LES JO-2008 : SEPT ANS DE PAIX POUR TAIWAN ?

A - On peut penser a-priori que l'attribution de la responsabilité des Jeux Olympiques 2008 à la Chine populaire sera un facteur de stabilité et de paix relatives dans les rapports entre Pékin et Taipei.

- Il n'y a pas de certitude, naturellement, mais la fierté et la volonté de réussir de nos amis chinois de tous bords, l'ampleur et la longue durée de la préparation, l'ambition de rassembler les délégations sportives du monde entier, tout cela serait peu cohérent avec des menaces d'ordre militaire, une crise armée, ou des crises répétées dans les détroits.

- Dans la mesure ou, à Pékin, le parti et le gouvernement font de la réussite des JO-2008 un grand objectif national et dans la mesure où ils tiendront en main la situation intérieure, la "réunification" devrait donc rester provisoirement une cause soutenue avec prudence et modération

B - Elargissons le propos…A Pékin, la modernisation passe avant la réunification .

- On prêt à JIANG Zemin l'ambition de rester devant l'histoire comme un grand "modernisateur" et un grand "réunificateur". Mais ces deux grands objectifs ne peuvent pas toujours être menés de front. Or à chaque difficulté de ce type, Jiang a choisi en priorité la modernisation.

- L'organisation des JO-2008 fait partie de la montée en puissance de la Chine. Celle-ci est conçue, avant tout, sous l'angle de la croissance et de la modernisation d'une économie liée à celles des pays avancés.

- Fin septembre 2001, on a pu lire dans le Communiqué du récent plénum du CC/PCC : … " La Chine est entrée dans une nouvelle phase de développement économique pendant laquelle elle construira une société plus prospère, à tous points de vue, et accélérera la modernisation socialiste.

Pour réaliser ses buts d'unir et conduire les Chinois de tous groupes ethniques, de promouvoir la modernisation, réaliser la réunification de la patrie, sauvegarder la paix mondiale et faire avancer le développement commun, le parti doit représenter le développement des forces sociales productives avancées, le progrès de la culture chinoise avancée et les intérêts fondamentaux de la grande majorité du peuple chinois."

- Dans ce texte, l'objectif de modernisation passe clairement avant celui de réunification. Et ce n'est pas nouveau, si on en juge d'après les actes de Deng et de Jiang plus que d'après leurs discours.

C - N'y a-t-il donc plus de menace de crise ? …N'allons pas trop loin.

1 - LES CAUSES PROFONDES DE DIVERGENCE ENTRE PEKIN ET TAIPEI RESTENT LES MEMES

- TAIWAN, séparée du continent par l'histoire depuis 1895, a développé une société moderne, un haut niveau de vie et une économie avancée. Taiwan est aujourd'hui une démocratie multipartite et un Etat de droit.

Economie avancée, taiwanisation des cadres et démocratie poussent une grande majorité des Taiwanais à préférer le statu quo, face à l'immense Chine inégalement développée et 50 fois plus peuplée.

- En CHINE, la volonté de "réunification" de la couche dirigeante tient à la fois (1) à une revanche à prendre sur l'histoire, (2) pour les cadres anciens, aux souvenirs de la guerre civile de 1946-1949, (3) à la lutte contre les forces centrifuges internes et (4) à la crainte d'une politique américaine de "containment".

- Le parti communiste et l'Armée de Libération ont en outre leurs propres raisons de vouloir imposer le principe d'une réunification et parfois de pousser à l'action.

2 - CETTE PERIODE DES ANNEES 2000 A 2010 SERA DIFFICILE ET PLEINE DE RISQUES POUR LE PARTI COMMUNISTE CHINOIS.

- Adaptation à l'OMC, alors que le climat social et l'environnement sont déjà fortement dégradés en Chine (risques de troubles).

- Développement probable de la classe émergente, mais aussi du chômage, du sous-emploi et des tensions sociales (inégalités fortes)

- Relève de la génération actuelle de dirigeants par la quatrième génération. (incertitudes politiques)

- La Chine peut connaître, dans cette période, des tensions et des difficultés graves, sources de surenchères ou de mobilisation dans une crise extérieure, comme on l'a vu parfois dans le passé.

D - Alors que la phase militaire de l'offensive américaine contre le régime des Talibans vient seulement de commencer, il est trop tôt pour savoir si les évènements du 11 septembre 2001 et la coalition contre le terrorisme autour des Etats-Unis auront un impact durable sur les relations Chine-Etats-Unis-Taiwan

On peut s'attendre par contre à des changements socio-économiques : dans la période 2003-2008. Sauf accidents imprévus, l'entrée à l'OMC de la Chine et de Taiwan pourrait avoir quatre conséquences :

1 - un nouveau coup de fouet à la croissance économique dans les provinces côtières de la Chine.

2 - un développement de la classe moyenne chinoise et de son influence sur le parti.

3 - une croissance et peut-être un doublement des échanges extérieurs de la RPC (passant de 400 à 600/800 milliards USD).

4 - une forte pression à la hausse des échanges CHN-TWN, ainsi que des investissements taiwanais sur le continent, qui pourrait changer l'équilibre politique et stratégique actuel.

Taiwan a souffert de la crise économique régionale de 1997 et souffre à nouveau du ralentissement américain de 2000-2001. Beaucoup plus massive et moins intégrée, l'économie du continent a pu et peut encore maintenir une forte croissance apparente. Depuis un an ou deux, en réalité, la montée en puissance économique de la Chine et deux crises économiques successives dans le Sud-Est asiatique ont donné à Pékin de nouveaux moyens de pression sur Taiwan, des moyens peut être plus prometteurs et moins dangereux que les avions et les missiles

Mais rien n'est écrit d'avance. Personnellement je préfère être optimiste. J'ai des amis chinois à Pékin, à Taipei et ailleurs. Je crois, à long terme, à un rapprochement progressif des deux Chine, qui sera acceptable des deux cotés. HE -- le 8 Oct . 2001

 COMPLEMENTS:  Table de la Chine  La Chine sur Internet