Etrange coïncidence, ce sont les régimes les plus autoritaires qui définissent les droits de l’homme comme une importation culturelle occidentale…
Dimanche dernier, lors de l’émission Ripostes de Serge Moati sur France 5, j’ai suivi avec une grande attention et beaucoup de respect l’intervention de l’ambassadeur Stéphane Hessel, ancien résistant et défenseur infatigable des droits de l’Homme. Si j’ai particulièrement apprécié son propos sur les agissements d’Israël et l’urgence de la création d’un Etat palestinien, c’est sur l’un des autres thèmes abordés par celui qui fut déporté au camp de Buchenwald que je souhaite néanmoins revenir.
Il s’agit des droits de l’homme ou plus exactement des droits de la personne humaine, cette dernière expression me paraissant bien plus pertinente. Qu’a dit Hessel sur ce sujet ? En quelques phrases bien senties, il a balayé la thèse selon laquelle ces droits ne seraient applicables qu’aux pays et peuples occidentaux. En un mot, et alors qu’on célèbre le soixantième anniversaire de la déclaration des droits de l’Homme du 14 décembre 1948, dont il a contribué à la rédaction, le diplomate a insisté sur son caractère éminemment universel.
Il est nécessaire de comprendre à quel point ce genre d’affirmation est important et combien est utile le fait de la réitérer sans compter. Tous les pays arabes, ou plutôt tous les régimes arabes, sans aucune exception, remettent en cause cette universalité. Leur discours est bien connu : les droits de la personne humaine seraient une invention occidentale — (néo-coloniale à en croire certains !) - qui ne tiendrait pas compte des spécificités d’autres cultures à commencer par l’arabo-islamique sans oublier celles d’Asie. Tendez le micro à un ministre arabe de l’Intérieur et c’est ce qu’il vous dira sans ciller pour justifier le flicage de sa société. Prêtez l’oreille aux débats qui ont lieu au sein de l’ONU et c’est ce discours que vous capterez de la part des représentants de tel ou tel monarque pétrolier ou de tel ou tel président candidat à un règne sans fin. Prompts à réclamer aux Occidentaux plus de justice et d’équité dans les rapports internationaux, nos dirigeants sont subitement plus prudents quand, de l’extérieur, leurs parviennent des appels et des injonctions à mieux respecter leurs peuples et à leur offrir dignité et libertés.
Dans ce domaine, ils sont passés maîtres dans la relativisation culturelle, affirmant sans honte que l’Islam nous impose une vision différente de ce qui existe en Occident en matière des droits de la personne humaine. Ainsi, à suivre ce raisonnement, on pourrait conclure que l’Islam ou la culture arabe autoriseraient la persécution des opposants et le harcèlement de leurs familles ou bien encore l’interdiction des syndicats indépendants. Ce serait aussi l’excuse qui justifierait que le droit à la libre expression et le droit à la propriété ne soient nulle part garantis.
D’autres font de l’impératif de développement, l’argument suprême pour défendre les manquements aux droits de l’Homme, manquements qualifiés alors de « provisoires » en attendant des jours meilleurs. En clair, du pain d’abord, la liberté plus tard (tout le monde se souvient du voyage de Jacques Chirac en Tunisie où il avait déclaré que le premier des droits de l’Homme était celui de pouvoir manger…). Certes, nous savons qu’on peut effectivement avoir du pain sans libertés mais nous savons aussi que l’absence de libertés finit toujours par déboucher sur un manque de pain.
On m’explique souvent que l’économie doit primer sur la politique et que c’est elle qui finit tôt ou tard par amener les libertés. Je ne crois pas à cette thèse. L’économie, aussi performante soit-elle, finit toujours par être pervertie par le manque de libertés. Et c’est encore plus vrai pour des pays à forte démographie où il est impossible d’imposer un contrôle strict et permanent à toute la population sur une longue période de temps. Tout cela pour dire, qu’en matière des droits de l’Homme, ce sont les peuples qu’il faut écouter et jamais leurs dirigeants. C’est une règle qui paraît simple, basique, mais qui, hélas, n’en demeure pas moins quotidiennement ignorée, pour ne pas dire bafouée.
A ce sujet, le rôle des intellectuels arabes est déterminant. Bien entendu, il est facile, trop facile, pour qui vit à l’abri, de leur enjoindre de défendre en toutes circonstances les droits de la personne humaine. N’importe qui de censé pourra comprendre à quel point leur situation est malaisée et combien heurter de front un régime en place peut s’avérer dangereux pour eux. Mais, à l’inverse, on peut au moins leur demander de refuser de prêter leur voix au discours relativiste de leurs gouvernants dès lors qu’il s’agit des droits de l’Homme. Cessons d’être sur nos gardes quand des organisations non-gouvernementales internationales déclenchent une campagne pour exiger plus de libertés dans un pays « frère ». Convenons simplement qu’elles ont raison et laissons à nos chers pouvoirs le soin de hurler à l’agression néocoloniale.
A ce sujet, je ne peux pas terminer cette chronique sans dire ma solidarité, fut-elle modeste, avec l’Iranienne Chirine Ebadi. Voilà une femme qui mérite qu’on la soutienne parce qu’elle se bat chez-elle, afin que son peuple soit plus libre et plus digne. Il y a quelques jours, son ONG, le Centre de défense des droits de l’Homme (CDDEH) a été fermée par la police. Il n’y a pas de quoi être surpris puisque la semaine dernière, l’ONU a délivré une critique en règle de la situation des droits de la personne humaine en Iran, en se basant justement sur les rapports du CDDEH. Face à cette situation, des intellectuels musulmans pourraient être tentés de critiquer celle qui a obtenu le Prix Nobel de la Paix en 2003, en insistant sur le fait que son action contribue à dénigrer son pays à l’étranger. Pour ma part, je la trouve bien courageuse et je ne peux que m’incliner devant l’exemple qu’elle nous incite à suivre.
Je suis d’accord, évidemment, avec l’intention de cet article et ce qu’il préconise. Mais je nuancerais l’espoir d’une puissance "spontanée" accordée à la notion d’universalité, à laquelle seuls résistent des méchants, en ramenant à une réflexion historique : l’évolution vers celle-ci, au XVIIIe siècle, a été le résultat d’une critique difficile de l’universalité théologique (incluse, par exemple, dans la notion même d’"église catholique") : l’homme n’était universel qu’en Dieu, avant qu’il le soit au nom de la Raison…
C’est la raison pour laquelle aujourd’hui toutes les religions, que la Déclaration des Droits de l’Homme reconnait comme croyances devant êtrelibrement pratiquée, s’opposent nécessairement aux droits de l’Homme dès qu’elles prétendent faire la Loi : il ne peut pas y avoir d’universalité lorsque le monde se divise en croyants et "infidèles", et même l’oecuménisme exclut les athées : les "infidèles", ce sont ceux que l’on peut bombarder sans remords, comme le vérifie le comportement des deux camps de chaque côté de la frontière de Gaza, et peut-être aussi la très timide réaction des Américains, peuple bigot, face à la honte de Guantanamo, où l’on maltraite des "infidèles"….
En outre, la résistance à l’universalité des Droits de l’Homme n’a pas une forme "universelle" : il faut distinguer.
Dans le cas de la résistance des pays islamiques, il est clair que l’adoption des Droits de l’Homme et de leur universalité suppose une totale conversion à la laïcité de l’Etat, de la même manière que ce fut une lente et difficile conversion pour les cultures occidentales chrétiennes, dont certaines, en Pologne ou au Vatican - et peut-être à l’Elysée !-, dénoncent encore le satanisme des Lumières. Le combat pour les Droits de l’Homme commence donc par l’effort de dénoncer la chariah avec autant de vigueur que Voltaire dénonça l’Inquisition, et de renoncer à confondre liberté de croyance et tolérance à l’égard de l’absolutisme (que ces soit celui du Hamas, celui des Emirats et de l’arabie saoudite, ou celui qui prétend s’installer dans une vingtaine d’états africains islamisés). Après tout, si l’occident a pu se convertir aux Droits de l’Homme, c’est parce que le christianisme a renoncé à faire la loi : il faut que l’islam s’y résolve, et il n’est pas exagéré de le lui demander fermement, qu’il s’agisse de l’obligation du vole, de la justice, des délits liés aux interdits alimentaires et autres prescriptions incompatibles avec les Droits de l’Homme !Car il est vain de croire que les Droits de l’Homme seront acceptés dans leur véritable extension sans ce préalable.
Les cultures d’Asie ont développé, au sein du confucianisme et, pire encore, du shintoïsme, une forte identité ethnique (Barthes relevait, malgré son admiration pour le Japon, qu’aucune culture n’était plus raciste…)et une vision "pyramidale" des sociétés qui est encore présente dans les discours de Mao sur les "masses" et le "Timonier" (on se croirait chez Platon !). On a laissé le discours "pragmatico-mercantile" s’armer de ces figures culturelles, et il sera difficile de faire changer les choses…
Reste l’Afrique, désastre dont on parle trop peu : la guerre au Congo, a fait en dix ans plus de morts que la seconde guerre mondiale, si l’on voulait compter les génocides ethniques, on n’aurait pas assez de doigts aux mains, et les dictatures prolifèrent. Là, c’est le refus de stigmatiser l’enlisement dans des régressions tribales qui est en jeu. On ne peut être "tribalement" universaliste, et la défense des Droits de l’Homme doit nécessairement dénoncer l’"ethnicisme" qui justifie tant de massacres et de dictatures dans ce continent. Cela passe, là encore, évidemment, par une "conversion", dont le seul moyen est une aide à l’alphabétisation et même une exigence internationale stricte en ce domaine : tous les pays dans lesquels les droits de l’Homme ont été mis en pièces ont d’abord connu, par rapport aux années de la colonisation, une fantastique progression de l’illettrisme (voir le Zimbabwe, ex-Rhodésie, la Mauritanie, le Nigéria…). Au même titre que l’aide alimentaire, l’aide à l’acquisition des savoirs est la condition d’une ouverture aux Droits de l’Homme, et il faut refuser la reconnaissance de tout régime n’assurant pas une éducation de masse réelle.
Car l’Homme, avec majuscule, est une notion savante, qui s’apprend dans les livres et à l’école.Ce n’est pas une idée spontanée, c’est le produit d’un effort et d’une réflexion rationnelle. L’Homme, cela s’apprend. Ne l’oublions jamais…
en résumant ce post, et au contraire de ce qu’il tente d’affirmer, la colonisation europeenne hier du monde arabe tout entier, et aujourd’hui encore, de l’irak et de l’afghanistan par les usa ne permet pas aux droits de l’homme de s’epanouir…
vous m’en direz tant !
gardons nous des leçons des leçons d’universilaté alors que l’on a eu un empire colonial, colonial…
je croyais les idees revisionnistes combattues en france…
Rappelons à Chapichapo (révisionniste à sa façon !) que des états musulmans, et pas seulement l’occident, ont envahi et occupé "colonialement" non seulement l’Afrique du nord, l’Afrique subsaharienne jusqu’au Niger, tout le sud de l’Espagne jusqu’en 14(53 et que, deux siècles plus tard, les sultans campaient dans toute l’Europe balkanique, en Grèce et jusqu’aux portes de Vienne…
Il faut penser aussi à tous les dégâts que ce colonialisme économique et culturel musulman à causé aux populations concernées, pendant six à huit siècles : l’histoire est une succession de vagues de pouvoir, et, à l’heure actuelle, un des malheurs du monde musulman est d’être l’objet d’une OPA politique de la part de fanatiques religieux complètement réactionnaires qui se foutent absolument du droit des personnes, et sont capables de faire massacrer leurs propres correligionnaires et concitoyens aussi bien en Afghanistan qu’en Palestine. Comme le dit l’article, si les intellectuels musulmans ne sont pas capables de réagir à cette monstruosité, alors, que faire ?
La paix en occident ne s’est pas faite dans les Eglises (qui ont béni ou toléré Hitler, Franco et cie !), elle ne se fera pas, en Palestine et en Orient, dans les mosquées où l’on prêche le djihad.
on devra un jour m’expliquer comment arriver à concilier république et colonies…
droits de l’homme et code de l’indegenat, statut musulman, decret de cremieux et fin du travail forcé en AOF decreté en 1945…
je vais me repeter, gardons nous de donner des lecons que nous ne nous sommes jamais appliquée à nous memes…
un peu de decence ne nous fera aucun mal
vraiment il n’en loupe pas une celui ci…
un laius sur les droits de l’homme alors que ghaza est sous un delige de feu de la-seule-democratie-du-moyen-orient
le tout avec l’accord de toutes les "democraties" "respectables" du vaste monde…
ghetto de varsovie
ghetto de ghaza
le reste c’est du bla bla de moins en moins interessant à lire