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CONFLITS ETHNIQUES ET CULTURELS EN EUROPE
Exposé de Michel Wieworka, Directeur d'études à l'Ecole pratique des Hautes études en Sciences sociales Conférence-débat d'Alerte aux réalités internationales du 18 octobre 1995. fin de la "société industrielle", fragmentation culturelle, Racisme et xénophobie

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1. Le point de départ de la réflexion sur ce sujet doit être la fin de la "société industrielle". Nos sociétés étaient organisées à partir d'un conflit limité, celui qui opposait d'un côté le mouvement ouvrier et de l'autre les maîtres du travail. Ce conflit informait bien au-delà de l'usine ou de l'atelier, par exemple la vie politique autour de l'opposition gauche-droite, la vie intellectuelle dont les débats étaient imprégnés, la vie dans les campagnes et les quartiers à travers sons tissu associatif... Nous sommes maintenant sortis de ce paradigme, de cette conception de la société et de cette réalité sociale. Les sociétés occidentales se sont en quelque sorte "post-industrialisées", en se défaisant de ce principe conflictuel et en commençant à revivre comme définies par du non-conflit. L'analyse va alors se porter sur la dissociation, la séparation, le non rapport social. On commence à parler d'une société "duale", d'une société "à deux vitesses", des "exclus". Une telle évolution crée les conditions favorables au renforcement des identités culturelles. Lorsque l'univers conflictuel de la société industrielle laisse la place à l'univers de l'exclusion, du chômage.., les acteurs qui ont perdu des repères vont en chercher d'autres. L'inversion des rapports entre Français "de souche" et immigrés, les conduites de ségrégation qu'elles entraînent, la nouvelle perception de l'immigré non plus comme "travailleur" immigré, mais à travers des catégories culturelles ou ethniques (black, beur, musulman, turc, maghrébin...) sont autant de facteurs favorables à la montée de toutes sortes d'identités.

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2. Parallèlement des processus de fragmentation culturelle se développent en France, comme dans les autres pays européens. A partir de la fin des années 60, on voit monter en France un certain nombre de particularismes identitaires qui, s'affirmant dans l'espace public, sont en contradiction avec le modèle républicain d'intégration. Ainsi en est-il des mouvements régionalistes (en Bretagne - en Occitanie - dans le Pays basque - en Corse...), Des poussées sur des themes socio-culturels (la femme, les homosexuels, l'écologie....), ou encore la transformation du monde juif (de l'adhésion au modèle issu des Lumières jusqu'à l'invitation faite par un grand rabbin à ses concitoyens de ne pas voter un jour de fête religieuse !...). A côté de ces poussées identitaires "socialement indéterminées", on assiste à la fabrication d'identités sur fonds de problèmes sociaux, de crise économique, et à coups d'exclusion, de discrimination. Si bien que, si dans l'ensemble l'immigration s'intègre, elle peut être amenée dans certains cas à s'ethniciser, à se définir en termes culturels. Intériorisant les différences, l'immigré se trouve engagé dans un processus de "stigmatisation", avec renversement des stigmates : tu m'as fait différent, je vais être différent!... En même temps nous vivons une rétraction de l'idée de nation. Alors que celle-ci était associée à la modernité, au développement économique, au progrès démocratique, elle l'est de plus en plus, depuis une trentaine d'années, à des themes non modernes. Jouent - outre la fin de la société industrielle - des phénomènes planétaires tels que la "globalisation" qui fait que l'Etat-nation n'est plus le cadre d'une économie planétaire, l'internationalisation de la communication et de la culture qui amène les identités locales à réagir, la construction européenne qui entraîne une certaine résistance culturelle...

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3. La réponse des pays à ces processus de fragmentation culturelle est commandée par la culture politique et la vie intellectuelle propres à chacun d'eux. En France on se cramponne à un modèle républicain d'intégration qui serait le seul, malgré ses dysfonctionnements, à préserver le pays de problèmes tels que ceux vécus au Liban, dans la Yougoslavie d'aujourd'hui, ou encore aux Etats-Unis avec le multiculturalisme. Pourtant nous ne pouvons nier les différences et, si la réponse libérale pas plus que le discours populiste n'apportent de perspectives, n'est-il pas possible d'articuler existence de spécificités culturelles et valeurs universelles ? Ne peut-on à cet égard se référer à l'exemple donné par la communauté portugaise en France ? C'est un monde qui, par les liens qu'il conserve avec le pays d'origine, par l'existence d'une réseau associatif très dense, s'affirme dans ses différences : il est pourtant très intégré socialement et participe plus que d'autres à la vie de la cité. Bien d'autres exemples observés sur le terrain montrent également qu'on peut concrètement respecter un particularisme sans enfreindre les principes républicains. 

En définitive la question - très éloignée des grands débats idéologiques et qu'on doit se poser à tous les niveaux - est bien celle de savoir comment sortir du choix impossible entre un universalisme négateur des particularismes et un différentialisme générateur de violences, de sectarismes, de fondamentalismes...

Résumé de Francis Plateau, non revu par le Conférencier

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*** Racisme et xénophobie en Europe une comparaison internationales .Dans toute l'Europe, les années quatre-vingt-dix sont marquées par une inquiétante résurgence du racisme et de la xénophobie. Mais, dès que l'on y regarde de près, on observe que leurs manifestations concrètes varient considérablement d'un pays à l'autre. L'extrême droite prospère différemment sur le terreau de la violence raciste. Elle est plus puissante et radicale en Allemagne qu'au Royaume-Uni, moins violente et plus populiste en Italie. A lire : le chapitre sur la Belgique et le nationalisme flamand. Un ouvrage collectif sous la direction de Michel Wieworka. Editions La Découverte 300 p. 145 F. Lettre de décembre 1995

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