La gloire revient à celui qui énonce et dénonce les actes de pédophilie. Mais quid de celui qui s’est tu pendant toutes ces années par culpabilité ?
C’est étrange cet engouement médiatique pour dénoncer la pédophilie. Ça me met mal à l’aise. J’ai du mal avec ce sentiment de satisfaction de mettre au grand jour la pire des atteintes intimes. Comme une gloire, un trophée que les journalistes brandissent en étendard de bonne conscience.
Bien sûr qu’il est nécessaire de dire et de dénoncer. Bien entendu qu’il était temps que les tabous se lèvent et notamment pour l’Eglise catholique. Mais quand les médias s’emparent de ces affaires, ils en font leur « coup »… -On en connaît aussi les dégâts avec l’engouement d’« Outreau » – Et je me demande si un seul instant, ils pensent à la conséquence de leurs « révélations » sur les victimes. Parce que la gloire revient à celui qui énonce (voire qui dénonce dans le cas des « infiltrés » et de CAPA) les actes de pédophilie.
Mais quid de celui qui s’est tu pendant toutes ces années par culpabilité ? De celui qui a survécu tant bien que mal ? C’est un bienfait pour lui que son agression soit rendue publique, certes… Mais ne mériterait-il pas d’être un peu « ménagé » ? Comment tourner les lumières vers lui sans le heurter… ? Que peut-on en dire d’ailleurs ? Comment ? Les mots suffisent-ils à décrire la dévastation intérieure ? Les victimes ne risquent-elles pas de se voir dépossédées de leur pire réalité ? Celles dont elles ont honte depuis si longtemps ? Et de se sentir une deuxième fois abusée ?
Alors bien sûr, c’est heureux qu’on ose enfin en parler, que les paroles se libèrent –celles des victimes surtout car trop de personnes le taisent pendant une vie parfois. Mais ce serait tellement mieux que ça n’arrive pas par spasmes. Et plutôt que de jouer par ondes de choc, que la presse donne la parole sur la longueur aux victimes. Qu’elle se fasse le véritable relais de l’horreur et non de scoops. Parce que du coup, en procédant par vagues, elle nous renvoie l’image d’un justicier, qui, chapeau bas, d’un coup de titres et reportages du fond de la misère, révèle au grand jour ce sujet tellement tabou de la pédophilie. Comme si l’enquête était devenue en France d’une telle rareté qu’il faudrait l’applaudir à sa moindre révélation.
Et c’est vrai que c’est bien que des enquêtes aboutissent, mais je m’interroge sur la conséquence d’images et de paroles auprès de ceux qui ont osé. Car il faut bien plus qu’un medium à la victime pour recouvrer son droit de vivre. Bien plus qu’une campagne médiatique. Car même après des révélations, elle continue d’avoir peur. Et quand celle de Roman Polanski demande, 30 ans plus tard, qu’on cesse de vouloir prouver la culpabilité du réalisateur, c’est aussi et peut-être parce qu’elle voudrait pouvoir dorénavant jouir de son droit à vivre. Ou de parler. Mais non qu’on la dépossède et pour une deuxième fois, de son droit de dire.
Il est écrit à juste titre par l’auteur de cet article que peut-être l’enquête est trop rare, d’où ces révélations par vagues, sous forme de scoops.
C’est si vrai. Quand un journaliste se donnera-t-il les moyens d’enquêter sur la manière dont la pédophilie est réprimée en France ? Là est la vraie question. Combien de fonctionnaires de police dans une brigade des mineurs qui traite très accessoirement de cette question ? A comparer avec les effectifs des autres brigades ? Quand un journaliste se posera-t-il la question de savoir pourquoi les atteintes aux personnes sont moins réprimées que les atteintes aux biens dans notre société de l’égalité et de la fraternité ? Surtout quand ces personnes sont des enfants qui n’ont pas le droit d’être entendus seuls ou s’interdisent eux-mêmes d’en parler (honte, poids du secret, effectivement) ?
Alors il faudrait se taire aussi ? Pour protéger qui ? BAKCHICH du côté des plus forts ou du côté des plus faibles ? Quel ennui profond peut conduire certains adultes dépravés à confondre leur désir avec les attouchements impudiques imposés à un petit bonhomme ou à une petite fille ? Encore une fois, c’est quoi cette soudaine indulgence au nom des victimes ! quel sophisme ! de la pédophilie ? Je suis déçue par une presse qui se dit libre et qui aboie avec les chiens quand la caravane passe.
La Jetset et BAKCHICH s’émeuvent de la chasse aux pédophiles, pauvres victimes d’une "nouvelle" vague médiatique. Tout le monde sait qu’un pédophile est un grand incompris en mal d’affection et à la recherche du paradis perdu. Tant d’innocence, celle de l’enfance, à portée de mains expérimentées et aimantes ! En police, la lutte contre la traite des êtres humains comprend aussi la prostitution des mineurs. C’est parce qu’ils le veulent bien, mon bon monsieur ! Et puis tout se paye. La caravane et son lot d’esclaves humains passent. BAKCHICH et la Jetset aboient comme les chiens domestiques de notre société de marchandisation, trop bien nourris par la main du Maître. Et ce Maître, quel est son nom ?
J’attendais mieux d’une presse qui se proclame libre que cette compassion malsaine et nauséabonde pour les victimes de la pédophilie, non pas les enfants, mais les auteurs d’actes pédophiles que d’aucuns oseraient dénoncer imprudemment. Le monde à l’envers ! Les enfants victimes dans leur chair et trahis dans leur confiance à l’adulte devenus majeurs vont-ils devoir s’excuser de vouloir déposer plainte, acte abominable ? Question : c’est qui la victime pour BAKCHICH ? Et pour une seule victime qui ne veut plus de médiatisation mais qui AVAIT DEPOSE PLAINTE contre une personne célèbre appartenant à la Jetset, il faudrait que toutes les autres victimes renoncent à leurs droits ? Et se taisent. A qui profite le crime ? Et le silence des agneaux ?
Il doit sûrement exister un syndrome de "Peter Parker" chez les journalistes, qui les fait se prendre pour des super héros le temps d’une enquête.
Une fois le "prédateur" dénoncé et écroué, ils descendent de leur toile, retirent leur costume et retournent à leur petite vie tranquille de porte-parole des puissants…