Symbole de virilité et de puissance, le poivre était d’abord considéré comme un médicament, avant d’épicer les nuits des souverains
Il est le roi des épices et fut longtemps l’épice des rois, parce qu’il symbolisait la puissance et la… virilité.
A Rome, les souverains offraient du poivre aux consuls, aux sénateurs, aux généraux, et dès le déclin de l’Empire, le roi des Wisigoths Alaric, lors de son entrée victorieuse dans Rome, en 408, se fit remettre 5 000 livres d’or, 30 000 livres d’argent et 3 000 livres de… poivre !
Il figurait également un gros ballot de poivre parmi les présents que l’empereur Théodore III adressa à Attila, pour calmer ses ardeurs. Il eut l’effet inverse !
Si Hippocrate, le premier, a décrit cette épice, il la considérait uniquement comme un médicament. Quelques siècles plus tard, Pline s’étonnait dans son Histoire Naturelle : Cela brûle la langue, coûte aussi cher que l’or ou que l’argent, alors qu’il s’agit seulement de graines d’arbres sauvages.
Il est vrai que le poivre a connu immédiatement le triomphe culinaire et au Moyen Age, les négociants dont c’était la spécialité, les pébriers, formaient une riche corporation. Même les troubadours vantaient les mérites du poivre, à l’instar de Thibault Lespleigney :
Donné aux chaulx et colériques
Motif et des ardeurs lubriques
La poivre entrait naturellement dans la composition de toutes les grandes sauces donnant son nom à la plus chaleureuse d’entre elles, la sauce poivrade.
De nos jours, et malgré la vache folle, cette recette a toujours bonne et classique réputation pour les anémiés du… sentiment.
Il est habile de partager ce plat ( Le steak au poivre) avec le partenaire, même s’il jure ne pas en avoir besoin…cela permettra de chanter ensuite, avec Pierre Perret :
Il flotte encore sur ma chemise
Un poivre doux aphrodisiaque…
Et si poivre se dit pepe en italien et pepper en anglais, on peut être sûr qu’après en avoir fait une cure, on ne sera ni pépé, ni pépère…
Apicius - Paris
Pour 4 personnes :
1 lobe de foie gras de canard cru (400 g) coupé en 4 escalopes épaisses
5 cl de vinaigre d’alcool coloré
120 g de sucre semoule
5 cl de vinaigre de Xérès
15 g de poivre noir concassé
1 pincée de poudre de peau d’orange
40 g de cacao en poudre
Poivre noir de Se-Tchouan et Jamaïque
1 pincée de Meadow salt (sel cristallisé)
mettre ensemble le vinaigre d’alcool et le sucre dans une casserole à fond épais ; cuire jusqu’au caramel, puis déglacer avec le vinaigre de Xérès ; ajouter le poivre noir concassé ; laisser 10 minutes ; passer au tamis et réserver
dans une poêle, saisir rapidement les escalopes de foie gras, largement assaisonnées de sel et de poivre noir
réchauffer le caramel ; l’assaisonner des poudres de cacao et d’orange ; relever à l’aide des poivres moulinés de Se-tchouan et Jamaïque
disposer les escalopes de foie dans l’assiette ; napper tout autour avec la sauce ; assaisonner de Meadow salt
Remarque : la sauce doit être puissante et suave à la fois. Force du vinaigre, amertume de l’orange, violence des poivres et présence du chocolat doivent se conjuguer
La dernière chronique cul-inaire de Bakchich :
Dans la charcuterie que j’ai l’honneur de diriger depuis 14 ans, nous avons été prévenus de votre article humoristique qui se termine par ces mots "Et si poivre se dit pepe en italien et pepper en anglais, on peut être sûr qu’après en avoir fait une cure, on ne sera ni pépé, ni pépère…". Je peux vous dire que nous en rions encore ; encore une blague que La Dépêche Du Midi n’aura pas imaginée !
Henriette du Mans
@ L.-même :
Dans la charcuterie que j’ai l’honneur de diriger depuis 14 ans, nous avons été prévenus de votre réponse au fameux billet que j’ai ici présentement mis en ligne au nom des 5 employés de la charcuterie que j’ai l’honneur de diriger depuis 14 ans et nous sommes encore sous le charme de votre humour sans borne : poivre d’arvor pour poivre d’armor, il fallait y penser ! Mais ceci dit mon second fils ainé, qui accessoirement est aussi spécialisé dans les rillettes (dûment, d’ailleurs), me fait remarquer que l’Armor (Aodoù an Arvor en breton, Graéy d’Armor en gallo)n’est pas plus poivré que les rillettes du Mans ou la Dépêche du Midi (fameux bulletin décoré de la Pantoufle d’or).
Si vous êtes coquin, ne soyez pas nigaud ! Cordiales révérences à votre mère que j’ai bien connue,
Henriette du Mans
Je voudrais livrer ma réflexion sur le poivre.
Oui c’est le roi des épices car on le retrouve dans toutes les recettes. Par contre, là ou cela se dégrade c’est la qualité des poivres du commerce. Ils n’ont bien souvent que du piquant et pas d’odeur.
Il faut s’intéresser au poivre de qualité, les poivres rares comme le poivre de Kampot ou de Penja. Ce sont des poivres qui possèdent une saveur et des parfums subtils.
Enfin je conclurais par les faux poivres comme le poivre de séchuan qui n’est en fait qu’une baie..
bon appétit !