Sous ce titre, Raymond JAFFRÉZOU publie, aux Editions des Ecrivains, un gros volume de mémoires de 728 pages. Outre l'intérêt que présente cet ouvrage pour ceux qui souhaitent connaître les spécificités françaises en matière de représentation territoriale de l'Etat, il fait découvrir la vie réelle d'un Préfet, à travers sa formation et ses différents postes, ainsi que le rôle de son épouse.
Par ailleurs, au moment ou la revue " Administration " fait paraître un numéro consacré à l'action internationale du corps préfectoral (n°186) et en prépare un autre, consacré à ses activités européennes, " Ça vous suivra dans votre carrière... " donne, à travers divers chapitres, des exemples des relations pouvant exister entre préfets et autorités étrangères.
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I- LA CARRIÈRE
Riche par la variété des expériences vécues, ces " mémoires " fourmillent d'anecdotes et se lisent comme un roman d'aventures. Remontant à son enfance, rapportant des souvenirs de ses parents et grands-parents, l'auteur produit dans son premier chapitre une tranche d'ethnologie : la description de la vie à la campagne, au début du XXème siècle, en Bretagne centrale.
Ensuite, il narre neuf ans de pension, avant et pendant la seconde guerre mondiale, l'occupation et la résistance, puis trois années consacrées aux travaux des champs, suivies d'un engagement militaire qui l'amènera à prendre part à la guerre d'Indochine (chap. 2 à 5).
Au retour à la vie civile, Raymond JAFFRÉZOU reprit ses études secondaires, abandonnées à dix-sept ans, et se lança dans un cursus universitaire qui le conduira en 1958 à l'Ecole Nationale d'Administration (ENA), où il entra major du concours fonctionnaire (chap. 6).
Après un stage en Afrique Noire et la scolarité à l'ENA, il débute sa carrière en Algérie, à Mostaganem, où, malgré les dangers courus il restera avec sa famille, après les accords d'Evian, jusqu'en mai 1962 (chap 7 et 8).
A partir de là, l'auteur nous entraîne dans l'aventure de " la Préfectorale " : un tour de France passionnant, où se révèle la philosophie de l'action d'un serviteur de l'Etat. Il commença à Poitiers en participant à la réforme administrative de 1964 qui vit la mise en place des Préfets de Région. Ses souvenirs les plus marquants sont le rapt de trois enfants et le voyage du Général de Gaulle qu'il raconte longuement (chap. 9).
Puis, il fut Secrétaire Général de la Haute-Marne, dont la ville la plus connue n'est pas Chaumont mais Colombey-les-deux-églises. Il y vécut les événements de mai 1968 avant d'être appelé dans un cabinet ministériel, jusqu'en 1972, comme conseiller technique du Secrétaire d'Etat à l'Intérieur (chap. 10 et 11).
Raymond JAFFRÉZOU passe ensuite six ans à Strasbourg, comme Secrétaire Général du Bas-Rhin. Il part, en 1978, de la capitale européenne lorsqu'il est promu Préfet de Police de Marseille, fonction qu'il quitte en octobre 1980, après la mort accidentelle de sa fille Haude (chap. 12 et 13).
Il administre alors successivement trois départements : la Dordogne où il " gère " la décentralisation à partir de 1982, la Vendée, où il la subit dans un climat de " guérilla ", comme Commissaire de la République, de 1983 à 1986, les Côtes-du-Nord enfin : une inadvertance du pouvoir le fait revenir dans son département natal où il fit ses débuts, à la préfecture, trente ans plus tôt.
Il contribua à lui faire changer de nom, devenant ainsi le premier préfet des Côtes-d'Armor. Ce fut, avec la tempête de 1987, l'un des faits saillants de son séjour briochin (chap. 14 à 16).
La carrière de l'auteur prit un dernier tournant, quand il fut nommé, en juin 1990, Conseiller Maître à la Cour des Comptes en service extraordinaire. D'homme d'action, il devint homme de cabinet, exerçant une fonction de contrôle, sous trois présidents jusqu'en 1996 (chap. 17).
Sans aller jusqu'à imiter son jeune collègue, aujourd'hui administrateur provisoire adjoint du Timor Oriental, le préfet JAFFRÉZOU a été peu ou prou, dans la plupart de ses fonctions, en relation avec l'étranger.
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II- LES ACTIVITES INTERNATIONALES
Curieusement, il commença par participer dans sa jeunesse à la décolonisation, ou plutôt à trois décolonisations. La première le fut à titre de combattant en Indochine, au Tonkin plus précisément. Le chapitre 5 est consacré à cette guerre, aux opérations mais aussi à des réflexions sur sa conduite et ses buts. Le morceau d'anthologie est le récit de la bataille de HOA-BINH et de l'évacuation du camp retranché.
Sept années plus tard, c'est comme stagiaire de l'ENA que le futur préfet parcourt l'Afrique Noire en 1959, où il assiste aux premières loges, à la marche vers l'indépendance et aux derniers éclats de l'Empire. Le chapitre 7 décrit son itinéraire de DAKAR à FORT-GOURAUD et ATAR ; de ZIGUINCHOR à BISSAU et KAOLACK ; d'ABIDJAN à COTONOU, PORTO-NOVO, LOME ou LAGOS ; de TOMBOUCTOU à NIAMEY, OUAGADOUGOU, BANDIAGARA et BAMAKO.ses rencontres avec les administrateurs français encore en place, auxquels il rend un vif hommage, et les nouveaux responsables politiques, présidents ou ministres dont le dernier, HOUPHOUET de BOIGNY, a disparu récemment.
Comme nous l'avons vu, c'est en Algérie qu'il fit sa troisième expérience de même nature, en qualité de chef de cabinet du préfet de MOSTAGANEM, assistant là aussi, à la fin d'un empire en 1961-62, sans fastes mais non sans risques.
A POITIERS, le Directeur de Cabinet eut des contacts réguliers avec les autorités américaines des bases U.S. de la Vienne. C'est lui qui alla, en 1963, présenter les condoléances officielles au Colonel GRIFFIN, Commandant la base américaine d'INGRANDES, à la mort du Président KENNEDY. Il reçut également avec le maire de Poitiers une délégation italienne, puis représenta le Préfet lors de l'accueil du Président brésilien KUYBITCHEK, le fondateur de Brasilia.
A CHAUMONT, Raymond JAFFRÉZOU, entretint, en 1965-66, des relations amicales avec le colonel SHELTON et les officiers supérieurs de la base américaine de SEMOUTIERS. Comme Secrétaire Général de la Haute-Marne, il eut à gérer, avec eux, la période délicate de l'évacuation de cette base de l'OTAN.
Durant son séjour à Paris, il effectua plusieurs missions à l'étranger. Les deux premières le furent, d'une part, à BERLIN, d'autre part à ALGER, TUNIS et RABAT avec l'Institut des Hautes Etudes de la Défense Nationale (IHEDN). La troisième conduisit le Conseiller Technique, chargé de la Protection Civile au Ministère de l'Intérieur, en Polynésie, où il assista à MURUROA, à un essai nucléaire en 1971. Puis, il représenta, à ROUEN, le Ministre de l'Intérieur et le Secrétaire d'Etat à un Congrès, où il siégea entre un général soviétique et le Préfet de Police de VIENNE, M.VOLOBECK, qui avait connu l'occupation par l'Armée Rouge.
Mais c'est évidemment à STRASBOURG, qu'il eut, en qualité de Secrétaire Général du Bas-Rhin, les rapports les plus fréquents avec des représentants de gouvernements étrangers, présents en nombre dans la capitale européenne, comme ambassadeurs auprès du Conseil de l'Europe, consuls généraux ou consuls et membres du Parlement Européen. Le chapitre 12 en fait plusieurs fois mention, parfois sous forme anecdotique.
Il traite également des travaux de la Commission Franco-Allemande d'aménagement du Rhin, auxquels l'auteur a participé durant six ans. Enfin les spécialistes de Droit Comparé trouveront ici un rappel synthétique du droit local alsacien et de son originalité par rapport au droit français.
Bien entendu, ses relations furent de nature différente lorsqu'il devint Préfet de Police à Marseille. Tout d'abord, il faut noter que le grand nombre d'étrangers dans les Bouches-du-Rhône, amenait des rapports suivis et parfois délicats, avec les consuls représentant les principales communautés.
Pour autant, le préfet de police entretient des bonnes relations avec la cinquantaine de consuls généraux et consuls en poste à Marseille, à l'exception de celui dont les agents furent pris en flagrant délit d'espionnage.
Il convient de mentionner également les innombrables délégations étrangères séjournant à Marseille ou effectuant un périple passant par la cité phocéenne et la mission difficile incombant aux services de police du fait de l'important trafic de l'aéroport international de Marignane et du port autonome de Marseille. A signaler enfin, l'excellente collaboration avec les polices étrangères dans la lutte contre la criminalité, surtout le trafic de drogue, notamment avec la police US, qui a des agents permanents à Marseille, ainsi qu'avec le Military Police qui effectue des patrouilles de concert avec la police urbaine, lors d'escales de navire de guerre (ch.13).
Dans les autres départements, les rapports furent plus épisodiques et souvent limités à l'accueil de délégations étrangères (Union Indienne et URSS en Dordogne), jusqu'à ce que le développement des interventions de la C.E.E., puis de l'Union Européenne et la mise en place des fonds structurels amènent les préfets de région et de département à devenir des interlocuteurs privilégiés de la Commission Européenne et des acteurs dans la distribution de ses financements et le contrôle de l'utilisation des fonds.
Amorcées en Vendée, ces nouvelles activités connurent un développement rapide pour l'auteur, dans les Côtes d'Armor, avec la mise en ouvre d'une opération intégrée de Développement (OID) en 1987 et des financements de fonds structurels, notamment du F.E.D.E.R., au cours des années suivantes. Il prit part, d'ailleurs, à un séminaire à Bruxelles à l'issue duquel, il se livra à un commentaire critique sur le centralisme communautaire (ch.16).
Raymond JAFFRÉZOU, devenu Conseiller maître à la Cour des Comptes en 1990, participa encore indirectement à des activités communautaires, en prêtant son concours à la Cour des Comptes des Communautés Européennes, lors d'un contrôle en France des prêts bonifiés agricoles, ainsi qu'il le raconte dans le dernier chapitre de son livre.
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L'ouvrage, préfacé par Christian BONNET, ancien Ministre de l'Intérieur, est édité par :
La Société des Ecrivains 147-149, rue Saint-Honoré - 75001 Paris E-mail : ed.ecrivains@livre.net
Tél : 01 39 08 05 38 (de l'étranger : 33 1 39 08 05 38) Fax : 01 39 75 60 11 (de l'étranger : 33 1 39 75 60 11)
Prix de vente : 175 FF + 30 FF de port. (Port offert à partir de deux ouvrages)
Il fait l'objet, depuis sa parution, de nombreux articles et commentaires élogieux dans divers journaux ou revues, notamment :
" OUEST-FRANCE " des 10 octobre et 26 novembre 2000, |
" LA HAUTE-MARNE-Dimanche " du 5 novembre 2000, |
" LE TELEGRAMME " des 13 et 31 décembre 2000, |
" ENA MENSUEL " n° 305, |
" LA LETTRE du Centre d'Etudes d'Histoire de la Défense " n°12 - Décembre 2000. |
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