Carrefour a ouvert deux enseignes censément novatrices qui rompent avec l’organisation symétrique des rayons. Place à la circularité et au 360°, et n’oubliez pas votre plan des lieux.
L’hypermarché, c’était ennuyeux. Trop grand, trop loin, transformant les courses en corvée. « C’était », à l’imparfait, car désormais, Alléluia, l’hyper est sauvé ! Et merci au Dieu de la grande distribution, Carrefour, de nous l’avoir ressuscité. Le bon Carrefour vient d’ouvrir deux magasins « Carrefour Planet », soi-disant révolutionnaires, à Ecully et Vénissieux, près de Lyon.
Exit l’organisation en bloc symétrique, avec une allée centrale et des rayons s’en échappant perpendiculairement. Bienvenue dans un monde tout en rondeurs, avec des axes circulaires et neuf pôles « produits », posés comme autant de magasins dans le magasin : le marché, les surgelés, le bio, la beauté, le bébé, la mode, la maison, la high-tech et les loisirs. « Cela signe le grand retour de l’esprit de fête dans nos magasins », affirment, sans rire, les patrons de Carrefour.
Patrons qui, vraiment, ne doutent de rien. La preuve : pour concevoir ces magasins, ils ont fait appel à un certain Hubert de Malherbe, créateur d’une agence de design, à Paris. L’homme a du talent, on ne peut pas le lui enlever, mais tout de même… Il faut voir la « bête ». Un grand blond, cheveux au vent, flanqué de son éternelle veste de cuir. Une sorte de David Guetta vieillissant, mâtiné de Père Guy Gilbert, vous savez, le « curé des loubards ». Assez loin, on le devine, de la mère de famille lambda qui, elle maintenant, doit se coltiner ses courses dans ce Carrefour Planet.
La presse, unanime, a salué la réussite du projet, la beauté du magasin. Beau, il l’est, ça oui. Mais pratique, pensé pour ses clients, ça non. « C’est certes un magasin très photogénique, mais je n’ai pas vu de bouleversement convaincant, assure ainsi, déçu, le patron, concurrent, d’une grande agence de design. La signalétique, inexistante, rend compliquée la circulation du nouveau concept Carrefour. » A tel point, ajoute-t-il, « que l’on peut se demander si le consommateur ne va pas perdre encore plus de temps qu’auparavant. »
C’est en effet comme si, dans ces magasins d’Ecully et de Vénissieux, tout avait été pensé pour faire du tape-à-l’œil… sans une seule seconde se mettre à la place du pousseur de chariot. Les marques avec lesquelles Carrefour a signé un accord, Apple, L’Oréal, Coca-Cola ? Immanquables, avec leurs affiches surplombant les allées. Mais trouver une boîte de petits pois s’avère toujours aussi compliqué. Pas d’autres choix que de déambuler, au petit bonheur, dans la zone épicerie – plus de 1000 m², tout de même – avec, comme seul soutien, quelques trop rares panneaux indicateurs pour se guider. Les clients, d’ailleurs, se baladent un plan à la main, c’est dire si c’est pratique…
vénissieux…
on dirait vraiment un temple de la culture pour les pauvres, à lire l’article. ça craint.
c’est ça qu’on donne aux pauvres, en guise de culture : du tape à l’oeil et du que tu peux pas acheter. comme dans les musées d’aujourd’hui, remarquez.
c’est du post warhol, en somme : la boîte de soupe, de petits pois ou la bouteille de coca comme oeuvre d’art. mais sans vraiment le décalage qui va avec.