Le candidat du pouvoir a été nommé à la tête de l’association des magistrats tunisiens. Mais, une fois n’est pas coutume, ce n’est pas le clan Trabelsi qui a intrigué, mais celui de Ben Ali, en la personne du petit neveu de Zine, Lofti
Comme prévu (et annoncé par Bakchich), l’Association des Magistrats Tunisiens (AMT) s’est dotée d’un nouveau président le 3 décembre dernier. Et le candidat du ministère de la Justice l’a emporté : Tarik Braham a succédé à Khaled Abbes. Les autorités tunisiennes n’ont, il est vrai, pas fait dans la demi-mesure.
Déjà, les semaines précédentes, les membres de l’AMT ont été cordialement invités dans les bureaux du ministre, histoire de découvrir le degré de corruption de l’ancien président de l’AMT, Khaled Abbes. Servile au possible, ce fieffé coquin n’oubliait pas de piocher quelques bakchichs sous les robes… et cela se voyait trop. Le sieur Abbes a donc été mis sur écoute par la flicaille tunisienne et a fait l’objet d’une petite campagne de dénigrement.
Au congrès même, Braham a pu compter sur un soutien de poids. L’auguste assemblée a été présidée par le procureur général de la Cour d’appel de Tunis. Un représentant du ministre de la justice dirigeant une réunion de magistrats « indépendants », une séparation des pouvoirs toute Ben alienne.
Il fallait au moins ça, toutefois, pour canaliser la masse des hommes en robe. 900 membres (sur les 1600 inscrits) ont répondu à l’appel. Une affluence étonnante mais facilement explicable. Les magistrats tunisiens, malgré leurs récriminations n’ont jamais obtenu l’inamovibilité. En clair, le pouvoir a la manie de les trimballer de poste en poste sitôt qu’ils enquêtent sur un dossier sensible, ou dès qu’ils n’obéissent pas. Seuls magistrats « immobiles », les juges de la Cour des comptes de Tunis ( 40 présents sur 250) et du tribunal administratif (3 présents sur 150) n’ont étrangemment pas fait le déplacement.
Une fois n’est pas coutume, le clan de Leila, la première dame, n’est pour rien dans les bisbilles judiciaires. Les Trabelsi se sont effacés devant les Ben Ali et plus précisément le petit-neveu de Zine, Lofti Daoues.
Un peu plus influent que son titre officiel de Chef de cabinet du ministre de la Justice et des droits de l’homme (si, si) ne le laisse présager, Lofti noyaute les instances judiciaires depuis 4 ans. Et le congrès de l’AMT lui a permis d’asseoir un peu plus son emprise. Outre Braham, Daoues compte désormais trois obligés, fraîchement « élus » au bureau de l’AMT : Adnan El Hani, Hatem Dachraoui et Riadh Garbi, le tout neuf secrétaire général.
Toujours subtile, la smala Ben Ali a fait comprendre au bon Garbi que sortir du rang aurait des conséquences fâcheuses. Au hasard, un procès contre son père, mis à mal dans quelques affaires d’escroquerie.
Souvent, les fils paient les fautes des pères…