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LUTTES / CHRONIQUE DU BLÉDARD

Pourquoi l’Irak ?

lundi 30 juillet 2007 par Akram Belkaïd
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C’est un éditorial qui fera certainement date dans l’histoire des États-Unis. Le dimanche 8 juillet, le New York Times a réclamé dans un long réquisitoire, plus ou moins mesuré, le retrait des troupes américaines d’Irak. La démarche n’est pas anodine puisque le quotidien new-yorkais avait soutenu en 2003 la décision prise par George W. Bush et son administration d’envahir ce pays. Pire, il l’avait même réclamée à longueur de colonnes en se basant, entre autres, sur les « preuves et informations » apportées par sa journaliste vedette Judith Miller laquelle, on le sait aujourd’hui, était totalement manipulée et intoxiquée par les « opposants » du Congrès national irakien (CNI) et leurs soutiens néo-conservateurs.

Depuis, le New York Times a fait son (léger) mea-culpa et reconnu que les articles de Miller (partie exercer ses talents ailleurs) à propos des armes de destruction massive n’avaient pas été, c’est le moins que l’on puisse dire, suffisamment corroborés. « Il est temps pour les Etats-Unis de quitter l’Irak », a donc affirmé l’influent journal en évoquant une invasion déclenchée « sans raisons valables », « sans tenir compte de l’opposition mondiale » et « sans plan de stabilisation » pour parer à l’effondrement du régime de Saddam Hussein.

Deux passages particuliers de l’éditorial sont sans appel pour Bush et son équipe. Dans le premier, le New York Times relève que « malgré les affirmations du Président, Al-Qaïda n’avait aucune prise significative en Irak avant l’invasion », laquelle, au contraire, lui a offert « de nouvelles bases, de nouvelles recrues et un nouveau prestige ». On ne peut être plus clair même si le lecteur appréciera à sa juste valeur l’expression « aucune prise significative en Irak », le terme « significative » étant plus qu’une précaution de style.

En effet, il ne s’agit pas pour ce quotidien de se ménager une porte de sortie au cas où d’improbables preuves d’une complicité entre Ben Laden et Saddam Hussein viendraient à émerger (maintenant qu’il sillonne la région, Tony Blair, alias « la vérité », va peut-être les trouver et nous dire par la même occasion où se trouvent les armes de destruction massive). En fait, le New York Times a beau avoir changé de position, il ne peut s’empêcher de tergiverser sur la responsabilité de l’Irak dans les attentats du 11 septembre 2001. Une responsabilité dont, à ce jour encore, un grand nombre d’Américains demeurent convaincus même s’ils sont désormais opposés à la guerre.

Les lecteurs réguliers de cette chronique savent que le blédard est allé traîner quelques jours du côté des rives du Potomac, et à la question « savez-vous pourquoi votre pays a envahi l’Irak », il a récolté, à parts égales, les deux réponses suivantes : « pour punir les responsables des attentats du 11 septembre », comme me l’a affirmé un vendeur de beignets mexicains, et « pour le pétrole et sûrement pas pour la démocratie » comme l’ont reconnu nombre de chercheurs interviewés qui, il y a encore un an, n’auraient jamais concédé pareil aveu.

D’autres avis, bien moins fréquents, ont aussi leur intérêt. Ainsi, cet universitaire installé dans la banlieue nord-ouest de Washington, qui, après moult circonvolutions, a fini par me livrer la confidence suivante : « Ecoutez… J’ai écrit des tonnes de papiers sur cette guerre. Pour moi, il y avait trois raisons majeures qui ont conduit à ce conflit : donner satisfaction à l’opinion publique en lui faisant croire que l’on allait venger les victimes du 11 septembre, mettre les réserves pétrolières irakiennes à l’abris des appétits chinois et débarrasser la région d’un régime dictatorial ennemi à la fois d’Israël et des monarchies arabes ». Et d’ajouter : « Mais, je ne sais plus. Je… je n’arrive plus à me faire une opinion. Tout cela est tellement catastrophique, tellement désolant. J’ai du mal à croire que l’invasion de l’Irak obéissait à une démarche… heu… rationnelle ».

Au risque de faire hurler ceux qui, dans le monde arabe - et ailleurs -, échafaudent mille et une théories du complot pour expliquer cette guerre dévastatrice, j’ai tendance à partager ce point de vue car il y a dans cette sordide expédition coloniale un élément de folie qui dépasse tout entendement humain.

Mais revenons à l’éditorial et à son autre passage imprécateur. « Il est effrayant de constater, s’indigne le New York Times, que monsieur Bush n’a pour plan que de ne rien faire tant qu’il sera président, son seul objectif étant de passer [en l’état] le dossier irakien à son successeur ». Voilà condamnée toute une vaine agitation, celle de la Maison-Blanche qui, avec force manoeuvres dilatoires, n’en finit pas de vouloir évaluer les effets de « nouvelles stratégies » récurrentes que les militaires américains eux-mêmes qualifient d’échecs.

Mais que faut-il attendre du retrait américain (s’il a lieu…) ? Rien sinon le pire. Le scénario catastrophe est déjà là et il ne fera que s’aggraver : guerre civile entre sunnites et chiites, nettoyage ethnique, banditisme, corruption généralisée et exil forcé des populations (à ce jour, deux millions d’Irakiens sont partis à l’étranger, notamment en Syrie et en Jordanie, cela sans compter deux autres millions de déplacés à l’intérieur de l’Irak). Et qui peut affirmer que la Turquie n’interviendra pas militairement au Kurdistan ? Qui peut croire que l’Arabie Saoudite restera longtemps les bras croisés face à l’influence sans cesse croissante de l’Iran ?

C’est évident. Le départ des GI’s épargnera de nombreuses vies américaines mais ne changera guère le sort des Irakiens. Pour autant, je ne plaide pas pour un maintien de l’armée américaine. Simplement, je m’interroge face à cette catastrophe irakienne qui paraît sans solution alors que les stratèges de Washington nous ressortent l’idée d’une partition de l’Irak en trois parties. Une hypothèse que les adversaires de la guerre avaient mentionnée dès 2002 lorsque la propagande pro-intervention s’était mise en branle. Mais là aussi, j’ai du mal à croire que les Etats-Unis ont allumé ce feu gigantesque - qui risque de brûler tous leurs alliés dans la région, y compris Israël - pour le seul but de diviser l’Irak ou de se garantir un pétrole qui, violences obligent, n’est pas près de couler à flots.

Paru dans Le quotidien d’Oran


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4 MESSAGES

Forum

  • Pourquoi l’Irak ?
    le jeudi 2 août 2007 à 19:51, Jihelix Le Gaulois a dit :
    AInsi, chez nous, il y aura bientôt des dizaines de milliers d’électeurs enthousiastes du Petit Nicolas, qui jureront n’avoir jamais été de ses partisans… ne faire qu’un seul geste, retourner sa veste, selon Jacques Dutronc.
  • Pourquoi l’Irak ?
    le jeudi 2 août 2007 à 10:25, JMAJ a dit :
    Je serais curieux de connaître la position du canard repenti sur l’arrosage de Bush, à coup de dizaines de milliards de dollars, en armement et autres "aides techniques" dans les pays "amis" du moyen-orient, avec tous les risques de déstabilisation à long terme que ça entraîne. C’est très beau de faire son mea culpa — faute avouée est à moitié pardonnée, dit-on — mais s’il faut chaque fois dix ans pour réagir à une monstruosité comme celle des excuses à la guerre en Irak, on n’est pas prêt de relire un éditorial du même type. Quant aux "justifications" données aujourd’hui sur les raisons du revirement, les éditeurs ont-ils songé qu’il y avait un moyen très américain d’éviter cette catastrophe, c’est de prôner l’application de l’empeachment contre celui qui est à la base de ces con… Si je ne me trompe pas, Nixon avait bien été démis pour mensonge, non ? Et Bush alors, que fait- d’autre ? Mais c’est peut-être trop demandé à la fois : se repentir et essayer de changer les choses, tout en même temps, c’est sans doute trop lourd ? Pauvre monde !
  • Pourquoi l’Irak ?
    le jeudi 2 août 2007 à 06:14, aziz a dit :
    oui pourquoi l’IRAK et pas L’IRAN ? depuis le début…, l’Iran n’est il pas la bête noire de toutes les coalitions occidentales ou pro occidentales ; qu’elles soient petrolières, stratégiques ou idéologiques… ? Pourquoi les américains n’ont-ils pas profité de la confusion post 11 septembre pour aller faire la fête aux ayatollahs et autres gardiens de la révolution de khomeini afin de stabiliser, mater et sécuriser une région dont ils ont et auront toujours besoin ? la réponse se trouve sans doute dans cet echec cuisant rencontré en Irak, car les conseillers proches de Mr Bush ont beaucoup trop sousestimé l’Irak, ils pensaient au début que ça leur prendrait 3 à 6 mois pour virer saddam et finaliser la securité et le nouveau régime à placer en Irak pour se concentrer sur l’Iran et passer à la phase 2 du Business plan…malheureusement pour eux, ils y ont laissé leur plumes, et aujourd’hui, ils peuvent bien prétendre se retirer de l’Irak au moment voulu !! comme dit le dicton marocain, est ce que d’khoul el hammam b’hal kh’roujou ? ou en français on rentre pas au bain comme on en sort ! les américains ont confié le pouvoir à un fou et son équipe qui les ont mené droit à l’échec, ils le regretteront longtemps après ! espérons qu’un autre Woodstock finisse par s’organiser aux etats unis, pour inciter les américains à réfléchir peace and love et les pousser à investir pour réparer le gachis qu’ils ont commis en Irak…bien que ça soit loin d’être suffisant !
  • Pourquoi l’Irak ?
    le mardi 31 juillet 2007 à 12:24, Ann o’Nimm a dit :

    L’armée américaine en Irak n’a pas mis longtemps à réagir à la plaisanterie un peu trop ambiguë de John Kerry sur le niveau d’éducation de son commandant en chef. Moins de trois jours après la remarque tendancieuse, l’état-major de la grande mâcheuse de chewing-gums avait en effet pris des cours accélérés d’histoire de l’art, prouvant ainsi qu’on pouvait bénéficier d’une éducation irréprochable ET être embourbé jusqu’au cou dans un merdier sans nom. C’est ainsi que le major général William Caldwell, porte-parole des forces armées américaines en Irak, a déclaré à nos confrères de Beaux-Arts Magazine que l’Irak était « une œuvre d’art en gestation » et qu’à ce titre il était normal que là, tout de suite, le pays ne ressemble à rien. « Même les plus grandes œuvres d’art peuvent sembler confuses pendant leur réalisation, » a prévenu le critique éclairé. « Un tas d’argile peut devenir une sculpture. Des dégoulis de peinture deviennent des tableaux qui inspirent » a-t-il ajouté. Il est par conséquent vain de mesurer les efforts de l’armée américaine à l’aune des violences actuelles : ce n’est que devant l’Irak de demain que l’artiste pourra être jugé."

    http://bravepatrie.com/+breve539+

    http://www.guardian.co.uk/Iraq/Story/0,,1938419,00.html

    C’était en novembre 2006, trois ans après l’arrivée des Sauveurs américains (ou des pompiers-pyromanes chargés de porter haut l’esprit de vengeance de l’Américain moyen ?).

    Des dizaines de morts anonymes (qui n’entreront pas au -pourtant mérité- panthéon des victimes des va-t’en-guerre "démocratiques") en Irak chaque jour depuis "hier", novembre 2006. Demain étant passé, attendons après-demain càd la prochaine élection américaine pour refiler le bébé agonisant au successeur de Bush. Entre-temps, les USA s’occupent de refiler eux aussi (comme Sarkozy), si ce n’est pas eux ce seront des plus méchants disent les dames patronnesses nationalistes, ici et là quelques réacteurs nucléaires (et armements), remontant la morale, pardon le moral du peuple via les chiffres de la Sainte-Economie desdits pays. Hélas, rien de neuf en ce très bas monde…

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