges Fenech (UMP, Rhône), natif de Sousse, dont le nom a été mêlé à l’affaire de l’Angolagate (cf. Le Fenech rôde sur notre site) a obtenu la tête du groupe France-Tunisie. Le libéral Louis Giscard d’Estaing (UMP, Puy-de-Dôme) a gagné la présidence du très convoité groupe d’amitié France-États-Unis, en remplacement d’un autre libéral, Ladislas Poniatowski. Plus significatif : le sarkoziste Philippe Cochet (UMP, Rhône), réputé proche des positions américaines, pilote le très sensible groupe d’amitié France-Iran, succédant à l’iranophile Xavier de Roux. Le villepiniste Hervé Mariton (UMP, Drôme) va s’occuper, quant à lui, des bonnes relations avec la Fédération de Russie, tandis que Claude Goasguen (UMP, Paris) prend les rênes du groupe d’amitié France-Israël, succédant au niçois Rudy Salles (Nouveau Centre) D’autres députés ont réussi à préserver leur pré carré. Le bon docteur Pierre Morange (UMP, Yvelines) conserve le groupe France-Côte d’Ivoire. Le sudiste Jean Roatta (UMP, Bouches-du-Rhône) préside toujours le sympathique groupe France-Maroc. Le socialiste Bernard Derosier (PS, Nord), très introduit à Alger, est préposé au groupe France-Algérie.
Plus étonnant : l’ex-pilier des amitiés franco-irakiennes du temps de Saddam Hussein, Daniel Garrigue (UMP, Dordogne), garde la main sur le groupe d’études sur l’Irak. L’amitié franco-arménienne reste sous l’influence de François Rochebloine (Nouveau Centre, Loire), très vigilant sur le dossier turc. Et, enjeu capital, les bonnes relations de la France avec les Seychelles demeurent sous les auspices de Gilbert Le Bris (PS, Finistère), qui continue de rêver vainement, mandat après mandat, d’une mission parlementaire sur place…
" A la chambre, il n’y a pas de partis, il y a des groupes" écrivait Robert de Jouvenel dans son pamphlet de 1913 la République des camarades. Pour conclure sur le sujet qu’ " un groupe, ce n’est pas une organisation politique" mais "une union corporatiste." qui "n’a pas été créé pour faire triompher une doctrine mais pour permettre à un certain nombre d’individus d’arriver sans se bousculer"
1913 ….2008 bientôt ! Quel est le changement ?
" […]La république des camarades, ce gentil canot destiné à une partie de plaisances entre copains, par beau soleil[…] Paul Morand"
Bon baiser de la Bastille.