En dix ans, il est devenu l’un des meilleurs dessinateurs japonais. Jirô Taniguchi récidive cette année avec la sortie de son album, « Le Promeneur », sorti jeudi 24 septembre aux éditions Casterman. Retour sur ce récit en images, à mi-chemin entre les rêveries de Rousseau et les déambulations de Modiano.
Difficile de parler de manga. Le Promeneur de Jirô Taniguchi s’éloigne du genre japonais pour se rapprocher de la traditionnelle bande-dessinée franco-belge. Découpage strict des vignettes, précision du trait et pourtant. C’est une véritable plongée dans l’Empire du soleil levant que nous offre l’auteur de Quartier Lointain, son dernier album à succès.
À travers huit « promenades », Jirô Taniguchi embarque son lecteur dans les bureaux des buildings comme dans les ruelles les plus anciennes de Tokyo. Au hasard de ses balades, notre héros, chef d’entreprise, retrouve des objets du passé, comme les « socques », ces tongues japonaises en bois, ou des vieux amis qu’il ne pensait pas revoir un jour. « Oh ça alors ! », « Imori ?, c’est toi ? ». Nostalgie et mélancolie se mêlent au fil des pas. La ville, d’habitude si anonyme, respire les souvenirs. Peu importe sa direction, notre chef d’entreprise se confronte toujours au passé, à son enfance. Si dans une interview menée par l’écrivain et le cinéase belge Jean-Philippe Toussaint, Jirô Taniguchi affirme ne pas avoir de « philosophie particulière de la marche », il reconnaît que c’est « une activité particulièrement importante, surtout quand elle n’a pas d’objectif précis ». Une manière de défier la mémoire et les sens, d’obliger notre marcheur à revenir sur tous les personnages qu’il a pu être : jeune guitariste, chef d’entreprise, étudiant, grand frère consciencieux…
Ainsi va la double-vie de Jirô Taniguchi. Dessinateur dans le réel, promeneur sur le papier. Seul regret, le style s’essouffle un peu pages après pages. Une certaine monotonie s’installe. Mais impossible de quitter le « Promeneur » en pleine rêverie. Le scénario, mené par Masayuki Kusumi, ne laisse pas le lecteur décrocher. Qu’adviendra-t-il de ce promeneur solitaire ?
Quand vous avez du bon contenu, c’est pour parler de celui des autres. Oui, Taniguchi est un auteur exceptionnel, je crois d’ailleurs que beaucoup ne vous ont pas attendu pour le lire.
Signé : un lecteur payant déçu qui devrait aller ailleurs et arrêter vos envois d’e-mails, ce qu’il va faire à l’instant