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Service public : Poste Mortem

Au revoir / jeudi 18 décembre 2008 par Marius Tigrane, Joan Tilouine
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Sarkozy l’a annoncé, la Poste sera une société anonyme, ouverte uniquement aux capitaux publics. Les syndicats dénoncent une privatisation rampante. Au guichet, le service public est déjà enterré.

Papier déjà publié le 23 septembre

Ce mardi 23 septembre, les fédérations syndicales de la Poste se mettent en grève pour protester contre l’ouverture du capital prônée par leur patron, Jean-Claude Bailly. Ce dernier martèle dans la presse qu’il a besoin de trois milliards d’euros pour renflouer les caisses de l’une des dernières entreprises postales publiques d’Europe, et faire face à la concurrence étrangère. Les caisses de La Poste sont vides, tout comme celles de son principal actionnaire, l’Etat. Du coup, le Patron de la Poste ne voit comme issue que la privatisation d’une partie de son capital. Un préambule que beaucoup de salariés craignent de voir déboucher sur une privatisation pure et simple. Un scénario qui déplait à une majorité de français. Selon un sondage IFOP, paru ce dimanche, 56% des sondés se déclarent opposés à l’ouverture du capital de La Poste.

Mais sur le terrain, la privatisation semble déjà bien engagée et les méthodes employées aux guichets sont bien souvent borderline. Une véritable stratégie de « forcing commercial » est mise en place aux guichets, quitte à traiter l’usager comme un simple « client ». Une mutation considérable qui risque bien de s’aggraver. Voyez plutôt.

Les ordres viennent « d’en haut » et dans ce système de responsabilité en cascade, il serait ingrat de blâmer les guichetiers. Contraints d’obéir à leurs supérieurs, nombre d’entre eux vous proposent désormais systématiquement les produits les plus chers même s’il faut « mentir par omission ».

Dans l’esprit des cadres, il faut remplir, sans barguigner, les paniers virtuels de la clientèle avec des « lettres prêt à poster », des Chronopost et autres colis en tout genre, des packs « Ma Nouvelle adresse », ou encore des recharges téléphoniques pour tous les opérateurs présents sur le marché…

Chaque bureau de Poste compte désormais son espace « Boutique », véritable échoppe où l’on trouve un peu de tout : les produits cités précédemment mais aussi des sacs estampillés « Bio », des sacoches de facteur et même des objets pour décorer son chez-soi. « Développer l’espace commercial est désormais la priorité de la Poste, au détriment du service à la personne », estime Philippe Fouillon, délégué Sud PTT et ancien guichetier. « Il y a quelques jours, j’ai visité une Poste qui se trouvait en sous-effectif suite à des arrêts maladies d’une partie du personnel. La direction a préféré fermer les guichets dits « toutes opérations » pour privilégier l’espace commercial  », s’indigne le syndicaliste.

Un changement de cap qui a de quoi rendre timbrés les usagers, désormais assimilés à de vulgaires consommateurs à qui il faut refourguer sans vergogne un maximum de produits lors de leurs passages aux guichets. Mais bien entendu, «  la Poste vous garantit la confiance »…

Quant aux salariés, ils ont plutôt intérêt à ne pas broncher. « Ceux qui jouent le jeu de la Poste gagnent évidemment la paix. Ils évitent les menaces et les harcèlements qui saccagent les conditions de travail des employés  », lâche Jean-Louis Frisulli, secrétaire fédéral de Sud PTT. Des menaces ? Christian, « guichetier brigadier » dans le département de Seine-Saint-Denis ne les subit pas car, en tant que remplaçant, il change toutes les semaines de Poste et dit « passer outre ». Toutefois, il observe attentivement le changement de ton des cadres. «  Les menaces sont variées. Ne serait-ce que de vous faire convoquer par la direction ou encore de vous menacer de mutation dans une autre région. De même, ils peuvent bloquer toute augmentation », explique ce vétéran des PTT.

Selon les témoignages recueillis par Bakchich, la direction accentue la pression sur les guichetiers pour qu’ils « fassent du chiffre » et a tendance à dénigrer, parfois avec virulence, les récalcitrants. Chaque guichetier doit rendre des comptes sur l’état de ses ventes. Les courbes sont affichées avec ostentation dans la salle du personnel histoire de mettre en compétition les employés et d’exciter leur appétit de vente. « Nous refusons cette logique de business qui est incompatible avec la mission de service public de la Poste  », déplore sans surprise M.Frisulli. Il est bien loin le temps béni du service public.

Lire ou relire dans Bakchich :

La Poste ferme des bureaux dans les petites bourgades et fait payer ses opérations de plus en plus cher. Pourtant elle est riche, La Poste, et ne cesse de s’enrichir. Elle fait même aujourd’hui aussi bien que sa grande rivale allemande, la Deutsche (…)

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12 MESSAGES
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Forum

  • Service public : Poste Mortem
    le samedi 20 décembre 2008 à 20:21, Jean-Claude Bakounine a dit :
    La poste est en train de se transformer en supermarché. Maintenant sur les guichets, des grands cartons recouverts de logos publicitaires. Partout, des écrans plasma diffusant des spots. Ah ! monde merveilleux du libéralisme. Les personnels sont compressés, les usagers manipulés et détroussés, bref à qui tout ça profite ? Toujours à la même clique.
  • Service public : Poste Mortem
    le vendredi 19 décembre 2008 à 14:06, laurent a dit :

    Faisons le jeu des devinettes.

    Combien la Poste fabrique-t-elle de lettres "pret à poster" ? réponse quelques centaines de millions par an.

    Question suivante : combien la Poste vend-elle de lettres "pret à poster" ? Réponse : beaucoup moins que sa production… le surplus, soit quelques millions d’enveloppes finit à la poubelle tous les ans.

    Cette incohérence reflete la gestion actuelle de La Poste : volonté de "faire du chiffre" de gonlfler le chiffre d’affaires sans tenir compte de la rentabilité économique ni du service au client.

    des dizaines d’exemples pourraient être donnés sur une gestion totalement incohérente.

    Le départ annoncé de son plus haut dirigeant va-t-il signifier une évolution de la gestion ?

  • Service public : Poste Mortem
    le vendredi 19 décembre 2008 à 11:51

    Si seulement cela pouvait servir à la fin d’un mythe opposant public/privé (fainéant/fayot).

    L’attaque du service public n’est pas motivée uniquement par l’envie de récupérer un marché public (pas toujours très rentable) mais aussi par l’envie de casser cette partie du salariat qui pour diverses raisons était plus facilement mobilisable. Les avancées gagnées par les travailleurs du public profitaient à l’ensemble du salariat (ne serait-ce que pas le simple jeu du marché).

    C’est cela que nous sommes en train de perdre mais peut-être allons gagner en cohésion : Tous ensemble…

  • Service public : Poste Mortem
    le vendredi 19 décembre 2008 à 08:05
    2011:ouverture totale du courrier à la concurrence. Quel que soit le statut de La Poste à ce moment-là, elle risque fort d’avoir du mal. Les activités rentables servent à financer les activités non rentables. Les concurrents prendront les premières. Ceux qui veulent que La Poste continue à assurer les services non rentables (campagnes, acheminement de la presse,…) , devront accepter de payer ces derniers par leurs impôts si rien d’autre n’est fait. Ce sera une nouveauté car, actuellement, La Poste se finance elle-même.
  • Service public : Poste Mortem
    le jeudi 18 décembre 2008 à 21:09, Gustav74 a dit :
    Heureusement, à part un ou deux esprits embués, la majorité est contre cette privatisation. Preuve que les Français sont moins naïfs ou obstinés qu’on eut pu le craindre. Vendre le service public, ce n’est ni plus ni moins que vendre les meubles payés par le peuple à quelques amis du pouvoir. Et pour quels résultats ? On voit les banques dénationalisées, où elles nous ont mené, France télécom aux services hors de prix et injoignable, et ce n’est qu’un début, voir l’exemple du rail anglais, et combien d’autres services publics complètement massacrés. Les peuples concernés n’ont plus les services, mais leurs impôts n’ont pas baissé pour autant, voire même augmentés par le biais des cotisations chômage. Eh oui, les emplois supprimés font des chômeurs que l’on paie… Pour être pour ces privatisations, il faut soit être du côté des privilégiés acoquinés aux puissants détourneurs de biens publics, soit être attardé mental. Avec ces derniers, je ne perdrai pas une seconde à polémiquer, ils ne peuvent pas comprendre faute de neurones.
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