Nouvel album de Mylène Farmer : joli et sensible comme Claire Chazal, passionnant comme Flavie Flament.
Mylène Farmer est l’objet d’un culte aux dimensions quasi-religieuses, sacralisée par des hordes de fanatiques. La raison de ce succès tient en une recette magique : la crise d’adolescence ad libitum ! A 47 ans, le filon reste considérablement rentable même si, à cet âge, la manœuvre en devient presque indécente.
En parant la crise d’adolescence d’un grand Barnum simili-religieux, l’artiste, dépositaire d’un marketing allégorique, passe de l’utilisation de la croix chrétienne (logo d’Innamoramento) à la reprise de l’ « Ave Maria » ; une œuvre audio et visuelle émaillée d’autant de symboles pour procurer un semblant de consistance mystique. Comme il y a la philosophie de comptoir, il y a la théologie de cour de récréation. L’iconographie gothique – très tendance dans le monde de la musique actuellement – domine dans cette liturgie néo-romantique et les lieux de pèlerinage se nomment Bercy ou Stade de France. Une pincée de provocation, un gramme de mystère, une lichette de liberté par procuration, un soupçon de spleen, une cuillerée de sexe, une grosse dose d’opportunisme sans états d’âme, et le tour est joué !
Ainsi, le dernier morceau de bravoure « marketinguement shocking » de Mylène Farmer prend corps sur les affiches de sa tournée qui la montrent gisante sur le bitume, en mini-short, le regard absent. Certains ont évoqué une mise en scène de suicide. Personnellement, j’y vois une poupée gonflable tombée du camion (qui n’a pas trouvé preneur, le comble), mais beaucoup d’interprétations sont possibles. C’est une façon de créer l’événement autour d’un nouvel album, d’autres retournent dans le métro en fanfare, chacun son truc.
Maintenant que les présentations sont faites, attachons-nous (façon de parler) au septième enregistrement studio de la rousse libertine : Point de suture.
Apathie et somnolence accompagnent l’écoute de ce disque passablement moyen, loin des Cendres de lune, Ainsi soit je… et L’autre, fondateurs au charme poisseux intact. L’ouverture du disque interpelle pourtant agréablement, avec le single « Dégénération » et son electro beat entêtant. « Appelle mon numéro » retient l’attention, avec un couplet efficace et une certaine fraîcheur générale. L’eurodance de « Je m’ennuie », entre Début de soirée et Emile et Images, amorce un doute qui ne se dissipera plus ensuite. Passés les dispensables « Paradis inanimé » et « Looking for my name » (avec Moby, qui n’arrive pas aux chevilles des duos avec Murat et Seal), le bien nommé « Point de suture » ne manque pas d’étoffe et ranime l’espoir, à peine entamé par « Réveiller le monde ». Les choses se gâtent définitivement avec le consternant « Sextonik » : le sextoy de Mylène danse la Tecktonik, la chanteuse s’aligne sur les nullasses Lorie et Alizée (sa protégée) dans un numéro vocal dénué de sex-appeal, assommant. Le meilleur morceau de l’album arrive trop tard, en plage 9, sous le titre « C’est dans l’air ». Cette chanson sera vraisemblablement un single, tant elle possède les caractéristiques du tube farmérien : lyrisme épique, paroles désenchantées (« C’est dans l’air, c’est nucléaire, on s’en fout On finira au fond du trou »), arrangements tourbillonnants, refrain entêtant. La belle conclusion de ce recueil, « Si j’avais au moins… », morbide à souhait (« J’ai tout d’une peine, un enténèbrement ») nous ferait presque oublier les mauvais moments passés depuis 45 minutes si sa filiation avec « Les mots » ne nous laissait dubitatifs et exsangues. Mais l’irréparable est commis en plage fantôme, quand la dame blanche nous gratifie d’une imitation d’Arielle Dombasle, massacrant l’« Ave Maria » de Schubert sous la douche. Nicolas Canteloup n’aurait pas fait mieux. Cerise sur le gâteau : le triste constat people observé en cet été 2008 (l’ado éternelle de « Fuck them all » est devenue une bobo éternelle avec son numéro de fayotte au journal de Claire Chazal : « je vous trouve très très jolie et très sensible »), ne plaide franchement pas en sa faveur.
Il paraît qu’un journaliste de Télé Star a reçu des menaces de mort pour avoir dit du mal du dernier single « Dégénération ». Amis fans de Mylène Farmer, voyez la vie du bon côté, abonnez-vous à Télé Z.
Un article pour se venger de ne pas avoir été choisi pour faire sa biographie, monsieur "Raphael de A à Z", "Indochine de A à Z" ?
Garde tes aigreurs pour ton blog… Et mets ici en avant des albums qui t’ont plu !
Je n’ai jamais demandé à faire un bouquin sur Mylène Farmer. Tous les titres dont je suis l’auteur chez Musicbook sont des commandes (à part "Indochine de A à Z", mon premier). Le volume sur Mylène Farmer existait déjà avant que je ne découvre cette collection.
Sébastien Bataille