Une étude démontre qu’un fumeur voit sa vie abrégée d’une quinzaine d’années. Quand on pense au casse-tête que représente l’avenir des retraites…
J’ai arrêté de fumer trop tôt. La cigarette comporte bien des avantages. Elle donne une contenance, calme les appétits. Ses volutes favorisent la pensée, fixent les méditations. De plus, arrêter de fumer peut nuire gravement à la santé des autres : sous l’effet du sevrage, on a très vite envie de les tuer. Je fumais, il est vrai, d’énormes cigarettes gorgées de goudrons : des Celtics, qui avaient remplacé directement la chique chez les marins bretons, et des Boyards dont on a plein la bouche, chacune recelant assez de bitume pour couvrir un kilomètre d’autoroute.
Ça fait donc plus de trente ans que je ne pétune plus, mais que je me ronge les ongles. La simple sagesse et la tranquillité de ma famille me commanderaient de renouer avec la clope. Mais, effrayé par les campagnes anti-tabac, je ne trouve plus la volonté de me remettre à fumer. Et voici qu’une information me jette dans le trouble, au point de me demander si, depuis tant d’années, la médecine et les gouvernements ne font pas fausse route.
Si, au lieu de payer très cher des campagnes dissuasives et d’interdire le tabac dans les lieux publics, on ne devrait pas au contraire investir l’argent dans la promotion du tabac, proscrire les bouts filtres, légiférer pour rendre la fumette obligatoire dans les cafés et autres lieux publics, et taxer lourdement les patchs anticigarettes. Une étude récemment publiée démontre en effet qu’un fumeur voit sa vie abrégée d’une quinzaine d’années : ô merveille, quand on pense au casse-tête que représente l’avenir des retraites.
Ce qui ruine les caisses de prévoyance, c’est justement l’augmentation de notre durée d’existence. Quinze ans de vie en moins font passer l’espérance de longévité autour de 65-66 ans pour les hommes, 71-72 ans pour les femmes (qui seraient priées de fournir un gros effort). On imagine la grande prospérité des finances publiques si les bénéficiaires de la retraite cassaient leur pipe après un an ou deux de farniente. Elles feraient même des bénéfices. Ah, la belle mort !
Morale : fumer aujourd’hui, c’est assurer l’avenir de nos enfants, et le faire goulûment nous prépare une vieillesse à la hauteur de nos aspirations.