Le Plan B, bimestriel critique des médias, publie sur leur site Internet les attaques des « Fatals Flatteurs », gang d’internautes qui pratique… la « flagornerie extrême ». A coup de commentaires, ils s’en prennent aux « grands » journalistes et intellectuels, régulièrement invités à débattre en ligne, sur le site du NouvelObs.com. En mai, ils se sont attaqués à Gilles Schneider, patron de l’information à Radio France. « Bakchich » a choisi les meilleurs passages.
Le site du Nouvel Observateur piraté par les Fatals Flatteurs
Régulièrement, le site du Nouvel Observateur invite des journalistes et des intellectuels à « débattre » avec des internautes au cours de « forums ». Le principe est simple : à partir d’un ordinateur, n’importe qui peut envoyer des questions à l’invité dont la date et l’heure de présence en direct sur le site sont indiquées à l’avance.
C’est terriblement ennuyeux. Mais, depuis quelques semaines, les membres d’une brigade sardone baptisée « Les Fatals Flatteurs » ont insufflé un peu de vie dans cet hospice électronique. Leur tactique ? Poser les questions les plus bêtes et les plus serviles possible. Le résultat est prodigieux : nul ne s’est aperçu de rien. Est-ce que personne ne suit ces forums, ou paraît-il naturel aux invités du Nouvel Observateur de lécher leurs hôtes ? Sans exclure ces hypothèses, Le Plan B avance une troisième explication : dans un milieu médiatico-intellectuel caractérisé par son infatuation, rares sont ceux qui résistent à la flatterie. Dites à un auteur que vous adorez ses livres, à un journaliste que ses articles vous ont ouvert les yeux, vous mènerez l’un et l’autre par le bout du nez. Faites-en des kilos, faites-en des tonnes : les ânes convaincus de leur génie n’imaginent pas qu’on puisse rire à leurs dépens.
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Quand Gilles Schneider, ancien employé du marchand d’armes Lagardère, ancien employé du milliardaire Berlusconi, ancien employé de l’ancien collaborateur Robert Hersant, actuellement secrétaire général à l´information de Radio France, se fait fatal-flatter le 06 mai 2008.
Question d’Internaute : Bonjour Monsieur Schneider, Vous avez eu la chance de présenter le JT de la Cinq avec Béatrice Schonberg (qui est depuis devenue l´épouse de notre bien-aimé ministre Borloo). Quel effet cela vous a-t-il fait de travailler avec une grande professionnelle ? Et est-ce grâce à mai 68 que les compétences des femmes ont été reconnues ?
Réponse : Je pense qu´on ne parle pas assez -comme quoi il y a encore du travail à faire- de la prise de conscience de la condition de la femme en mai 68. Je me souviens dans un local de militants des femmes refusant de faire le ménage que leur proposaient de réaliser leurs camarades "penseurs"… Ca c´est de l´anecdote. Plus sérieusement, en 68, sous l´impulsion de femmes comme Antoinette Fouque et n´oublions pas Simone de Beauvoir, puis Gisèle Halimi et bien d´autres, le début de la longue marche vers l´égalité des femmes. Cette égalité s´est manifestée heureusement à la Cinq où j´ai eu la joie de travailler avec Béatrice Schönberg, grande professionnelle que j´avais connue quelques années plus tôt à Europe-1. Quelle que soit sa situation personnelle, pour moi Béatrice est et reste une grande journaliste.
Internaute : Bonjour Gilles ! Vous faites parti de notre mémoire collective puisque mon vieil oncle Julien a encore sur sa 4L l´autocollant d´Europe 1 avec votre photo (et la coquille Shell !). Savez-vous où on peut trouver l´autocollant avec Pierre Bellemare ?
Réponse : Je ne sais pas s´il en reste, mais tentez le coup en écrivant à Europe-1, 26 bis rue François Ier, 75008 Paris. Merci pour ce témoignage et mes amitiés à Julien.
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Internaute : Bonjour, vous m´avez faite vibrer quand vous présentiez le Paris Dakar sur la 5. Ce goût de l´aventure vous vient-il de Mai 1968 ?
Réponse : Non, ce goût de l´aventure c´est celui du grand reportage. La Cinq a inventé les directs dans le désert. J´ai eu autant de passion à couvrir le Dakar que Mai 68, l´intervention des troupes soviétiques à Prague, la guerre du Kipour, un Tour de France, une Coupe du monde de foot, cinq Jeux Olympiques, plusieurs campagnes présidentielles, et quelques faits-divers ou autres guerres. J´adore la polyvalence, c´est peut-être ça l´aventure.
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Internaute : Bonjour, Avez-vous eu le sentiment en 68 de participer à la réinvention du journalisme ?
Réponse : Non, au prolongement de la nouvelle technique journalistique radio : le direct, les faits, le commentaire, et au récepteur : le transistor qui n´avait que dix ans, l´âge d´internet aujourd´hui. Je vous rappelle qu´Europe 1 avait inventé les flashs spéciaux pendant la guerre d´Algérie : les barricades d´Alger, la fusillade de la rue d´Isly, avec mes "grands frères" : Julien Besançon, René Duval etc. Et lors du putsch d´Alger, si le contingent n´a pas suivi les officiers félons, c´est qu´il a pu entendre le discours du Général de Gaulle sur des transistors branchés sur Europe 1 ou RTL, puisque Radio Alger était occupée par les putschistes.
Internaute : Bonjour, Cohn-Bendit semble mélancolique dans Forget 68 le stimulant livre d´entretiens avec le trop rare Stéphane Paoli. Avez-vous une explication à cela ?
Réponse : On a peut-être toujours un ton mélancolique mêlé d´humour lorsqu´on pense à sa jeunesse. Pour ma part, j´avais 25 ans en 68 et je vous réponds peut-être à tous dans ce tchat avec une certaine mélancolie.
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Internaute : Heureux à Radio France ?
Réponse : Oui très heureux. C´est un monde passionnant de journalistes, de producteurs, de techniciens, de musiciens, exigeants et qui ont un grand sens du service du public. J´en profite et ça n´est pas de la flagornerie, d´autant que je serai bientôt à la retraite, pour donner un coup de chapeau au président Jean-Paul Cluzel qui un vrai homme de radio.
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Internaute : Bonjour. Beaucoup de grincheux critiquent la presse d´aujourd´hui (elle serait connivente avec les pouvoirs, les journalistes seraient dépendants,…). D´où vient cette haine du journalisme ?
Réponse : Les lecteurs, auditeurs, téléspectateurs et internautes ont parfois l’impression que les journalistes font partie de la classe dirigeante. Nous ne sommes pas parfaits, c´est vrai. Et puis, ce qui est vrai aussi, c´est que nombre de groupes de presse appartiennent à des groupes industriels et qu´on peut soupçonner les médias de subir des pressions économiques. Pour cette raison, les journalistes essaient d´être vigilants et dans bon nombre de nos institutions il y a aujourd´hui des médiateurs qui veillent au respect de l’éthique et qui sont aussi bien à l´écoute du public que de ceux qui informent. Enfin, le journaliste est hélas souvent porteur de mauvaises nouvelles et on a horreur des miroirs qui vous renvoient des rides ou des boutons noirs.
Internaute : Bonjour, on sent chez vous comme un plaisir à répondre aux questions des internautes.Reviendrez-vous sur le site du Nouvel Obs ?
Réponse : Avec plaisir. C´est tellement rare de pouvoir partager, dialoguer avec ceux qui nous font l´honneur de nous écouter.
© Le Plan B
Retrouver sur le site Internet du Plan B, l’ensemble des commentaires des Fatals Flatteurs à Gilles Schneider et autres convives.
Exellent :) j’adore cette question :
Internaute : Bonjour Gilles ! Vous faites parti de notre mémoire collective puisque mon vieil oncle Julien a encore sur sa 4L l´autocollant d´Europe 1 avec votre photo (et la coquille Shell !). Savez-vous où on peut trouver l´autocollant avec Pierre Bellemare ?
Cher lecteur,
grand et longue vie à l’obs.com, qui a été l’un des premiers à nous soutenir. Ce que critique le Plan B, dont nous avons trouvé la démarche amusante, c’est la pédanterie de certains intellectuels bouffis d’orgueil, qui n’ont guère de recul sur eux -memes.
Sinon basse quiche c’est super bien trouvé !