Les cadeaux de l’entarteur

Rayon livres d’art perturbateurs

Archives dada/ chronique de Marc Dachy (Hazan) : Après plus de vingt ans de recherches, la somme sur l’aventure dada, magnifiquement retracée des origines en 1915 aux dernières salves des années 60 avec des myriades de textes inédits ou ignorés, des portraits grandioses des scandaleux acteurs de l’épopée, des illustrations extraordinaires et un luxe de détails et de gags tourneboulants.

Bougrement complémentaire, l’Almanach Dada ! (Les Presses du réel) : une reproduction en fac-similé de l’édition berlinoise de 1920 à la fois en allemand et en français des textes dadaïstes de base « montrant bien en quoi dada est synonyme d’insoumission, de désobéissance civile et de refus global des compromissions ».

Rayon en avant la zizique déconnante

Bérurier Noir ta rage n’est pas perdue de Virginie Despentes et du photographe Roland Cros (Vade retro) : Le luxueux et très rigolo album photos en tous genres du plus anarchisant des punks rockers français allumés du plafond dont la plupart des titres ont foutu un joli bordel : Concerto pour détraqués, Macadam massacre, Abracadaboum. Les émeutes de banlieues parisiennes dix-sept ans avant leur éclatement : « la jeunesse au combat défiera toutes vos lois ! ».

Rayon dessins pétant tous les fusibles

Notre monde, ou presque d’Olivier O. Olivier (Buchet / Chastel) : Préfacé par le toujours percutant humoriste Dominique Noguez, la sarabande proprement hallucinante des dessins de bals masqués, de concerts de violons en feu, de dîners cannibales, de corridas sous la neige ou de soirées d’abattoirs du peintre et graveur pataphysicien Olivier O. Olivier, un pote à Topor.

Rayon polars pyromanesques

Romans noirs de Jean-Patrick Manchette (Gallimard Quarto) : L’intégrale des romans noirs implacablement corrosifs de l’inventeur debordien du néopolar (Nada, Morgue pleine, Que d’os !…), prolongée par des extraits de son journal inédit, un dictionnaire Manchette et une bio fricassée par deux lustucrus biens placés pour causer de lui : sa veuve Mélissa et son fils Doug.

Rayon friandises pour petits sacripants

Monstres malades d’Emmanuelle Houdart (Thierry Magnier) : Un livre maigrichon gigantesque destiné à familiariser les mioches avec les ogres, les yétis, les sorcières, les vampires, les mouches tsé-tsé, les louves-garous, les croque-mitaines et les diarrhées diaboliques.

Rayon histoire de la répression vache

Dix-huit ans de bagne de Jacob Law (Egrégores éditions, 7 bd de la liberté, 13001 Marseille) : Introuvables depuis longtemps, les palpitants souvenirs de bagne en Guyane, au début du XXe siècle, d’une tête brûlée anarchiste-individualiste ayant fait feu sur un officier de la garde républicaine qui avait commandé à ses cavaliers de charger les manifestants ouvriers du 1er mai.

Rayon bédés rebelles irrésistibles

Les Damnés de Nanterre de Chantal Montellier (Denoël Graphic) : Le dossier Florence Rey / Audry Maupin, surnommés un peu précipitamment fin 1994 les « Bonnie et Clyde des banlieues », réouvert et ré-éclairé sous forme de bédé très très chouette. Avec des révélations canons sur le rôle machiavélique des Renseignements Généraux dans le périple.

Rayon subversion carabinée

Correspondance de Guy Debord, tome 5 (Fayard) : Ou comment les situationnistes (ou tout du moins ce qu’il en restait) ont pris d’abordage dans les années 1975 le cinéma (les longs métrages d’agitation de Debord produits par Lebovici) et la chanson (l’indispensable 33 Tours « Pour en finir avec le travail » interprété secrètement, sous pseudo, par Jacqueline Danno – c’est un des scoops de la brique) et ont proposé qu’on se concentre moins dorénavant sur la théorie critique à la Marx – Hegel que sur la théorie stratégique à la Thucydide – Clausewitz mieux à même de bousculer « l’aliénation figée ».

Rayon ethnologie du conte de fées

Sur les traces du petit chaperon rouge de Pierre Erny (L’Harmattan) : Une étude comparative excitante des innombrables versions du petit chaperon rouge et du grand méchant loup. Ce qui nous emmène de Perrault et Grimm à l’Ardèche, à la Haute-Bretagne, au Tyrol italien, à l’Asie, à la Suède, à la Transylvanie ou chez les Indiens d’Amazonie. Sont aussi passées au crible les diverses approches anthropo-psychanalytiques du conte (Erich Fromm, Bruno Bettelheim).

Rayon panoramas historiques mastards

Histoire des gauches en France en 2 tomes, orchestrée par Jean-Jacques Becker et Gilles Candar (La Découverte) : Le type même de la précieuse manne (elle rassemble plus de 80 contributions d’historiens et chercheurs !) chez qui chacun va picorer ce qui lui chante en se contrefichant ou non du reste. Ont fait ma joie, par exemple, les chapitres sur un demi-siècle d’insurrections et de barricades, sur les premiers socialismes, sur la Commune, sur l’anarchisme, sur les féministes, sur mai 68. D’autres lecteurs préfèreront dévorer les pages sur les sociétés secrètes pendant la monarchie censitaire ou sur la gauche et la décolonisation.

Rayon beaux livres enchanteurs

L’Encyclopédie du Merveilleux, tome 1, d’Edouard Brasey ( Le Pré aux clercs) : L’Encyclopédie du merveilleux est la plus merveilleuse des encyclopédies existantes. Imprimée sur un papier à l’aspect parcheminé, illustrée surtout par des reproductions anciennes de toute beauté, puisant à toutes les sources du fantastique (le folklore, la mythologie, le fantasy…), ce premier tome a pour sujet « les peuples de la lumière ». Entendre par là les peuples de l’air (djinns, elfes, sylphides…), de la forêt (faunes, amazones, dryades…), de l’eau (sirènes, ondines, vouivres…), de la terre (gobelins, korrigans, niebelungens…) ou des collines (leprechauns, gremlins, pucks…).

Rayon sommets du roman populaire

Fantômas en 3 tomes de Souvestre et Allain (Laffont Bouquins) : Fantômas répand de l’opium dans les souterrains de Paris, se déguise en religieuse, noie la capitale sous les eaux des réservoirs de Montmartre, déchaîne la peste sur un paquebot, vole l’or du dôme des Invalides, s’engloutit avec le Titanic, ressuscite, escamote une rame de métro. Restitués pour la première fois dans leur intégralité, les quinze épisodes essentiels des aventures démoniaques de l’empereur du crime qu’ont tant aimé Desnos, Malraux, Queneau ou Blaise Cendrars qui s’écriait : « c’est l’Enéide de notre époque ! ».

Rayon pamphlets pimentés

Le temps de l’antipub de Sébastien Darsy (Actes Sud) : Pour couronner une analyse sans quartier de la communication commerciale totalitaire, l’inventaire réjouissant des diverses offensives anti-pubs s’exerçant principalement contre Coca-Cola, Mc Donald’s, E. Leclerc, Nike et EDF.

Grande littérature transgressive

Dictionnaire Céline de Philippe Alméras (Plon) : Auteur de la seule biographie de Céline non autorisée, Philippe Alméras fait fi de tous les clichés et tabous pour portraiturer Céline sous des centaines de coutures volontiers contradictoires. Des matériaux exceptionnels pour les céliniens mais aussi pour les anti-céliniens viscéraux.

Rayon caricatures anticléricales flagellantes

A bas la calotte ! de Guillaume Doizy et Jean-Bernard Lalaux (Alternatives) : André Gill, Jossot, Grandjouan, Luz et Riss de Charlie hebdo…, le roman-feuilleton de la caricature mécréante de 1905, son âge d’or, aux brûlots de Siné et du Canard Enchaîné de nos jours, raconté avec minutie et esprit, et illustré tout à fait mirifiquement.