Jacques Gaillard décrypte les mots à la mode.
POTICHE, n. f. : voir : figurant. (Le Robert)
Heureusement que le match OM - PSG a été annulé au dernier moment : on a pu vérifier que le Premier ministre était toujours vivant. Sa soirée-télé du dimanche a été bousillée, et il s’est fermement exprimé sur la conduite à tenir en cas de virus dans les vestiaires. Toujours de bon conseil, monsieur Fillon. La dernière fois, il préconisait une loi de plus contre les chiens qui mordent. Par peur, comme Bridget Jones, d’être découvert, après huit jours d’absence au bureau, mort dans sa chambre, à moitié dévoré par un berger allemand ?
Normalement, avec le budget, on le voit un peu à l’Assemblée. Sinon, de temps en temps, il inaugure une gendarmerie, il couronne une « Miss Rillettes », il rencontre Marie-George Buffet pour évoquer « les dépenses d’avenir ». On peut se demander à quoi sert ce colloque. Bah, ça fait une sortie pour Marie-George, qui ne va pas fort. Ce qui aurait été sympa, c’est qu’il l’invite à l’inauguration de l’usine Damart, dans le Nord. Ca ne s’invente pas : notre Premier ministre a, du reste, fait un vibrant éloge de la tribo-électricité appliquée aux sous-vêtements. Il s’en sert, il aime beaucoup : la seule chose qui le fait encore briller, c’est l’électricité statique.
On ironisait sur l’inauguration des chrysanthèmes. Mais après le Damart, quoi ? Voilà un homme cueilli dans la fleur de son âge, après plusieurs ministères de premier plan, des batailles gagnées, des ratés honorables, plein de savoir-faire, d’énergie, de souffle, bref, une valeur sûre – et qu’en reste-t-il ? Il rêvait de servir à l’hôtel Matignon, mais pas comme groom. Ne dites pas qu’il a le regard de Snoopy : c’est trop dur pour ce faux looser de Snoopy. Fillon, bon toutou, n’aboie jamais comme Frédéric Lefebvre. Je doute qu’il remue la queue comme Xavier Bertrand. Il est comme le héros du Chevalier inexistant d’Italo Calvino : une armure, et rien dedans…
Ah ! le beau temps des cohabitations ! Ses Premiers ministres surmenés, défenseurs opiniâtres de leur pré carré, ardents à la réforme, manoeuvriers, flingueurs ! Pas tous désopilants (je pense à Balladur), pas toujours brillants (pour faire briller Jospin, il faut sacrément l’astiquer), pas forcément efficaces (Chirac en sortit lessivé), mais : vivants. Le quinquennat et son calendrier pour monarque ont bousillé tout cela.
On s’est bien fait avoir, nous aussi. Désormais, le Président est le beurre, et le Premier ministre, au mieux, le prix du beurre. Et la crémière joue de la guitare.