Grand moment de frisson, la réserve fédérale américaine va annoncer sa décision sur les taux. Une sorte de « qui perd gagne » pour l’économie mondiale. Si, si…
La décision sur les taux de la Réserve fédérale américaine est attendue avec impatience. Avec un taux directeur à 4,25%, les taux aux États-Unis sont toujours supérieurs à ceux pratiqués en Europe. Mais la pression s’amplifie pour les faire baisser. On parle même de ramener le taux directeur évoqué ci-dessus à 3,75%. Au sein de la Réserve fédérale, militent pour une baisse les représentants des institutions bancaires de la côte ouest et du sud du pays. Le directeur de la Réserve d’Atlanta, c’est-à-dire le représentant au sein de la banque centrale américaine des États du Sud, n’arrête pas de dire à qui veut l’entendre que l’inflation n’existe plus et qu’il n’y a pas de raison de continuer à persécuter les banques et les consommateurs américains en essayant de remettre de l’ordre dans le système monétaire du pays.
Bref, il apporte un soutien clair et même bruyant aux « greenspaniens » de la Réserve fédérale regroupés autour des Californiens qui accusent Bernanke, le successeur de Greenspan, d’être à l’origine des difficultés actuelles de l’économie américaine en ayant porté le taux directeur de la Réserve fédérale début 2007 à 5,25%. Bernanke avait pour lui que la fuite en avant dans le déficit extérieur aux États-Unis et dans la création sans limites de dollars finit par avoir des conséquences imprévisibles. En particulier, il est clair qu’en multipliant dollars et crédits, on a fait exploser certains prix, notamment celui du pétrole. Pour Bernanke, un effort de rigueur aux États-Unis était, et demeure nécessaire : si le gouvernement ne veut pas augmenter les impôts pour concrétiser cette rigueur, il faut que la politique monétaire s’en charge.
Si ce raisonnement a quelque chose d’imparable pour beaucoup d’économistes, il a le défaut pratique de mettre en difficulté les banques qui, dans les périodes de bas taux d’intérêt, ont prêté un peu à n’importe qui. Elles se sont retrouvées du fait du durcissement de Bernanke en situation d’illiquidité. Illiquidité ne signifie pas insolvabilité, c’est-à-dire faillite, et parmi les analystes, seul Jacques Attali a cru bon d’annoncer que la séquence de faillites bancaires à venir fera de la crise de 1929 une promenade de santé par rapport à ce qui attend l’économie mondiale en 2008. Mais le pessimisme tout personnel d’Attali, qui n’a guère de fondement réel que sa volonté de surprendre, est la pointe extrême des interrogations des économistes. Pour éviter une remise en cause des situations financières acquises, on peut toujours revenir en arrière. Ainsi, si Bernanke baisse vraiment son taux jusqu’à 3,75%, il va injecter de nouveau beaucoup de liquidité dans le système.
Cela signifiera en fin de compte un retour de la bonne vieille inflation avec ses pertes inéluctables de pouvoir d’achat. Bref, si Bernanke cède comme cela semble probable aux Californiens et à Atlanta, certains prix vont continuer à flamber : automobilistes, gare à votre plein d’essence ; quant aux détenteurs d’or, ils retrouveront les charmes de la vieille relique monétaire.
Au passage, les pays pétroliers n’auront encore qu’à se réjouir du refus des Américains de réduire leur déficit extérieur et les Européens qu’à préparer la stagflation à venir, mélange de ralentissement et d’inflation, dans un contexte où pour certains pays, le ralentissement se fera sur une base de croissance déjà bien basse ( France, vous avez dit la France ?).