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Saint Gobain aujourd'hui.
En dix années Saint Gobain opère une dizaine de cessions et une quinzaine d'acquisitions. Parmi celles-ci, Norton très cher a créé quelques troubles mais Poliet fut un succès immédiat et durable. Aujourd'hui, le chiffre d'affaires dépasse cent milliards de francs, le résultat net quatre milliards, l'ensemble des ratios ( autofinancement, investissements, fonds propres, acquisitions) satisfont les analystes les plus sourcilleux, et font remonter en peu de temps la valeur boursière de 50%. La partie française est majoritaire avec 38% (Amérique du Nord 22% Amérique du Sud 8%, Allemagne 12% etc..) et l'activité se déploie dans 37 pays de la planète avec 382 filiales.
La finalité de l'entreprise est la production, la transformation et la distribution de matériaux du bâtiment à forte valeur ajoutée (industrie de procédés). A savoir : le verre -plat, creux, laine et fibre-la céramique technique et abrasifs (avec Norton), les matériaux de construction (avec Poliet), la fonte ( avec Pont à Mousson), les verres à base de plastique ( avec Essilor), certains plastiques armés ("le rapport plastique-verre est inchangé depuis 15 ans " ).
Stratégie, stratégie.!
Rien ne vient du hasard ou d'une molle adaptation aux circonstances. Si " le Groupe a profondément changé depuis 10 ans ", c'est le fait de volontés diverses tout à fait claires. Il a fallu céder le "trop petit, trop français" (Bâtiment et T.P., services aux collectivités locales par exemple)., devenir leader mondial dans des métiers dont la cohérence permet des transferts de dirigeants et de technologies, avec une diversification qui est à l'opposé du conglomérat ("c'est à dire, pas Total, ni Danone!").Toujours et partout un énorme effort technologique à l'appui de ce projet global, des fabrications modernes et automatisées à l'abri de besoins hasardeux de délocalisation et en pénétrant dans les pays dont la croissance et le développement autorisent d'emblée des productions rentables. Saint Gobain aura tendance à investir dans les zones sûres et à commercer seulement "au delà de Byzance". Les transferts de technologie seront plutôt évités. (Un échec en Chine a alerté sur les dangers : un manager chinois avait modifié le contrat à son profit mais l'usine, par une astuce d'ingénieur, n'a jamais fonctionné !) Ne pas donner de licences, éventuellement faire un échange (swap). Stratégie encore le souci permanent de se mettre à l'abri des cycles ou des saisons qui désorganisent la production grâce à la complémentarité des activités ou des zones de production, en équilibrant les arbitrages financiers dollar-mark ou bien, en réduisant les coûts de transports par des implantations liées à la consommation régionale.
Enfin le conférencier énonce un paradoxe : les productions de Saint Gobain ne doivent pas être "stratégiques", c'est à dire qu'elles doivent être "en dehors du champ d'intérêt d'un conseiller de l'Elysée ou de Matignon ! Nous avons tenté de nous lancer dans l'informatique, cette expérience nous a suffi. "Nul doute que cette conclusion de nature stratégique n'éveille un écho favorable chez les tenants d'une séparation stricte de l'Etat et des entreprises. Le Président directeur général et les douze directeurs généraux qu'il nomme doivent être maîtres chez eux. Quel est le rôle principal du Président?: "Deux personnes responsables de la Banque de données informatisées me communiquent le 14 du mois les résultats du groupe, je sens la musique à travers les chiffres""Il m'a fallu cinq ans pour m'y mettre, les déviations apparaissent aussitôt, ce qui va et ne va pas".
La décentralisation est poussée à son maximum. La politique sociale vient en contre point des stratégies de management. Remarquant les divergences d'opinion selon que l'on privilégie le court terme ou le long terme, selon l'attention portée aux salariés ou, à l'autre bout de l'échelle, à l'actionnariat, le conférencier qui oppose le modèle anglais au modèle allemand dans les acceptions précédentes entend procéder en pleine lucidité par rapport à ces modèles dont la parenté est finalement évidente, avec une préférence pour le modèle allemand fait de "continuité, formation, dialogue".
Les zones d'influence, les projets.
Les ancêtres de Saint Gobain avaient déjà une position importante en Allemagne où " la Société a fondé le verre " (dès 1840). L'Afrique est une simple zone commerciale, faute de croissance significative. L'Amérique du sud, avec le Mercosur, connaît de fortes implantations particulièrement au Brésil, pays "que gère le Président Cardoso avec efficacité". La Colombie ne mérite pas le discrédit qui la frappe, Saint Gobain y réussit fort bien. Citons encore l'Argentine, le Venezuela. Saint Gobain porte attention enfin, en Europe, à la Pologne et la Tchéquie, et plus encore en Orient, à l'Inde, Singapour, enfin la Chine qui, avec les U.S.A. deviendra sans doute une super puissance. Face au développement externe, un souci lancinant : franciser davantage l'actionnariat.
La politique européenne.
L'ambition de Saint Gobain dépend non seulement de sa volonté mais de la politique conduite en Europe. La monnaie unique est une chance fantastique qui conditionne "la marche en avant ou la décadence absolue" de l'Europe. Il faut souligner à quel point l'Espagne et le Portugal aspirent à en être et le méritent plus que l'Italie aux visées plus floues, autour du noyau franco allemand rejoint par l'Angleterre à l'heure du succès... |