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Vélib’ : un vélo qui ne tourne pas rond

Paris / dimanche 17 février 2008 par Elodie Bui, Paul Gypteau
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Lancé en grande pompe (à vélo) le 15 juillet dernier par le bienfaiteur maire de Paris, le Vélib’ a connu un démarrage laborieux. Six mois et 15 millions de locations plus tard, le Vélib’ a toujours des ratés. « Bakchich » a enquêté sur les bugs techniques, les mystères de l’attribution du marché et autres curiosités du système. Aujourd’hui, premier coup de pédale !

A Paris, le vélo est un moyen de transport. De transport amoureux, puisque, officiellement, le deux-roues façon Vélib’ n’a reçu que des fleurs. Bertrand Delanoë, dit « Bébert », ses adjoints et services, Jean-Claude Decaux, bienfaiteur de l’humanité reconnu, ont tous été loués pour leur initiative pédalante. Le maire de Londres, Ken Livingstone dit « Le Rouge », a suivi le peloton en annonçant l’installation dans sa ville de 6 000 vélos en libre-service dès 2010. « Véritable révolution urbaine » censée apporter aux habitants de Paris un confort de vie nouveau, réglant les embarras de Paris, le système Vélib’ a bénéficié d’un baptême très médiatique l’été dernier.

Un bug, deux bugs, trois bugs

Jérémy attendait le lancement de Vélib’ comme le geste urbain, vraiment révolutionnaire, qui allait changer sa vie de citadin. Le 15 juillet, contrairement à son « habitus », comme aurait dit Bourdieu, notre ami se lève à l’aube et part en danseuse sur son premier Vélib’. A nous la liberté. Puis, ce fonctionnaire de 23 ans, donc pas totalement anarchiste, a subitement envie de raconter ses malheurs, enchaînés à son premier coup de pédale. Rien que des avatars, des trucs qui ne marchent pas, des promesses non tenues.

Fâché, fin juillet il créé un site Internet « velib-pourri.com ». En un mois la fréquentation atteint 5 000 visites, puis 10 000 le mois suivant. Frédéric, l’un des 605 inscrits du site, explique le type d’aventure à laquelle peut vous conduire le vélo à « Bébert ». Il découvre en décembre, sur son relevé bancaire, qu’une caution de 150 euros a été prélevée. Raison invoquée : un Vélib’ considéré comme « non rendu », alors que l’agile vecteur bicycle a bel et bien été rendu à sa borne. Un bug du système informatique que beaucoup de Vélibeurs ont éprouvé.

Parcours de Frédéric : « J’ai contacté plusieurs fois le service client, j’ai envoyé des courriers recommandés. Pas de réponse. Quand j’appelle, on me dit qu’il n’y a pas de responsable. Un opérateur me conseille même de prendre un avocat. Je suis furax, mais ne lâche pas ! » Et le jeune homme, en l’attente de lendemains qui chantent, continue de pédaler du 19e arrondissement jusqu’à Nation tous les jours.

Le Vélib’ en chiffres

180 000 abonnés (dont 30 000 en banlieue)

29 euros l’abonnement annuel

1 euro l’abonnement journalier

5 euros l’abonnement hebdomadaire

10 648 vélos au lancement et 750 stations au lancement

15 000 vélos aujourd’hui et 1 200 stations aujourd’hui

20 600 vélos prévus à terme et 1 451 stations prévues à terme

14,8 millions de locations depuis juillet

100 000 emprunts par jour en moyenne (2 fois moins quand il pleut)

170 000 emprunts par jour durant les grèves

100 000 km : c’est la distance moyenne que parcourent chaque jour les Vélibeurs parisiens (soit 2 fois et demi le tour de la planète)

Outre des bornes qui plantent, le système n’accepte pas toujours les abonnements de courte durée. Et il n’indique pas les stations libres où il existe une place pour raccrocher sa machine. Pas très pratique et abusivement coûteux, puisque cette navigation dans le brouillard conduit à dépasser la fatidique demi-heure où il faut reverser les euros au pot Delanoë-Decaux. Vous avez dit bizarre ? Sur le site internet de Vélib’, certaines stations ne figurent pas.

Pédaler moins pour payer plus

Ce vélo convivial a fait ressurgir un problème que l’on croyait résolu depuis Haussmann : la synchronisation des horloges. Une borne vous dit qu’il est 12 heures 10, l’autre 12 heures 15. Et, toc, il faut payer la subprime. La règle est alors de pédaler moins pour payer plus.

Détail navrant : des bornes n’impriment pas systématiquement un reçu. Ce qui empêche, par exemple et au hasard, Daniel Bouton le Pdg de la Société Générale, de mettre son vélo en note de frais. Ce qui empêche aussi de vérifier si l’horodateur, dans sa facture, n’a pas dépassé les bornes.

Mais le plus terrible hurlement du vélibeur, on l’entend quand un vélo, supposé libre, reste bloqué par un bug à son port d’attache. Sans parler de ces candidats à l’abonnement annuel qui ont dû attendre deux mois avant de recevoir la carte, le sésame du pédaleur…

Malgré son allure de tank, son apparente solidité, le vélo municipal est parfois en quenouille. Inventaire : tiges de paniers qui cèdent sans qu’on y ait posé les fesses de sa copine, problèmes de chaînes à répétition, déraillements, selles hors service. Le contrat du vélibeur prévoit un espace temps de 5 minutes entre deux emprunts. Bien. Vous prenez donc une première petite reine. Crac, elle est nase. Vous attendez donc 5 minutes, payantes, pour décrocher une autre machine qui veuille bien vous rouler.

Pendant les grèves de novembre dernier, la mairie estime qu’un Vélib’ sur trois était hors d’usage en raison du nombre d’emprunts très élevé. Il faut aussi compter avec l’idéologie qui domine de nos jours, l’individualisme. Et certains, dans l’esprit ultra libéral, pour être certains de retrouver un bon vélo, s’en attachent un à demeure, avec un antivol à eux, autour d’une borne. A la date du 19 décembre 2007, 962 Vélib’ ont été volés, dégradés. Côté morbide, un Vélibeur s’est tué et 89 autres ont été victimes d’un accident nécessitant l’intervention de la police.

Une hotline pas très chaude

Autre dysfonctionnement majeur : la hotline pas très chaude et difficile à joindre. Même si Jean-Luc Dumesnil, conseiller de Denis Baupin, l’adjoint aux transports à la Mairie de Paris, affirme : « A l’origine, ce service n’est pas prévu… » Le contrat stipule pourtant que « les usagers du dispositif de vélos en libre service pourront joindre gratuitement et 24 h/24 un conseiller afin de bénéficier d’une assistance ».

Selon Jérémy, le webmaster de « velib-pourri.com », l’absence de pancartes pose aussi un problème : impossible de savoir où trouver une borne lorsqu’on roule pénard dans la rue en écoutant sur son Mp3 le Boléro de Ravel. Denis Baupin souhaite qu’une signalisation, au sol, soit mise en place. Les services techniques de la Voirie refusent : il y a déjà trop de panneaux dans Paris.

Il n’y a pas de régulation naturelle des vélos

Mais, pour un travailleur de la chaîne, le dysfonctionnement majeur du Vélib’, c’est la régulation. Stations vides ou pleines, les stratèges de la Mairie-Decaux avaient tablé sur une « régulation naturelle », à la Jean-Jacques Rousseau.

Las, dans cette affaire, le naturel n’existe pas. Sauf dans les quartiers où l’on « trouve un équilibre entre emploi, logement et économie (sic) » dit encore Jean-Luc Dumesnil, sans que l’on comprenne ce que le « Monsieur Vélib’ » veut dire.

Impossible de trouver un Vélib’ aux abords des gares (car c’est la société Clear Channel qui détient le marché de l’affichage publicitaire à cet endroit). Peut-être aussi que les taxis, outre Attali, n’aiment pas Vélib’ ? Pas de vélos à proximité des Bois de Vincennes ou de Boulogne, donc pas d’amour fou et de feuille à l’envers pour le cycliste collectiviste.

La Mairie critique JC Decaux, où l’on parle de défauts de jeunesse

A la Mairie on se préoccupe de la révolution. Celle du vélo. Et on s’énerve face à ces injures modernes reçues par courriel. Mis en selle, Jean-Luc Dumesnil explique : « Les équipes de régulation actuelles ne sont pas suffisantes et JCDecaux n’est pas du tout à la hauteur. Ils ont besoin d’embaucher du personnel et de le former ». Céline Lepault, cette sainte Blandine chargée de mission Vélib’ à la direction de la Voirie, confirme : « La gestion de Decaux n’est pas du tout optimum ». Bref, le vélo va à vau-l’eau.

L’inventeur de la pub abribus, l’assassin de nos vieilles vespasiennes, tente de répondre, sans passer pour autant sur le 52X13 (pour mieux comprendre, lire Antoine Blondin, pourquoi par sur internet, ça le fera rigoler). Un certain nombre de défauts « de jeunesse » ont déjà été traités. Pour le groupe privé, ce sont les pics de locations enregistrés durant la dernière grande grève (jusqu’à 170 000 locations par jour contre environ 100 000 à l’ordinaire) qui ont mis en lumière les ratés de ce capitalisme livré en bécanes. Quoique spécialiste de la sanisette, Decaux a été débordé.

En attendant le Vélib’ 2

Des ingénieux du vélo s’y sont donc collés. On rajoute des tendeurs de chaîne pour limiter les déraillements, les pneus sont mieux gonflés. Le délai de 5 minutes, temps de battement entre deux vélos, a été supprimé. Dans les « prochains mois », le lancement d’une « version 2 » du Vélib’ est prévue, avec un cadre renforcé, ce qui devrait rapprocher l’engin du vélo chinois, qui pèse un âne mort. Dialogue enfin : depuis une borne et par interphone, on pourra injurier un employé Vélib’. Formidable !

Hélas pour le journaliste qui ne se nourrit que de vélos qui n’arrivent pas à l’heure, la baisse de fréquentation du site « velib-pourri.com » témoigne de l’effritement du taux de mécontents !« Il y a de moins en moins de problèmes », note le cyclo-webmaster. On devrait s’en réjouir.

Hélas encore, Decaux s’emploie bien à « patcher » ses logiciels pour limiter les couacs. Mais la régulation reste le vrai casse-tête. Une cinquantaine d’agents s’y attelle chaque jour. Leur mission : remorquer les Vélib’ des stations pleines pour les déposer dans les stations vides. Un travail totalement inefficace, la faute au manque d’effectif.

Et nous allons errer longtemps, puisque aucun renforcement des équipes n’est prévu. Et l’inspection du travail n’a pas donné son feu vert pour que les employés de JCDecaux travaillent la nuit. Plage idéale, paraît-il, pour faire tourner aussi bien les vélos que les tables.

L’agrandissement des stations, au détriment des autos, est aussi à l’étude. « Ce qui pose problème, ce n’est pas le nombre de stations mais le nombre de points d’attache disponibles », nous dit Jean-Luc Dumesnil, le Zarathoustra du Vélib’.

Enfin, puisque le Parisien n’a pas le cœur assez sacré pour pédaler jusqu’à Montmartre ou aux buttes Chaumont, et n’utilise le vélo que pour descendre, les stations de nos montagnes (enfin, nos monts) sont vides… Une prime au courage, comme jadis au Vel’d’hiv, va être instaurée. Pédaler plus pour gagner plus. Quinze minutes de crédit cumulable seront offertes à chaque Pantani sans contrôle de l’E.p.o.. Premier arrivé au Sacré-Coeur.

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29 MESSAGES
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Forum

  • Vélib’ : un vélo qui ne tourne pas rond
    le mercredi 20 février 2008 à 00:44, Jeanne a dit :

    OK, il y a sans doute des pbs…

    Mais tous mes amis étrangers qui sont venus à Paris et auxquels j’ai fait découvrir le Vélib (dont je suis une adepte quotidienne) ont ADORE.

    Et ne rêvent que d’une chose : que leur ville adopte le même système !

    • Vélib’ : un vélo qui ne tourne pas rond
      le vendredi 16 mai 2008 à 03:39, VA a dit :

      Tout à fait d’accord, les Erasmus sont fans !

      C’est assez marrant comme on aime la critique facile en France. Vous n’aimez pas Velib ? solution super simple : arrêtez de les utiliser et tout le monde sera content. Personnellement, j’ai commencé à utiliser les vélos à Lyon, et maintenant à Paris… jamais eu de soucis, et je trouve que c’est pratique. Je veux bien concevoir qu’il y ait des problèmes, mais c’est comme partout ! Enfin…

  • Vélib’ : un vélo qui ne tourne pas rond
    le lundi 18 février 2008 à 18:49

    Article très décevant, car uniquement à charge. En tant qu’usager régulier, je peux vous assurer que je suis globalement ravie de ce service. Lorsque les questions de régulation seront réglées (je suis optimiste) ce sera presque parfait. Il faudra également réapprendre aux vandales le respect de la propriété collective, alors Paris sera le paradis !!!

    signé : Voila

    • Vélib’ : un vélo qui ne tourne pas rond
      le vendredi 22 février 2008 à 18:54
      hello Voila, que penser alors de la propriété collective ?! Reen, le vandale d’adm
  • Vélib’ : un vélo qui ne tourne pas rond
    le lundi 18 février 2008 à 14:53, Le vélo for ever a dit :

    LE VELIB EST MORT, VIVE LE VELO

    Bravo ! Quand on sait que l’argent public est rare et cher, que Paris manque d’espaces verts, de studios pour étudiants, d’hopitaux pour personnes agées, de crèches, et un maire à bobos dépense sans compter pour monter une usine à gaz qui ne fonctionne pas. Parisiens, vous souhaitez faire du vélo comme moi ? Offrez vous une jolie bicyclette, cent à deux cent euros aux Puces ou dans un magasin à vélos, et roulez jeunesse ! Pas besoin de Monsieur Delanoé que l’on attendait sur d’autres terrains (pas seulement de jeux) Un amoureux du vélo

  • Vélib’ : un vélo qui ne tourne pas rond
    le lundi 18 février 2008 à 11:47
    Mouais… Article a charge.. La critique est aisée…
  • Vélib’ : un vélo qui ne tourne pas rond
    le dimanche 17 février 2008 à 23:45
    On ne parle que des vélos qui ne marchent pas, l’auteur de cet article n’est pas un utilisateur régulier sans quoi il comprendrait que Vélib résout + de problèmes qu’il n’en cause ; un papier à charge, dommage
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