Le plan hôpital public annoncé par Nicolas Sarkozy jeudi 17 ne va pas calmer la colère grandissante des professionnels de la santé. Au contraire. Des restrictions en série, des lits à fermer, du personnel à éjecter. Un nouveau front social se prépare, après les lycéens.
Le discours de Sarkozy sur la réforme des hôpitaux publics, jeudi 17 avril, annonçant des regroupements et des économies n’a pas diminué la fièvre. Au contraire. Il l’a peut-être envenimée. Le ras-le-bol monte depuis plusieurs semaines dans le secteur de la santé. Les professionnels, en colère, pourraient ouvrir un nouveau front de contestation contre le gouvernement, après les magistrats, les avocats, les étudiants et les lycéens. Les manifestations se sont déjà multipliées en Loire-Altantique, dans le Jura, la Nièvre, etc.
A Carhaix, une petite ville de 7.000 habitants du Finistère, ce sont 10.000 manifestants, y compris des élus, qui se sont rassemblés fin mars. Les bretons s’apprêtent à remettre ça le 17 mai, au niveau du département cette fois. « La mobilisation va être grosse. Très, très grosse ! », prévient Bruno Jardin, l’un des responsables de la CGT au centre hospitalier de Carhaix.
Il est vrai que les cures d’austérité saignent l’hôpital : plus de 100.000 lits ont été fermés depuis 1992 et 200 établissements supplémentaires devraient fermer leurs portes selon les conclusions du rapport Larcher, qui a servi de base au plan annoncé jeudi 17 par Nicolas Sarkozy.
Celui-ci préconise de regrouper les établissements publics, de donner tout pouvoir à leurs directeurs, de rapprocher les statuts de ceux du privé, d’embaucher du personnel avec un statut de droit privé, incluant intéressement du personnel et rémunérations à la performance pour les médecins. Le tout, bien sûr, pour le plus grand bien des usagers.
« L’amélioration de la qualité et la sécurité des soins sont-elles les principales motivations des pouvoirs publics ? On peut en douter », résume Frédéric Pierru, chercheur à l’université Paris-Dauphine [1]. « A partir des années 1990, le discours de la rigueur budgétaire, peu mobilisateur, a été remplacé par celui de la ‘‘qualité des soins’’ », analyse-t-il.
Pour ce chercheur, la qualité des soins nécessite effectivement un seuil d’activité en chirurgie et en obstétrique. Mais les réorganisations doivent se faire dans la concertation avec les personnels, les usagers et en fonction d’une politique des territoires. En outre, cela nécessite des moyens. Or, « depuis les années 1970, la maîtrise des dépenses de santé est devenu l’objectif des pouvoir publics et c’est l’hôpital public qui a supporté prioritairement la rigueur budgétaire. Au début des années 1980, il représente près de 55% des dépenses de soins, contre 44% ces dernières années », relève Frédéric Pierru.
Pour le sociologue, Julien Duval [2], les réformes successives des hôpitaux comportent un important non-dit. « Il existe des obstacles économiques et sociaux à l’accès aux soins ». Or, la restriction de l’offre de soin les aggrave. Une étude de l’Institut de recherche et documentation en économie de la santé a indiqué, l’année dernière, que 14% des assurés ont renoncé à des soins faute de moyens. La proportion atteint 24% chez ceux qui gagnent moins de 800 euros par mois et même 32% chez ceux qui ne possèdent pas de mutuelle. En règle générale, ils renoncent aux soins des yeux, des dents, quand ce n’est pas simplement d’aller à consulter un spécialiste.
Ces restrictions accablent les personnels hospitaliers. Jeudi dernier, 400 délégués de douze hôpitaux de la région parisienne, y compris une intersyndicale de médecins, ont battu le pavé. « A Saint-Antoine, les pertes d’effectifs représentent 200 personnes en cinq ans sur un total de 3000 », signale Régine Linar, une infirmière qui représente la CGT dans cet hôpital. Les suppressions de postes ont été supérieures aux 130 embauches effectuées lors du passage aux 35 heures. Du coup, il n’y a plus assez de personnel pour s’occuper des patients souvent âgés, atteints généralement de plusieurs maladies, dont certaines sont graves. Résultat, Saint-Antoine est en grève depuis un mois.
De son côté, l’hôpital des Bleuet a récolté 4000 signatures de soutien et organise une journée portes-ouvertes le 31 mai avec manif place Jean Jaurès, à Paris. « Pour le moment, il n’y a que les militants, les initiés, qui se mobilisent, mais nous allons diffuser les conclusions du rapport Larcher », promet Régine Linar. Elle s’attend à une montée en puissance de la mobilisation fin mai. « Les rapports sur le service public vont tous dans le même sens : faire plus de place au privé », rapporte Françoise Geng, secrétaire générale de la fédération de la santé au sein de la CGT.
La santé pourrait alors servir de fer de lance aux protestations de l’ensemble de la fonction publique.
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[1] Hippocrate malade de ses réformes, Frédéric Pierru, Les Editions du Croquant, Paris, 2007, 256 p.
[2] Le mythe du « ‘trou de la Sécu », Julien Duval, Raisons d’Agir, Paris, 2007, 140 p.
les hopitaux malades de la peste financiére !
Nous entrons effectivement de plein fouet dans l’ère de la restriction de l’accès aux soins, difficultés financières des hôpitaux (pratiquement tous avec un déficit de plusieurs millions d’euros), déficit des praticiens qui à malheureusement été orchestré par nos gouvernants, augmentation importante de la demande de soins par le biais du vieillissement de la population. Tout celà associé aux effets délétère de la tarification à l’activité qui incite mécaniquement les centres de soins publics ou privés à valoriser les actes à hautes valeur ajoutée ( chirurgie, endoscopie, ). Quid du patient âgé, ou nécessitant des soins lourds ou encore en difficultés socio-economiques. le problème, les hôpitaux publics contrairement aux clinique ont mission de service public comment joindre l’alpha social et l’oméga économique ?? Les assurances s’engouffre donc dans la brèche d’ autant que les deremboursements ou participations diverses se multiplient. La consequence inéluctable, la distentiation d’une partie de plus en plus importante de la population de l’ offre de soins, financière, economique, géographique. la suprême habileté a consisté à faire croire que cette évolution était inéluctable et pratiquement non négociable.