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LUTTES / CHRONIQUE DU BLÉDARD

Sur les pistes

lundi 11 mai 2009 par Akram Belkaïd
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Le blédard aux sports d’hiver distingue les derniers flocons de la saison. Saisissant…

Un soleil de plomb cogne sans relâche sur la montagne et transforme, ici et là, la neige en poches de bouillie grise. Fin de semaine et fin de saison. Les chaises et les bancs du restaurant d’altitude ont été rentrées et ne restent en terrasse que de lourdes tables métalliques qui attendront bien sagement l’été prochain et l’arrivée des premiers randonneurs. Un peu plus haut, l’hôtel habituellement pris d’assaut par des britanniques assoiffés de bière et de vin chaud n’est plus qu’une silencieuse bâtisse aux haut-parleurs éteints. Ses murs, ses pièces et ses sols peuvent enfin se reposer.

Il y a pourtant encore du monde sur les pistes. Il y a même foule à côté du tapis mécanique qu’empruntent les débutants-sitôt maîtrisée la marche en canard-quand ils repartent vers le sommet de la petite pente qui offre un dénivelé idéal pour travailler leur chasse-neige. «  Le chapeau, Lola, fais le chapeau », crie une mère à sa petite fille, combinaison rose fluo, casque jaune citron et lunettes de soleil miroitantes. Le problème, c’est que Lola a compris que des skis en parallèle permettent de filer plus vite et de dépasser ce gros lourdaud, à peine plus haut qu’elle, qui n’a pas voulu l’aider quand elle est tombée, fesses en arrière, à la sortie du tapis.

Groupe de skieur non-identifiés, jeans et torse-poil

«  Doucement, Lola, doucement ! », crie encore plus fort la mère restée au pied de la pente. Mais il arrive ce qui devait bien sûr arriver. Lola a voulu slalomer comme ces surfeurs qu’elle vient de voir passer. Un petit dérapage vers la droite, un ski qui chasse vers la gauche et patatras. Rien de grave ni de spectaculaire mais voilà déjà Lola qui pleure. «  Bien fait pour toi, crie la mère. Je t’ai dis de faire le chapeau ». Comme si cela pouvait consoler la petiote. Un bon coach aurait dit «  c’est pas grave, tu te relèves et on continue », une mère-poule aurait hurlé «  bouge pas, j’arrive », mais la maman préfère la facilité et l’air connu du « je t’l’avais bien dit ». Le petit gros, skis bien convergents, passe en ricanant alors Lola pleure de plus belle.

Annoncée par le crissement des cares sur la neige, une cohorte de bambins, futurs oursons ou peut-être même futurs flocons, glisse à cinquante centimètres d’elle sans ralentir et sans même lui accorder le moindre regard. Ils suivent leur moniteur à la combinaison rouge et blanche lequel n’a même pas besoin de se retourner pour vérifier que tout ce petit monde, à l’exception d’un ou deux petits malins qui coupent leurs virages, est bien dans son sillage. Formidable aisance de cette marmaille quand tant d’adultes débutants paraissent si empruntés et apeurés par la perspective de se retrouver, au mieux, dans les filets de protection… Les groupes de gamins passent les uns après les autres. Premières étoiles qui savent que la prochaine fois, ils auront le droit de skier avec leurs bâtons, deuxièmes étoiles qui en imposent déjà puis enfin, les troisièmes étoiles, pré-ados dont la facilité impressionne mais écoeure aussi ce quadragénaire qui n’en finit pas d’essayer de trouver l’astuce pour faire aussi bien que Lola quand elle s’engage sur le tapis.

Et puis voici qu’arrive un groupe non identifié. En tête, un éducateur, chapeau de clown sur la tête, mine un peu chagrinée à force de recevoir des boules de neige dans le dos alors qu’il aimerait tant que les zozos, quinze ans d’âge au maximum, qui lui filent le train se décident enfin à admirer la fluidité de sa glisse. «  Hé, Denis, t’as vraiment le ’stayle’ », se moque d’ailleurs l’un d’eux en manquant d’emporter avec lui la mère de Lola qui s’est enfin décidée à aller secourir sa fifille. Spectacle étrange : l’insolent est en short et porte le haut du costume de Batman. Un autre, porte le masque de Bob l’éponge.

Le spectacle se répète presque à l’identique. Il y a l’éducateur qui fait sa tronche, quelques élèves qui trouvent amusant de lui envoyer des boules de neige

En queue de peloton, un ado hurle à plein poumon et fais sursauter tout le monde. « Hééé, Bilâââ-l, c’est moi le ’stayle-man’. Regarde le dérapage contrôlé. Mais attends-moi Bilal, attends-moi, bord… ». L’énergumène skie en jean et torse nu. Peut-être est-ce pour atténuer ce ridicule bronzage de cycliste (le visage mais pas le cou, les bras mais pas le tronc) qu’il exhibe fièrement. Chocs thermiques répétés : quand à l’hiver prochain viendra l’heure de l’angine, fera-t-il le lien avec ce moment d’inconscience qui fait hocher la tête de cette monitrice ? « Tu ferais mieux d’aller te couvrir et regarde devant toi », lui conseille-t-elle, immobile sur ses skis et attendant que toute la petite bande se soit éloignée pour se rapprocher, marche en canard dynamique, vers son élève, une quinquagénaire toute crispée et restée en haut de la pente.

« Don’t worry, lui crie-t-elle. Your leg, like zisse, zi odère, like zat and you come to me slowly. Go ! » La dame, hésite un peu, avance un ski, puis l’autre, et c’est parti. Chasse-neige magistral, à peine un chouia écarté. Oui, mais voilà, comment s’arrêter ? « Open ze hat, crie la monitrice, open ze hat. More, more ! » Un arrêt brusque mais pas de chute. C’est presque aussi bien que Lola qui veut maintenant aller à l’assaut de la piste bleue en contrebas malgré les menaces et suppliques de sa môman. Pour la skieuse venue d’outre-Manche, la leçon continue. Marche en canard, engagement sur le tapis roulant, descente prudente et ainsi de suite. Les skieurs qui passent se font plus rare. Il est bientôt l’heure de redescendre vers la vallée. «  One again and finish », décide la monitrice alors que revient la bande des costumés.

Comme par enchantement, le spectacle se répète presque à l’identique. Il y a l’éducateur qui fait sa tronche, quelques élèves qui trouvent amusant de lui envoyer des boules de neige sûrement amassée au moment d’emprunter le télésiège pour faire le spectacle devant le petit monde réuni autour du tapis mécanique et un ou deux autres ados qui crient à tue-tête les prénoms de ceux qui sont devant eux et qui, de toutes les façons, ne peuvent se retourner. «  Kââââ-rim, r’garde le stayle, vise-moi ce schuss ! Mais Kâââ-rim r’garde moi espèce de bât… ».

Ils sont tous passés et partis. La monitrice a aidé son élève à déchausser ses skis. Lola est encore tombée mais elle n’a pas pleuré. Le tapis est arrêté et là où la neige a bien fondu, un gant perdu flotte au milieu d’une flaque aux reflets arc-en-ciel.

A lire ou relire sur Bakchich.info

Malgré la crise, des entreprises roulent encore sur l’or… blanc. La discrète Compagnie des Alpes a su appliquer aux remonte-pentes la recette qui fait la richesse des sociétés d’autoroute.
Il n’y avait plus eu de neige à Marseille depuis 22 ans. Fallait-il donc s’équiper en chasse-neige (il en faut un sacré paquet, pour une des villes les plus étendues de France, pleine de collines et de pentes, sillonnée d’innombrables traverses (…)
Mohammed VI est un roi people. Et sa pipolerie trouve son apogée lorsqu’il vient faire un petit tour en France où du Crillon à Courchevel il oublie les soucis du royaume.
Il neige sur Paris, et cela n’inspire pas l’ennui à notre blédard.
Voir en ligne : in Le quotidien d’Oran

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