Roman invraisemblable des petits Castor et Pollux de la politique et de la finance.
C’est un beau roman, c’est une belle histoire, d’argent et d’amitié, née et grandie entre l’avenue Montaigne et la rue La Boétie, un de ces attachements durables qui lient entre eux les gens comme il faut sur la base de mystérieuses affinités sélectives et de discrets renvois d’ascenseur.
Patrice*, homme d’affaires, était politiquement engagé. On est civique ou on ne l’est pas. Éric*, homme politique, cultivait ses relations avec les milieux d’affaires. On est pratique ou on ne l’est pas. Patrice était le conseiller financier d’une richissime vieille dame. Éric était à la fois trésorier d’un grand parti et ministre du Budget. Tous deux, en somme, gestionnaires de fortunes.
Patrice arrosait généreusement le parti d’Éric. Il appartenait au Premier Clan. Éric recevait périodiquement les membres de ce cercle dont il avait pour mission, en tant que trésorier, de solliciter les libéralités tout en ayant la charge, comme ministre, de contrôler les errements et de traquer les abus. Ainsi Mr Hyde éventrait-il le soir les patients du Dr Jekyll. Par bonheur, le ministre, lui, n’oubliait jamais dans la journée ce que le trésorier devait à ses invités nocturnes.
Patrice désira la Légion d’honneur. Éric la lui obtint et la lui remit. Florence*, l’épouse d’Éric, cherchait un emploi bien payé. Patrice la prit à son service… « Cher Éric » et « cher Patrice » coulaient des jours heureux. On cherchait des poux dans la tête d’Éric. On chercha des noises à Patrice.
Eh bien, le croiriez-vous, les deux compagnons, on serait presque tenté de dire les deux complices, les petits Castor et Pollux de la politique et de la finance jurent leurs grands dieux qu’ils ne se connaissent pas. Quelle tristesse !
(*) Les prénoms ont été changés.