Où Riou cherche un moyen de rehausser d’un éclat d’émeraude une séance de dédicace et trouve une mine d’or.
La réforme des collectivités territoriales, la baisse des crédits du ministère et voilà le monde de la culture aux abois. Des coupes dans les subventions s’annoncent, claires, draconiennes, et les associations devront compter sur leurs propres ressources. Pas facile. D’accord, certaines salles de théâtre, assez peu occupées, pourraient faire garde-meuble, un service très rentable. Mais ensuite ? Il suffit de bien chercher. Le hasard vient de me mettre sur la piste d’une petite mine d’or, que possède sans le savoir cette maison de la culture que le monde nous envie, l’Académie française.
Invité à signer publiquement un ouvrage très secondaire dans une obscure ville de province, je m’inquiétai du peu de retentissement probable de cette manifestation et, cherchant un moyen de lui donner de l’éclat, je m’avisai de la beauté de l’habit vert, dont on vient de vérifier l’aspect seyant lors de la réception de Simone Veil. Je décidai donc de m’en vêtir lors de cette signature, considérant que, si la qualité de mes œuvres ne m’a pas positivement autorisé à le porter, les ayants droit ne le méritent souvent pas davantage (j’avoue que je suis parfois assez prompt à me justifier).
Bref, c’est l’oeil gourmand que je me mis en chasse ; mais une consultation des maisons de farces, attrapes, cotillons et location de costumes m’ôta toute illusion. Chez eux, un habit d’académicien se loue 1 000 euros par jour, au motif que le vêtement en question est cousu de fils d’or et que, les académiciens se faisant enterrer avec, la chose est rare.
Je suppose qu’on voit où je veux en venir. L’habit des académiciens coûte la peau des fesses. Leurs amis doivent se cotiser, eux s’endettent pour l’immortalité. Et quand cet habit leur sert-il ? Une seule fois par an, en moyenne, à l’occasion des réceptions. Je suggère donc aux sociétaires de mettre eux-mêmes en circulation leurs habits, épées, bicornes, lesquels donneraient de l’allure à tant de gens qui en manquent, et de gérer directement leur location.
Il existe, quai Conti, à droite en regardant la Coupole, un bel édifice dont la conciergerie, très bien placée, pourrait abriter le magasin de location académique. L’enseigne est toute trouvée : Aca-loc.