« Bakchich » continue ses sagas de l’été, avec cette semaine, un plongeon dans le merveilleux univers du ballon rond. Où, comme José Anigo, désormais directeur sportif de l’OM, on peut être licencié, bien indemnisé, mais sans perdre son emploi. Et l’on osera encore dire que le foot est un univers impitoyable.
Papier paru le 6 mars 2007
José Anigo, le directeur sportif de l’OM, aime son club. Qui le lui rend bien. Pécuniairement parlant aussi, par exemple lors de son court passage à la tête de l’équipe première en 2001.
En dépit de l’histoire d’amour aléatoire qui l’unit à ses supporters depuis que le club les a amenés en 1993 sur le toit de l’Europe en remportant la ligue des champions, l’Olympique de Marseille sait se montrer fort généreux envers les rares qui lui sont fidèles. Ainsi en est-il du directeur sportif José Anigo, alias « le gardien du temple » selon le site officiel du club, un membre influent et haut en couleur de l’OM. Natif de Marseille, clamant chaque fois qu’il le peut son amour irraisonné pour le club, décriant à l’occasion son mépris pour la Capitale, « José » fait aussi partie de la glorieuse histoire du Stade Vélodrome.
C’était au début des années 80. Marseille se trouve au bord du gouffre footballistique, à la lisière entre la division 2 et la division 3. Une petite bande de jeunes sauve le club sur le terrain (1980/1981). Avant, lors de la saison 84/85, de le ramener en première division, la saison précédant l’arrivée de Bernard Tapie à la tête du club. Une bien jolie histoire pour ce latéral rugueux qui a pris sa première licence à Marseille à 14 ans. D’autant que son idylle avec le club va se poursuivre, quand survient la mythique saison 2001-2002. Retour de Tapie au club, plus de 50 transferts dans l’année et une valse d’entraîneurs : 4 en une saison. Dont l’ami José.
Le garçon signe le 1er juillet 2001 un contrat à durée indéterminé comme conseiller du manager sportif, en l’occurrence, Nanar Tapie. Un emploi « non cadre », solidement rémunéré tout de même « 24 391 euros par mois » et conclu sans période d’essai. À l’époque, l’entraîneur n’est autre que le vétéran croate Tomislav Ivic et Anigo devient son adjoint.
Un brin gêné par les multiples intrusions de Tapie dans la gestion de son équipe, Ivic claque la porte fin juillet, avant même le début du championnat. Grosjean comme devant, la direction du club cherche une roue de secours. Voilà comment un José tout content devient le coach de l’équipe de son cœur. Mais le cœur a ses raisons que la raison ignore, et malgré tout son amour, l’équipe ne décolle pas. Deux matchs nuls, deux défaites et une engueulade avec Tapie plus loin, José est prié de s’en aller dès fin août. Oh, avec la manière. Pour « motif personnel ». En l’occurrence avoir « par voie de presse et devant témoin, dénigré sa politique (NDLR : de Tapie) en matière de tactique et de transfert », décrit la lettre de licenciement. Pour une fois qu’Anigo s’intéressait à la tactique, c’est dur…
Heureusement, entre gens de si bonne composition, un « protocole transactionnel » intervient, en date du 31 août 2001. L’OM, qui assure être dans son droit, accepte toutefois de verser une petite obole au licencié pour ses deux mois intenses de boulot, pour zéro victoire : un chèque de 274 409 euros « en réparation du préjudice moral et professionnel ». Indemnité « nette de CSG et de CRDS ».
De quoi effectivement panser les plaies de la rupture entre Anigo et l’amour de sa vie. Mais il est sans doute des choses que l’argent ne peut remplacer. Chèque en poche, Anigo s’en est allé. Pas bien loin. Entraîneur de l’équipe une il était, entraîneur de la réserve et du centre de formation, il devient. Avec un certain succès puisque cette année-là, l’équipe 2 de l’OM remporte le championnat de France amateur… Et depuis, a gravi les échelons. Entraîneur pendant 10 mois de l’OM en 2004, il en est devenu le directeur sportif après deux défaites contre « l’ennemi » hérité des années Tapie, le PSG. La morale est sauve et l’amour préservé…
Relire les précédents épisodes de notre saga foot de l’été :