Plus qu’un brillant éditorialiste, doublé d’un visionnaire de la presse et d’un journaliste à l’indépendance chevillée au corps, Le Monde va perdre, en l’auguste personne de Jean-Marie Colombani, un gestionnaire hors pair. JMC a en effet introduit à petite dose l’intéressement des salariés du Monde aux recettes publicitaires. Enfin, d’au moins un salarié. Un petit chanceux nommé Colombani Jean-Marie. De petites missives, écrites sous l’agile plume d’Alain Minc en attestent.
Le sémillant président du conseil de surveillance du Monde s’est en effet fendu de deux lettres, courant 1999-2000, pour faire valoir les droits de son petit protégé. La première, datée du 28 décembre 1999 a été adressée à Maurice Lévy, le PDG de Publicis, qui détient 49% de la régie pub du Monde. Minc le remerciait de son agrément à la prime de 250 000 francs destinée au poulain Colombani. Sympa pour les étrennes de fin d’année
La seconde a été rédigée à l’attention du chef du service comptabilité du Monde, le 25 février 2000 : une invite à débloquer un à-valoir de 200 000 francs sur ladite prime pour le sieur JMC.
À tout le moins Minc se veut fidèle en amitié. Jusqu’après la chute de ses chouchous, qualité rare. Ces derniers temps, en pleine déconfiture colombanesque, le discret Alain a fait le tour des rédactions pour que ses petites lettres ne soient pas dévoilées. Las, les Inrocks, dans leur édition du 29 mai, en font des gorges chaudes. L’engeance des post soixante-huitards ne respectent rien, pas même l’amitié. Et un rédacteur du Monde de pronostiquer, « Colombani va quitter le journal sous les fourches ».