Les hôpitaux vont-ils afficher leur taux de mortalité ? Cette mesure iconoclaste, proposée par Roselyne Bachelot, est présentée aujourd’hui en conseil des ministres.
Dans le cadre de la réforme du système de santé français, présentée le mois dernier par le Président de la République, chaque patient devrait bientôt pouvoir consulter le taux de mortalité et d’infections de l’hôpital dans lequel il compte se rendre. Un honorable souci de transparence ? Les professionnels de la santé prennent cette réforme avec des pincettes. La Fédération Hospitalière de France (FHF) ne s’y oppose pas frontalement mais préconise « un travail commun » qui permettrait de publier des résultats scientifiques pertinents. Même remarque au Syndicat national des Médecins, Chirurgiens, Spécialistes et Biologistes des Hôpitaux publics : « La publication de chiffres bruts équivaut à de la désinformation. Il faut interpréter les chiffres, et les replacer dans leur contexte ». Des inquiétudes en direction des patients qui viennent s’ajouter aux leçons tirées de l’exemple américain.
Aux États-Unis, la publication des taux de mortalité par les hôpitaux est une pratique mise en place depuis quelques années déjà. Une étude récente, menée par la prestigieuse revue médicale Annals of Internal Medecine, pointe les effets pervers de la publication de telles données sur l’égalité de l’accès aux soins. Pour rester premier de la classe, certains établissements sont de moins en moins disposés à prendre en charge des patients souffrant de pathologies lourdes. Pire, d’autres hôpitaux renvoient les malades chez eux pour ne pas faire chuter leurs statistiques : les décès à domicile ne leurs sont pas comptabilisés. Même syndrome rencontré chez les spécialistes du bistouri. Les chirurgiens américains dont les résultats personnels sont également affichés, hésitent à opérer les patients à risques.
« Une conséquence inattendue » dénoncée par les experts de l’étude. Autant de mises en garde émises à l’encontre d’une mesure déjà controversée par les professionnels de la santé que Bakchich est allé interroger.
Le chef de service du Pôle d’Anesthésie – Réanimation Chirurgicale de l’Hôpital Européen Georges Pompidou : « le taux de mortalité brut ne veut rien dire, tout dépend de la pathologie traitée. Le risque est nettement plus élevé en réanimation polytraumatisée qu’en chirurgie esthétique, en cancérologie qu’en pédiatrie. Il serait plus intéressant, par exemple, de comparer les services de réanimation de plusieurs établissements, mais là aussi, il faudra affiner, définir des critères de comparaison précis, en tenant compte du type de patients traités. »
Un chirurgien cardio-vasculaire du CHU de Toulouse : « Je suis extrêmement favorable à cette initiative, sous réserve que l’on tienne compte des risques préopératoires. Un chirurgien très qualifié va traiter plus de cas difficiles que ses confrères, avec des risques de mortalités plus élevés. Il faut donc corréler ces taux à ceux des risques, si l’on veut obtenir un chiffre moyen cohérent. »
Le chef du Département d’Anesthésie – Réanimation Chirurgicale à l’Hôpital Bicêtre, à Paris : « ce sujet est très controversé, avec à la fois des arguments pour et des arguments contre. En effet, publier des chiffres bruts, sans les replacer dans leur contexte, peut avoir des effets négatifs, même si je pense que les Français ont l’intelligence nécessaire pour faire la part des choses. Mais la publication de ces taux peut aussi permettre d’aiguiller les équipes en vue d’améliorer la démarche globale, en interne. »
medecin des hopitaux, dans un service de cancerologie lourde, je teins a accueillir tous les patients en fin de vie qui le souhaitent, meme s’ils ont ete traites en chu, à 80 km. Si une telle loi passe demain, c’est tres simple : ils mourront chez eux delaisses… mais pas dans mon service.
j’en serai horrifie et je n’aurai pas d’autre choix : si les statistiques montrent une surmortalité, il n’y aura plus un patient, alors que nous faisons aujourd’hui un travail de grande qualite… A mediter…