Le principe de notre jeu dominical est toujours aussi simple : un homme politique ou penseur politique célèbre est l’auteur mystérieux d’un livre que « Bakchich » s’est amusé à relire, avec une pointe d’ironie. A vous de le découvrir. Réponse demain !
Voilà un ouvrage qui ne s’embarrasse pas des contingences du réel. Traitant de politique internationale, il s’ouvre par ces mots : « déjà, la catastrophe ? », et se conclut par une évocation de notre époque « où tous les peuples du monde veulent croire à cette utopie devenue réalité : la fraternité ». La principale faiblesse de l’ouvrage se trouve entre ces deux phrases…
L’auteur annonce un programme ambitieux : ce livre est « né de la volonté de préserver les chemins de traverse, d’accueillir l’histoire, la philosophie, la littérature dans la fraicheur des sources ». Peut-on pour autant résumer en vingt pages l’histoire de l’Occident et celle de la mondialisation « de Marseille à Kyoto, de Limoges à Mexico » ?
La France y est décrite comme un « pays au carrefour des âges et des mondes » ("l’Alsace, carrefour des civilisations et terre de contrastes", dit mon guide de voyage). L’Occident est angoissé ? Un paragraphe évoque tour à tour la chute de Rome, la peste au Moyen-âge, le spleen de Baudelaire et la crise de 1929. Heureusement, il y a l’héritage chrétien : « l’Evangile a proclamé cette étonnante nouvelle : l’homme est un » (« Dieu est un, Dieu est un … dommage que la phrase soit tronquée », disait Pierre Dac). L’auteur veut « arpenter les falaises » de la pensée, « côtoyer la vie près des gouffres » et « s’arracher à la pente pour voler encore ». Il aime tant le vide qu’au fil des pages, il s’y complaît.
Mais restons sérieux, le moment est grave, puisque nous sommes arrivés « à cette heure où le monde se trouve tout près de basculer dans l’irréparable ». Quel est ce risque terrible ? Mystère. Mais cela justifie un peu de hauteur de vue.
Qu’on en juge : « Lorsque, à la tombée du jour, se dressent brillantes de mille feux les villes bardées de certitudes, le voyageur découvre la loi du monde nouveau, morcelé, épars : labyrinthes obscurs où les hommes égarés cherchent à tâtons leur chemin, dans la hantise de ces monstres que les mythes entretiennent. Dédales inimaginables, aujourd’hui plus fréquentés que les routes commerçantes des empires de jadis. Confluence des temps qui se télescopent dans notre imaginaire collectif, façonné par un réseau d’images et de représentations dont les antennes vibrent en tous les points de la planète ».
Il est vrai que « en permanence, tout se décompose et se reconstruit » : « à la lenteur des signes précurseurs de la crise succède soudain l’éclatement », même si « tantôt brusquement les esprits s’apaisent et les flammes retombent, tantôt l’incendie se propage » (et réciproquement). En conséquence, il faut « agir en amont, à la racine du feu » (couper le feu à la racine ?) sans oublier que « dans un monde en évolution toujours plus rapide, le mouvement est la clé de la réussite ». Pour les détails, on apprend que l’Irak est une vieille civilisation, la Chine un objet de fantasmes et l’Inde un pays qui s’incarne dans la figure de Gandhi.
L’auteur pense que l’époque « est en quête de passeurs pour aborder aux rives d’un nouvel âge, de défricheurs pour lire les traces les plus enfouies et découvrir de nouveaux signes, d’éclaireurs capables de saisir l’esprit du monde et de lui dévoiler une aube nouvelle ». Il se voit sans doute dans le rôle. Et quand il se le dit devant son miroir, il est d’accord avec lui-même.
Alors, trouvé ? C’est trop facile, cette fois-ci, non ?
Pour vous aider, l’auteur de ce livre se trouve dans la liste suivante :
Jacques Attali
Bernard Kouchner
Pierre Lellouche
Dominique de Villepin
Nicolas Hulot
Alain Minc
François Mitterrand
Jacques Chirac
Charles de Gaulle
Claude Allègre
PS du 22/1 : D’accord, on a tardé un peu, mais le suspense n’en était que plus grand. Voici la réponse attendue : il s’agissait de Dominique de Villepin dans "Le requin et la mouette", Plon/Albin Michel, 2004.
Pour ceux que cela amuse, retrouvez le précédente devinette (avec sa réponse), publiée la semaine dernière dans bakchich en cliquant ici.