Personne n’y a prêté attention mais dans son discours au dîner du CRIF, le Président de la République a bel et bien annoncé qu’il entendait introduire un enseignement religieux à l’école publique. « Bakchich » décrypte le propos présidentiel, qui évoque des rencontres avec des « religieux » engagés, et livre les pièces du dossier.
C’est l’autre bombe du discours prononcé par Nicolas Sarkozy au dîner annuel du CRIF, le 13 février. Une bombe encore plus lourde de conséquences que la proposition de confier aux élèves de CM2 la mémoire des 11 000 enfants français juifs exterminés par les nazis.
En violation du principe de séparation de l’’Eglise et de l’Etat, le Président de la République a tout simplement annoncé son intention d’introduire à l’école publique un enseignement religieux. Une intention formulée en ces termes : « Nos enfants ont aussi le droit de rencontrer, à un moment de leur formation intellectuelle et humaine, des religieux engagés qui les ouvrent. »
« Formation intellectuelle et humaine ». Que faut-il entendre par là ? Que tous les enfants de France ont le droit de se rendre, en dehors de leurs heures de cours – sauf dans le cas d’un établissement confessionnel, bien sûr - dans une église, une synagogue ou une mosquée ? Mais ce droit, acquis, n’est nullement remis en cause par qui que ce soit. Aucune menace ne plane.
S’agit-il des aumôneries installées à proximité des établissements scolaires ? Là encore, leur existence n’est pas en péril.
C’est donc bien dans l’enceinte de l’école, lieu privilégié de la « formation intellectuelle et humaine » que cette rencontre avec des religieux doit intervenir. Le cheminement rhétorique qui conduit à cette annonce est, sur ce point, sans équivoque.
Premier mouvement, Nicolas Sarkozy se prononce pour l’enseignement d’une morale laïque à l’école. Il souligne aussitôt que morale laïque et morale religieuse sont complémentaires. Dès lors, il peut revendiquer – c’est le troisième mouvement de la démonstration – une place pour l’enseignement religieux, au moins équivalente à celle qu’occupera l’enseignement de la morale laïque.
Raisonnement dont on discerne tout de suite la faille : la laïcité, par un tour de passe-passe sémantique (laïcité/ morale laïque), devient une… confession parmi d’autres, alors qu’elle se borne à organiser leur coexistence. (La version longue de l’intervention présidentielle est ici) :
Formulation mal maîtrisée ? Improvisation ? Pas du tout. Quelques phrases plus loin l’annonce présidentielle est répétée : « Je pense que si nos jeunes peuvent, à un moment de leur vie, être initiés à ces questions-là, c’est mieux que s’ils ne le peuvent pas. Ils en feront ce qu’ils en voudront, mais nul n’est en droit de présumer à leur place. »
Dans l’esprit de Nicolas Sarkozy, cette initiation religieuse s’adressera donc à tous les enfants, quelle que soit leur confession ou leur absence de confession. Et on peut supposer qu’elle ne sera pas ponctuelle. Pour que les religieux en question « ouvrent [les enfants] à la question spirituelle et à la dimension de Dieu », il faudra certainement plus d’une réunion.
Bref, le catéchisme est de retour dans l’école publique.
Pourquoi personne n’a réagi, demandera-t-on ? La charge émotionnelle que représente le souvenir des 11 000 enfants français de confession juive morts dans les camps, et la proposition de parrainage qui lui a été associée, ont, ce soir-là, bouleversé et déconcerté l’assistance du dîner du CRIF.
En outre, y assistaient majoritairement des convives engagés dans une démarche religieuse. Le propos présidentiel ne les aura pas fait autant sursauter – même si leur attachement à la laïcité républicaine n’est pas en cause – que s’il s’était agi, mettons, d’une réunion de libres penseurs. La cascade de réactions politiques qui a suivi la proposition présidentielle sur la mémoire du génocide a fait le reste. L’annonce de l’introduction d’un enseignement religieux est tombé dans les oubliettes.
Le chef de l’Etat en a trop dit ou pas assez. A tout le moins, ce propos appelle des explications de la part de celui qui l’a prononcé. Pour l’heure, ce vœu pieux ressemble furieusement à une déclaration de guerre à la loi de 1905.
Les laïcards ne récoltent que ce qu’ils ont semé : ils se retrouvent en concurrence avec d’autres qui veulent aussi "imposer un sentiment d’appartenance commune"( religions diverses, marxistes, fascismes, republicanismes etc..). Le problème, c’est que la France n’est pas un pays de libre marché, y compris de libre marché "spirituel" ; et ce que je reprocherais à l’état français, c’est de ne jamais avoir été laïque ; l’état français organise des oligopoles religieux adoubés par l’administration, et ce n’est pas la même chose. Les "laïcards" ne sont pas laïques ; il vénèrent, de par la constitution elle-même, une divinité républicaine féminine, et, selon les goûts et les époques, divers pendants masculins ( il n’ya pas de sentiment d’appartenance commune sans infantilisme " maman et papa") tels que napoléon, robespierre, pétain, de gaulle, mitterand. La "laïcité à la française" n’est pas une indépendance réciproque de l’état et des associations : voilà la faille….Et le "constructivisme", le "destin commun", en réalité, tout le monde s’assois dessus…. Le seul pays réellement laïque, c’est celui du premier amendement.
Celà dit :
- lorsque mon fils se pose quelques questions à ce sujet, la grille freudienne, sophocle ou certaines mythologies africaines me fournissent un socle explicatif autrement plus solide que les fumées habituelles
- un chef d’état européen n’a pas réellement de pouvoir, et si de tels propos et de tels actes peuvent être posés, ce ne peut être au hasard
- a ceux qui s’indigneront de mon irrespect pour la divinité républicaine française, je répondrai que n’étant pas mon totem, je n’ai aucun interdit "religieux" à la dévorer…
pour ceux qui sont convaincus que "l’appartenance commune" est un sentiment quasi-programmé par la nature ( sous entendus, ceux qui voudrainet s’y dérober sont des anormaux), je rétorque qu’il n’y a besoin d’aucune loi pour renforcer un instinct fondamental ( il n’y a nul besoin de forcer un affamé à manger)
Mon Dieu ! Vous vous rendez compte de ce que vous prônez ? Redonner du sens aux mots, finir avec le culte de la médiocrité, sortir de l’individualisme, finir avec le discours du "ayant droit", prôner l’humanisme et la responsabilité… Mais vous êtes fou ! :D
J’espère que vos réserves en eau sont suffisantes pour cette longue traversée du désert en terre de désolation !