Plus belle prise de l’ouverture sarkozienne, Martin Hirsch, l’ancien patron d’Emmaüs, se prend les pieds dans le tapis du Revenu de solidarité active. Et pas grand monde n’a envie de le relever. Que c’est beau un gouvernement uni.
Le débat sur le Revenu de solidarité active (RSA) est en train de tourner à la confusion totale. Le coût annoncé de 1,5 milliards d’euros est présenté par certains comme le coût total du dispositif alors que Martin Hirsch, le Haut commissaire aux solidarités actives, maintient que ce montant vient en complément de redéploiements qui permettront de consacrer au total 3 milliards à cette nouvelle prestation.
Dans cette affaire, pour Sarkozy, il s’agit d’abord, de façon très banalement politicienne, de sauver ce qui reste de l’ouverture. Le départ lamentable de Jean-Marie Bockel du ministère de la Coopération ainsi que les sarcasmes de plus en plus nombreux qui entourent l’action de Bernard Kouchner l’obligent à chercher dans le projet de Martin Hirsch le moyen de confirmer que l’ouverture était pour lui non pas un gadget visant à embarrasser la gauche, mais une authentique volonté de dépasser les clivages partisans.
Si l’Elysée soutient Martin Hirsch, on y a découvert au passage que celui-ci n’était pas un personnage facile à vivre. Sa détermination favorise évidemment son action, mais force est de constater que le souvenir qu’il a laissé dans les milieux associatifs et chez les spécialistes de la grande pauvreté n’est pas aussi positif que ce qui était cru au départ. Il s’est fait beaucoup d’ennemis.
Parmi les derniers en date, on peut inscrire François Fillon. Celui-ci évite de le critiquer de peur d’ouvrir un nouveau front avec l’Elysée mais il n’hésite pas à dire que le RSA est mal conçu. A Matignon, on se demande ce qu’il apporte par rapport à la prime pour l’emploi (PPE), dont le principe est d’augmenter le revenu des gens qui travaillent et donc de creuser la différence entre la situation de ceux qui vivent de la solidarité nationale et de ceux qui ont retrouvé un emploi. N’aurait-il pas été plus simple d’aménager cette PPE, de réfléchir aux revalorisations du SMIC et de rester ferme sur les conditions de versement des allocations chômage ? En fait, pour beaucoup d’experts, le RSA est né d’une certaine méconnaissance par M Hirsch des différents revenus de substitution existants et de la volonté abondamment affichée par les deux principaux candidats de la présidentielle de l’an dernier de montrer leur attachement à la réduction de la pauvreté.
L’élément le plus positif de l’opération devrait être de permettre de corriger une aberration historique. La création du RSA va se traduire par la disparition des multiples minima sociaux officiellement applicables (neuf à l’heure actuelle) et l’apparition d’une seule référence. L’élément le plus négatif est qu’en cette période de disette budgétaire, le RSA va de fait se limiter à un réaménagement de la PPE qui se fera au détriment des salariés. La PPE est versée jusqu’à 1,4 SMIC et elle concerne 8 millions de salariés : cela en dit long sur la réalité des salaires en France. Et l’on s’apprête à amputer le revenu des salariés qui gagnent autour de 1,4 SMIC de façon à dégager 1,5 milliards d’euros d’économie… !! Cela représente au total une réduction de près de 40% de l’enveloppe globale de la PPE.
Heureusement, il est loin le temps où pour financer le RMI, Rocard avait créé l’ISF. On ne va tout de même pas se mettre à impliquer les riches dans cette sombre histoire de RSA et de PPE. Pour eux, c’est RAS et le bouclier fiscal maintenu.
Je me permets de vous renvoyer à une note de mon blog sur le sujet :
Hirsch justifie le retrait de la PPE à certains qu’y en bénéficient par le fait qu’"ils ne le savent même pas." Hirsch et le gouvernements savent tout sur nous, y compris ce que l’on ne sait pas nous mêmes. Balaise.
Après les chômeurs paresseux, les assistés inconscients…
Si j’étais cynique, je dirais que les pouvoirs publics paient une partie de la rémunération de travailleurs pauvres que leurs entreprises ne veulent pas payer correctement (sans doute à cause de la mondialisation bien sûr)…
Loin de moi l’idée de les laisser à leur sort de travailleur pauvre mais le but du jeu n’est il pas de les sortir de ces trappes à pauvreté ? au lieu de les aider à améliorer leur capital humain, on pérennise un statut éminemment peu enviable en faisant payer aux contribuables la "pingrerie" des entreprises…
un pays comme la France a selon les différentes études 17% de smicards : ça laisse quand même songeur, non ?