Un peu en perte de vitesse sur le plan financier, Wendel, la société du baron Ernest-Antoine Seillière, revend le deuxième groupe d’édition français, Éditis, pour un milliard d’euros, probablement à l’Espagnol Planeta. Seillière avait promis d’en faire un géant de l’édition francophone. Mais bon : les promesses n’engagent que ceux qui les reçoivent…
Joie du capitalisme moderne : Wendel va vendre pour un milliard d’euros le deuxième groupe d’édition français (derrière Hachette, propriété de Lagardère), Éditis, qu’il avait acheté pour 660 millions en 2004. Une « performance » exceptionnelle, comme disent les boursiers. Applaudissons bien fort. Wendel a bien besoin de cet argent car la société financière contrôlée par le baron Ernest-Antoine Seillière (oui, l’ancien président du Medef) a pris environ 20% du capital de Saint-Gobain, une entreprise qui vaut près de 20 milliards d’euros. Mais dont le cours est en baisse de plus de 20% depuis le début de cette année. Ce qui n’arrange pas les affaires de Wendel, dont la valeur boursière est d’environ 4,3 milliards et qui doit faire face à la grogne de certains héritiers, inquiets pour leurs dividendes.
Dans ce contexte, la vente d’Editis est donc considérée comme une bonne idée. Et peu importe la nationalité de l’acheteur : des négociations exclusives ont été ouvertes avec le groupe espagnol Planeta. Les vénérables maisons d’édition Bordas, Nathan, Plon, Perrin et Le Robert vont donc traverser les Pyrénées. La transaction serait finalisée d’ici juin.
Curieux. Car le baron avait argué de sa nationalité en 2004 pour racheter Éditis. Il avait même bénéficié du soutien des pouvoirs publics - dont Jacques Chirac -, et des concurrents ont accusé Lagardère, le vendeur, d’avoir fourni des informations à Wendel pour lui permettre de faire la meilleure offre et donc devancer des groupes comme Gallimard ou Media Participations (ce dernier vient d’ailleurs de retenter sa chance pour Editis).
Résumons : profitant de la déconfiture de Vivendi après les folies de Jean-Marie Messier, Lagardère avait décidé de reprendre la branche édition du groupe avec l’aide du gouvernement. Le groupe affirmait qu’il voulait créer un géant français du secteur en constituant une sorte de monopole. À Paris, à part les petites maisons d’édition, personne ne râlait. Il a fallu l’intervention de la Commission européenne pour forcer Lagardère à vendre la plus grosse partie d’Editis (60%). Wendel a accepté de payer les 660 millions d’euros en cash et affirmait à l’époque qu’il était prêt à remettre 300 millions d’euros pour favoriser le développement de la société. Seillière insistait alors sur sa volonté de constituer un champion de l’édition francophone. Plus de trois ans plus tard, il revend purement et simplement Éditis.
C’est bien connu : les promesses n’engagent que ceux qui les reçoivent.
On se demande ce qui gêne dans cette histoire …
qu’une société change de stratégie ce qui, convenons-en, n’est pas interdit ..
ou que l’acheteur ne soit pas français ("Et peu importe la nationalité de l’acheteur") ???
Ca sent un peu le nationalisme rampant …
Bonsoir,
L’édition littéraire étant encore considérée il y a peu comme la clé de voute du domaine culturel, il parait logique que les pouvoirs logiques se penchent (par moments du moins) sur la question de la nationalité des acheteurs potentiels quand des maisons d’édition françaises "historiques" se retrouvent sur le marché… Pas de nationalisme rampant donc.