Chaque semaine, Jacques Gaillard plonge dans son dico perso et taille un costard aux mots des médias.
Un ministre dont je ne citerai pas le nom accuse la presse de vouloir l’écraser. Normal, pour une presse. Le pauvre hère, dans la foulée, se compare (élégamment) à « un grand cerf chassé en chasse à courre ». Autrement dit, pressé par les chiens, et quelques socialistes hargneux.
Que la presse presse, qui pourrait s’en étonner ? Observez les parois de votre kiosque favori : chaque canard presse ce qu’il peut. D’aucuns pressent les orgueilleuses (bien que juvéniles) mamelles de Zahia pour assurer leur tirage – à la réflexion, cette phrase est ambiguë, ne la relisez pas. D’autres font monter la pression en annonçant la mise en bière de l’équipe de France de foot – mince, la bière aussi, ça se tire, désolé, c’est une rechute, ne relisez pas cette phrase non plus. D’autres enfin pressent l’allure pour sortir le dernier scoop de l’affaire Grand Cerf : la vieille dame digne a occupé pendant soixante ans un emploi fictif chez L’Oréal. Là, vous pouvez relire, parce que c’est vrai de vrai : personne ne l’a jamais vue travailler.
On parle parfois de « presse d’opposition ». Pléonasme : une vraie presse, c’est forcément un peu beaucoup d’opposition, parce que ça s’oppose au silence, à l’obscurité, aux mensonges. Sinon, ce n’est que du papier avec Angelina Jolie dessus ou la liste des partants à Chantilly (mettez tout sur Jolie Cocotte dans la 5e). Donc, la presse morfle quand elle fait son boulot, ce qui, en langage UMP , se dit : « Tous des trotskistes ! »
Facile de distinguer la vraie presse de la fausse : la vraie fait des enquêtes, la fausse fait la quête. La vraie ose écrire que Sarkozy (avec ou sans tréma), après tout, c’est un nom de Rom, voilà, c’est fait ; la fausse dit que Fillon est « populaire ». Dernier test : la vraie ne fait pas une page de micro-trottoir au lendemain de la grève pour que M. ou Mme Glandu se plaignent d’être otages dans une galère. Si vous avez lu, vu ou entendu ça, vous vous êtes fait avoir.