L’ex-journaliste sportif est devenu conseiller pour les programmes du directeur de France 3. Comme quoi, il faut toujours cultiver ses amitiés politiques.
« Indépendance ! » Martelé par Rémy Pflimlin depuis sa nomination par le président de la République à la tête de France Télévisions, le mot vient de perdre un peu de son sens avec la nomination de Pierre Sled comme « conseiller pour les programmes auprès du directeur de France 3 ». Démissionnaire de La chaîne parlementaire (LCP), où il officiait depuis 2009, le journaliste peut dire merci à Frédéric Lefebvre, lobbyiste talentueux et ami qui pousse depuis longtemps pour promouvoir son poulain cathodique.
Le mari de Sophie Davant peut également rendre grâce à Claude Guéant, qu’il a rencontré avant l’été. « Depuis, Pierre était sûr de sa promotion, il disait même que ça ne serait pas Bompard mais Pflimlin qui serait nommé », confie un de ses anciens collègues. Autant dire que Pierrot est bien mieux informé que tous les journalistes médias de la place. Sa mission aujourd’hui ? Faire oublier le parachutage élyséen. « Sarkozy ne me pistonne pas », s’est défendu Sled dans l’Express, indiquant qu’il est par exemple soutenu par la socialiste Anne Hidalgo. Il reconnaît qu’il « échange de temps en temps » avec le Président, mais omet de dire, comme l’a signalé Libération, que tous les candidats au poste de patron de la télé publique avaient indiqué qu’ils l’embaucheraient si d’aventure ils étaient nommés.
Ancien prof de sport au lycée Janson-de-Sailly à Paris, devenu journaliste sportif (l’Équipe du dimanche sur Canal + puis Stade 2 sur France Télévisions), Pierre Sled change de casaque en 2003, quand il intègre Public Sénat.
Jean-Pierre Elkabbach, alors patron de la chaîne, se souvient : « Il était venu me trouver avec un projet de jeu pour la radio. On s’est vus à L’Avenue, le café en bas d’Europe 1, et je lui ai dit que son idée n’était pas bonne. Il était alors au chômage et je l’ai embauché. Au début, il ne connaissait rien à la politique. Je l’ai entouré d’assistantes tout droit sorties de Sciences Po pour l’aider à préparer ses émissions. Il y a appris la politique et aussi les relations avec les politiques. Il y a rencontré des députés comme Lefebvre, c’est vrai, mais aussi Benoît Hamon. Et il a appris l’équilibre avec moi. C’est aussi grâce à cela qu’il en est là aujourd’hui », conclut l’intervieweur que le monde nous envie.
C’est d’ailleurs au titre de présentateur à Public Sénat puis à LCP qu’il participe à plusieurs reprises, en 2009 et en 2010, aux dîners-débats du Club parlementaire sur l’avenir de l’audiovisuel et des médias. Un joyeux raout fondé et animé par le député UMP Franck Riester et le porte-parole du parti, Frédéric Lefebvre. L’occasion pour l’apprenti journaliste politique de s’imprégner des codes en dînant à la table de Patrick Balkany ou d’interroger Frédéric Mitterrand sur l’actualité de la culture. Voire, selon les mauvaises langues, d’asseoir son réseau. Et Pierre Sled apprend vite.
Entre deux riffs de guitare, activité qu’il affectionne, « Sled Zeppelin » invite régulièrement son amie Hidalgo à débattre dans ses émissions. Des attentions à droite et à gauche – et si c’était ça le journalisme politique ? – bienvenues quand on a de l’ambition. Candidat à la succession d’Elkabbach à la tête de Public Sénat, il se fera pourtant damer le pion, en 2009, par Gilles Leclerc. Mais avec France Télévisions, Sled n’a pas raté le coche. « Journalistiquement, il a fait son boulot », défend Gérard Leclerc, son ancien patron à LCP. « C’est un passionné d’antenne et il a beaucoup d’idées en termes de programmes », assure-t-il. On ne demande qu’à le croire.