Deux millions d’habitants à Paris et très, très peu de visites d’internautes sur le site de campagne des candidats. Ce n’est pas faute d’y avoir investi de gros moyens. Explications.
La réalité est terrible pour la politique parisienne. Les deux millions d’habitants intra-muros et les 10 millions au-delà du périphérique ne s’intéressent pas à l’élection municipale de la ville lumière… du moins sur Internet. Et le plus ridicule, c’est que les équipes des candidats n’ont pas l’air d’avoir saisi ce manque d’intérêt. Imaginez, sans les moyens de campagne des gros candidats, le site web de Bakchich.info est 15 fois plus visité que celui de Bertrand Delanoë, 20 fois plus visité que celui de Panafieu, 38 fois plus que celui de Marielle de Sarnez et des Verts.
Et de découvrir que le pauvre ex-maire de la capitale, Jean Tiberi, se retrouve hors classement fait mal au cœur. Heureusement, au contraire des autres, il n’a pas usé de nouvelles technologies, ni de caméra, ni d’interviews de personnalités, ni de captations de discours, ni de montage vidéo… Sur « tiberi.fr », il y a un modeste texte qui renvoie vers un fichier pdf : « Si, pour une raison ou une autre, vous n’avez pu vous rendre place Maubert, rue Mouffetard ou sur un des nombreux autres marchés qui animent les week-ends de notre beau Quartier Latin, vous trouverez ci-dessous le document de campagne résumant mes 5 priorités pour l’arrondissement ». Evidemment, on peut imaginer que Tibéri a compris qu’un site web n’est pas un tract, et qu’il est attaché à la notion de visite à laquelle on ne peut échapper. Tiberi.fr tranche avec les moyens mis en œuvre par Delanoë et Panafieu pour exister dans le cyberespace.
Mais pour le maire de la ville la plus visitée au monde, c’est un vrai camouflet. La ligne de l’audience n’a pas dépassé les 500 visites par jours jusqu’à janvier, puis on constate un léger mieux à l’approche de l’élection. Mais ne pas avoir plus d’audience lorsqu’on est candidat à la destinée d’une ville comme Paris, c’est tout simplement un échec en terme de communication.
Pour Delanoë, toute l’énergie déployée en interviews et petits reportages autour de Kevin Livingstone, le maire de Londres, Pascal Lamy, directeur général de l’OMC, Klaus Wowereit, maire de Berlin, Walter Veltroni, maire de Rome, Rajendra Pachauri, prix Nobel de la paix 2007, Philippe Dupont, artisan boucher, Richard M. Daley, maire de Chicago, Lionel Jospin, ex-Premier ministre, Elsa Zylberstein, actrice…, n’a servi à rien. C’est un peu comme si chaque soir, il n’y avait que 100 à 800 personnes regardant les programmes de notre chaîne culturelle ARTE. Ce terrible échec aurait pu contraindre l’équipe Delanoë à arrêter la production de contenus pour le site web du candidat socialiste. Mais non, le site est programmé jusqu’à la fin des élections, avec visiteurs ou non. En homme de communication, il prépare déjà sa candidature à l’Elysée. N’a-t-il pas déjà réservé le nom de domaine « delanoe20012 », anticipant un piratage, lui qui vient de gagner en septembre un procès pour récupérer « delanoe2008 », un site créé par des militants de l’opposition ?
Comme bertranddelanoe.net, panafieu2008.fr ne brille pas par des visites conséquentes. Là aussi, la profusion de programmes vidéo et de captation de discours n’ont pas aidé le site à relever la tête. Delanoë et Panafieu n’ont pas compris qu’Internet est un média de services, réfractaire à la notion de propagande. A Marseille aussi, le site local de l’UMP est un échec. A même pas un mois des municipales, il est classé à la 2761737ème place des sites visités dans le monde. C’est dire. Bien loin de la position du modeste site de Joseph Parpaillon, candidat à Orvault, petite ville de Loire Atlantique. Il est vrai que ce dernier nous accueille dans le salon familial, pour nous expliquer ses projets pour la ville. Tout simplement au contraire des autres ténors, il a compris qu’Internet n’est pas la télévision.
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