Rencontre avec les marchands de journaux, principal lien entre les rédactions et les lecteurs. Le constat est amer : rythme harassant, salaires en baisse et hausse des produits hors-presse.
Face à la préfecture de Marseille, derrière le lycée Montgrand, juste à l’entrée de la rue Saint-Ferréol, Jean, 66 ans, tient le kiosque à journaux depuis 32 ans. C’est son dernier été. Il a signé le compromis de vente, il doit quitter la place le 15 septembre prochain. « Je ne regrette pas la vie que j’ai eue, on voit du monde, le contact avec les gens est agréable ! »
En 1978, à la suite d’un licenciement économique, cet ancien cadre chez Antargaz, responsable régional chargé des ventes aux campings, décide de reprendre un kiosque à journaux, « la vente de journaux m’a toujours plu, en plus on en tire une bonne culture générale ! »
Dans son kiosque ouvert 6 jours sur 7 de 7h30 à 19h, plus de 2000 titres sont proposés à la vente, du quotidien à la revue spécialisée des collectionneurs de boîtes de camembert en passant par les magazines people. Du sol au plafond, pas un centimètre carré n’est libre sur les présentoirs.
Cet ancien élève de l’école supérieure de commerce a connu le déclin progressif de la presse payante, déclin qui a commencé à se faire sérieusement sentir à la fin des années 1990.
Pour pallier la baisse des ventes, Jean a rapidement engagé une politique de diversification, en ajoutant des services supplémentaires comme les photocopies, la mise à disposition d’un fax, la commercialisation de confiseries, de sodas, de cartes téléphoniques, ou encore des réservations pour des spectacles. Dans un avenir proche, il délivrera des cartes grises « pour éviter de perdre du temps en préfecture. » « Cette diversification me permet de tenir le coup ! ».
Chaque matin, Jean fait la mise en place des quotidiens sur les présentoirs, retire les invendus, fait le comptage, les mets en liasses… La journée commence aussi par la lecture de certains journaux. « Ça dépend des titres, quand il y en a un qui m’attire, je lis » essentiellement Aujourd’hui, France-Soir ou le Figaro Mag et les revues comme Géo Magazine ou encore Ca M’intéresse et aussi bien sûr des revues sur les bateaux.
« Les titres qui se vendent le plus ? Les mag télé et surtout les people, heureusement qu’on a les people !!! Cela a toujours marché ! » Les magazines hebdomadaires ? « c’est cyclique cela dépend des unes » celles qui marchent le mieux : l’immobilier, les salaires des cadres, les Francs Maçons, les juifs ou encore les hôpitaux ; ces unes « boostent » les ventes. »
Jean a une vision tranchée sur la diffusion de la presse actuelle : « Internet nous massacre ! Les gratuits ? Cela sert à emballer les poissons, à protéger la vaisselle dans un déménagement ou à mettre par terre pour emmerder le cantonnier ! » Il croit au retour de la proximité, et à la réouverture des kiosques. Nombre d’entre eux ont fermé ces dernières années et certains étaient mal placés comme à proximité des plages du Prado où l’activité saisonnière ne permet pas « de tenir le coup sur l’année ». « Ce n’est pas parce qu’en ce moment cela ne va pas que ça va continuer ! Seuls ceux qui sont bien placés s’en sortiront s’ils peuvent tenir ! »
Un dernier coup d’œil sur le présentoir où se trouve Bakchich Hebdo rangé à côté de Charlie Hebdo. Six exemplaires de chaque sont là, le même nombre que le jour de la mise en place. Jean avoue ne pas en vendre beaucoup. « Au départ on me demandait Bakchich il n’y en avait pas, aujourd’hui j’en vends peu ».
A l’aube de la retraite, Jean le kiosquier, croit aux relations de proximité entre les habitants du quartier, les habitués avec qui quelques mots sont échangés à chaque fois, « le lien ! »
Retrouvez l’intégralité de l’enquête dans Bakchich Hebdo N°28 disponible chez votre marchand de journaux, chez Jean et ailleurs…
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