Certains journalistes arpentent Bagdad, d’autres rechignent à quitter les beaux quartiers de Paris. Alors quand une société veut montrer à la presse en dehors du Triangle d’or des Champs-Élysées ses derniers produits « conso », elle affrète des navettes depuis le Crillon, le palace de la place de la Concorde. Pourtant il ne s’agissait que de se rendre à Belleville… Récit de l’envoyé spécial de « Bakchich ».
Dur métier vraiment que celui de journaliste. A Bagdad pour certains, hors de la zone verte. A Paris pour d’autres porteurs de la carte de presse, hors du triangle d’or de Paris. La société Canon, fabricant d’appareils photos, caméras, fax et tutti quanti, qui conviait le 10 juin dernier les professionnel(le)s des rubriques « conso » à découvrir ses « produits incontournables de l’été », a ainsi pris toute la mesure des contraintes du métier, et du choc culturel, voire des risques déraisonnables qu’elle leur demandait d’assumer au nom de l’information. L’invitation adressée par mail précisait donc que quatre navettes seraient successivement à leur disposition en un lieu de confiance à la géographie accommodante : l’hôtel de Crillon, place de la Concorde.
Quelle était la destination de l’aventureuse expédition proposée par la firme ? Un entrepôt perdu au sein d’un inaccessible parc d’exposition ? Le cœur d’une cité interdite du criminogène 9-3 ? Pas précisément. Un loft lumineux et design au fond d’une cour coquette, non loin de Belleville, dans le 11ème arrondissement, au cœur d’un Paris en boboïsation accélérée. Mais probablement un peu trop loin des rivages usuels de l’ouest parisien, ou, c’est selon, un peu trop près des rues populeuses qui bordent encore les stations de métro Couronnes ou Parmentier.
Sur place, la question est posée à une jeune et charmante attachée de presse. Mais pourquoi mettre en place un système de navettes pour un déplacement dans Paris intra muros ? Sourire gêné. « Ben, c’est plus pratique quand même ». Puis, du bout des lèvres : « si ce n’est pas dans l’ouest parisien certains journalistes ne viennent pas ». Illico, elle précise : « Il faut dire que dans le quartier où nous allons, il est difficile de se garer ». Le métro alors ? (L’invit’ indiquait bien que le 97 de la rue Jean-Pierre Timbaud est desservi par la ligne 2 du métropolitain et par le bus 96). « Non, ils ne prennent pas le métro non plus ». Effrayé(e)s par le calvaire vécu en son temps par Balladur peut-être ?
. La question, au fond, est : feriez-vous confiance à un(e) journaliste qui refuse de prendre le métro pour s’informer ?
Cher Arnaud, cher confrère,
oui, oui, je te le confirme, il existe plein de confrères qui ne prennent pas le métro… D’ailleurs, parmi eux, on peut même trouver quelques-un de ceux qui daubent régulièrement ( surtout en ce moment) sur les problèmes dans les transports en commun. D’autres signent des papiers sur la sécurité dans les rames où ils ne foutent jamais les pieds. Je me souviens des cris d’épouvante de certains quand, en 1987, je disais aller m’installer à St Denis ( dans le 9 cube, comme on dit en Seine-St-Denis). Beaucoup me demandaient : " Attends, St Denis ? Mais toi qui prend le métro, c’est la ligne 13. Mais c’est un coupe-gorge, t’es dingue !". J’ai vécu à St Denis 18 ans durant. Les deux seules fois où j’ai assisté ( et participé) à un incident sous terrain tardif, ce fut à chaque fois parce qu’un mec bourré montrait sa quéquette aux quelques dames présentes et que je les ai sortis du wagon…
Mais tu sais, ceux que tu décris se sont au moins déplacés. Car, on pourrait aussi parlé du grand nombre de reporters qui ne font plus de reportages… ou alors, par téléphone. Because, cela coûte cher. Nous qui allons encore sur le terrain sommes régulièrement stupéfaits du vide sidéral sur certains sujets… C’était la rubrique : " Qu’est-ce qu’il fait ton papa, journaliste. Et ta maman : rien non plus !"
Merci beaucoup de l’information. On peut tout de même saluer les journalistes de Bayard qui migrent à Montrouge.
En décembre, on m’apprenait sur le blog de David Genzel qu’un journaliste de Bakchich était sans arrêt au (très chic) café Flore de Saint-Germain des Pres. Faudrait savoir !
Jordan Pouille (mediapart).
Sacrebleu…Un journaliste de Bakchich au Flore !!Trahison ! !!
D’autant plus que j’ai failli m’étouffer en apprenant qu’il arrivait que l’équipe de rédaction de Bakchich se réunissait de temps en temps au "Deux Magots " , café bien branchouillard et soit disant temple du Paris "intello" qui se trouve place Saint Germain des Prés ! On fait pire comme bouge…Mais apparemment l’auteur de cet article n’a pas été mis au courant !
Peut on faire alors confiance à une rédaction journalistique qui vient tremper ses lèvres dans un Kahwa à au moins 3 euros la petite tasse … Voir plus ! 3 euros..Ça en fait des tickets de métro par personne !!Dis donc !!!!