Il y a banlieue et banlieue. Ainsi, la ville de Meaux, dont le maire s’appelle Jean-François Copé, bat tous les records en matière d’aides à la "reconstruction".
Les banlieues en ont de la chance ! Depuis 2004 et la création de l’Anru, l’Agence nationale pour la rénovation urbaine, ces villes où l’urbanisme laissait à penser qu’on avait oublié que des gens y vivaient connaissent de meilleurs jours. Adieu, tours, barres et quartiers à l’habitat décrépit.
Grâce à l’injection de sommes faramineuses – 12 milliards d’euros, a dit Jean-Louis Borloo, ministre de la Ville à l’origine de l’Anru –, on allait régler son compte au mauvais état de nos lointains faubourgs. Les secondes zones de la République allaient enfin renaître de leurs cendres. Ne parlait-on pas de « plan Marshall des banlieues » après les violentes émeutes d’octobre et novembre 2005 ?
Mais il y a un « mais ». C’est ce que nous a expliqué une enquête de Spécial investigation diffusée sur Canal + le 25 octobre. L’auteur du sujet, Nicolas Bourgoin, s’est posé une question toute bête : après les émeutes et après les belles paroles, qu’est devenu l’argent promis par le gouvernement ? Au hasard de ses pérégrinations, entre deux chantiers cofinancés par l’Anru, notre confrère a découvert que la ville de Meaux (77), dont le maire s’appelle Jean-François Copé, battait tous les records en matière d’aides à la « reconstruction ».
Habituellement, l’Anru finance à hauteur de 30%. Copé, lui, a réussi à faire monter l’aide jusqu’à 53%. Si le maire adjoint à l’urbanisme de Meaux reconnaît sans rougir qu’il y a là , évidemment, un rapport avec le fait que Copé était ministre du Budget en 2004, le principal intéressé, lui, croit nous convaincre quand il feint l’ignorance : « ça a joué, peut-être, à vrai dire j’en sais trop rien. » Ben voyons. Surtout quand, fouillant plus loin, l’enquête découvre que le centre-ville de Meaux, tout ce qu’il y a de plus mignon et propret, a également bénéficié de larges aides pour sa rénovation…
En 2004, donc, Borloo avait annoncé 12 milliards d’euros, financés à part égale par l’État et le 1% logement. Sauf que, depuis mars 2009 et la loi Molle (vous chercherez ce que cache ce curieux acronyme), proposée par la dure Christine Boutin, la contribution étatique à l’Anru a été réduite à … zéro ! Résultat, les villes qui ont lancé d’importants travaux, et à qui on avait promis une aide, ne pourront sans doute pas finir les chantiers. La « poudrière » de Clichy-sous-Bois, comme la décrit son maire, a donc de beaux jours devant elle.