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LA PAIX ET LES MEDIAS

 

"UN BAMBIN RENVERSE PAR UN CHIEN"
Auteur:André Lewin, Ancien ambassadeur de France (Guinée Conakry, Inde, Autriche, Sénégal/Gambie), Ancien porte-parole du Secrétaire général des Nations unies, Président de l'Association française pour les Nations unies (AFNU)

Colloque  des 8 et 9 novembre 2002 àl 'Université de la paix et au Centre mondial de la paix de Verdun. Sur le thème "La paix et les médias" (version revue et complétée en mars 2003)

Mon intervention, selon le programme du Colloque, est essentiellement axé sur mon expérience de porte-parole du Secrétaire général des Nations Unies. Mais je voudrais l'appeler : "Un bambin renversé par un chien". Vous comprendrez tout à l'heure pourquoi.

Peut-être certains d'entre vous me trouveront-ils critique vis-à-vis des journalistes; mais ils doivent savoir que je suis moi-même l'un de ces derniers, au delà de la diplomatie. Dans les années 50, pour contribuer à  financer mes études, j'ai été pendant trois ans pigiste mais aussi homme à tout faire (de la rédaction et de la composition au brochage en passant par la correction) à "L'Echo de la Presse et de la Publicité", bimensuel destiné aux professionnels, journalistes et publicitaires, sous la férule de Noël Jacquemart, un patron de presse intransigeant et très formateur; j'y ai notamment réalisé des entretiens avec les grands noms de la presse française d'alors, Raymond Cartier, Charles Ronsac, Raymond Aron, Claude Bourdet, Pierre Boutang, Roger Priouret, Albert Finet, Jean Fabiani... 

Pendant mon service militaire (il a duré plus de deux ans, et je l'ai effectué pour l'essentiel en Algérie), j'ai travaillé au Service de presse et d'action psychologique de la défense nationale, assurant notamment de nombreux reportages à travers l'Algérie pour des hebdomadaires comme "Le Bled", ou des revues comme la "Revue militaire d'information" ou la "Revue de défense nationale". Par la suite, j'ai été pendant huit ans rédacteur en chef de "Promotions", la revue des anciens élèves de l'Ecole nationale d'administration, avec au moins quatre épais numéros par an. 

Puis j'ai été pendant quatre ans porte-parole du secrétaire général des Nations Unies et directeur adjoint de la presse et des publications de l'ONU. 

Enfin, depuis ma retraite du corps diplomatique il y a trois ans, je suis vice-président du groupe de presse et de publications Jeune Afrique. C'est dire que le monde de la presse et des journalistes m'est familier et que je m'y sens parfaitement à l'aise.

Il y a deux semaines, le 25 octobre, s'est tenu à Londres un colloque sur "L'ONU et les médias dans la guerre et dans la paix", colloque organisé par l'Université de Westminster et l'Université de la paix de l'ONU, avec le double patronage des Associations britannique et française pour les Nations Unies. Mais en tant que président de l'Association française pour les Nations Unies, je suis membre de la délégation à l'Assemble générale et je devais justement me trouver à New York en cette période. Mon collègue et ami britannique, Malcolm Harper, a donc représenté à ce colloque nos deux Associations pour les Nations unies, la britannique, qu'il préside, et la française. Mais j'ai adressé aux participants un message - en anglais -, dont je vais reprendre les grandes lignes, puisque notre Colloque d'aujourd'hui à Verdun et celui de Londres abordent sous des angles différents un même sujet et que nous en avons coordonné leur contenu.

Pendant mon séjour à New York, j'ai pu parler à des collègues qui ont occupé ou qui occupent encore la position qui était la mienne il y a une trentaine d'années, c'est-à-dire porte-parole du Secrétaire général et de l'ONU. J'ai exercé cette fonction pendant quatre années, de 1972 à 1976, pendant une grande partie du premier mandat de Kurt Waldheim, puis ce fut mon successeur François Giuliani, pendant dix-sept ans sous trois secrétaires généraux, Kurt Waldheim, Javier Perez de Cuellar et Boutros Boutros-Ghali, et il y a bien sûr le porte-parole actuel, qui travaille avec le secrétaire général Kofi Annan, Frederic Eckhard. J'ai discuté de ce thème avec eux, mais je ne prétend pas parler en leur nom, même si leur expérience et leurs conclusions ne sont pas très différentes des miennes.

Lorsque j'étais porte-parole, le groupe de journalistes accrédités auprès de l'ONU à New York était d'environ 100 correspondants permanents, dont un tiers pour des médias américains; mais quand il y avait des évènements exceptionnels - visite d'un chef d'état ou du Pape, première intervention onusienne de Yasser Arafat - ou un débat particulièrement important à l'Assemble générale ou au Conseil de Sécurité le nombre de journalistes présents pouvait s'élever à plus de mille. L'afflux des correspondants pouvait même grimper parfois jusqu'à deux mille, par exemple lorsque le Secrétaire général se déplaçait à l'étranger ou participait à des conférences importantes - comme au Mexique la première conférence sur la condition féminine en 1975, à Paris la réunion où fut signée la paix au Vietnam en 1973, ou encore la conférence de Genève sur le Moyen-Orient ou après la guerre de 1973 une délégation israélienne siégea pour la première fois aux côtés de délégations arabes.

Mais pendant mes briefings de presse quotidiens à New York aussi bien que pendant mes contacts avec la presse n'importe où ailleurs dans le monde, l'intérêt des médias s'est toujours concentré beaucoup plus sur la guerre que sur la paix, sur les opérations militaires persistantes plutôt que sur la mise en place des forces onusiennes de maintien de la paix, sur les échecs du système de sécurité collective et les difficultés des Casques bleus plutôt que sur les résultats fragiles de la recherche de la paix. 

Et lorsqu'il y avait des discussions et des négociations, les questions des journalistes tournaient immanquablement autour des incidents entre les délégations et les accrochages verbaux entre orateurs plutôt que sur les patients efforts de conciliation et de rapprochement. On avait même l'impression que les rédacteurs en chef affectionnaient les titres accrocheurs comme "Nouveau blocage des négociations", "Toujours pas d'accord au Conseil de Sécurité", "Encore un échec pour la paix" ou "Les combats sur le terrain continuent", aux titres sereins comme "Matin paisible sur le front", "L'accord se fait à Genève" ou "Les casques bleus calment la situation". Il faut vraiment que l'information "pacifique" soit un "scoop" spectaculaire, presque invraisemblable, pour qu'elle fasse la "Une" de la presse ou le "Prime Time" des journaux télévisés; ainsi, les accords de Camp David ont-ils réussi pendant quelques jours à éclipser les mauvaises nouvelles du Proche-Orient.

 Cela me rappelle le titre du fameux roman d'Erich Maria Remarque sur la première guerre mondiale, "Im Westen nichts Neues" ("A l'Ouest rien de nouveau"), information de routine qui devait sans doute rassurer les familles des combattants, mais qui ne faisait pas l'affaire de la presse. Je note d'ailleurs que le Centre mondial de la paix de Verdun vient de consacrer à cet écrivain pacifiste allemand une exposition et un colloque.

Je me souviens aussi de ma déception, moi qui avais été élevé dans le culte de la qualité de la presse américaine et du professionnalisme de ses journalistes, en entendant certains d'entre eux concentrer leurs questions, lors des voyages qu'effectuait le Secrétaire général, non pas sur le fond, mais sur des détails oiseux : "Voyage-t-il en première classe ?"ou "Sa femme l'accompagne-t-elle ?". 

A propos de l'Irak et de la politique du président Bush, je suis de même surpris de la tonalité des incroyables attaques d'une partie au moins de la presse américaine contre la politique française (et globalement contre la France et les Français, pas seulement ceux qui les dirigent) et aussi du conditionnement réussi (au moins auprès de la presse, sinon de l'opinion publique en général) de la part de l'administration américaine, qui n'hésite pas à employer des techniques de pure propagande, et qui l'avoue ingénument. Mais je ne veux pas généraliser, j'ai heureusement rencontré parmi les journalistes une foule d'excellents professionnels, allant immédiatement "to the point" et admirables connaisseurs de la substance des dossiers les plus complexes.

Je voudrais dire ici que je ne mentionnerai pas le rôle que peuvent jouer certains organes de presse, voire certains journalistes ou éditorialistes, dans les campagnes de haine et de violence, parce que c'est quand même très exceptionnel. D'autres que moi, à cette tribune, parleront de la sinistre Radio des mille collines, dite aussi "radio machette", la radio des extrémistes hutus, qui n'a cessé de monter les esprits dans le sens d'un règlement de comptes contre les modérés et d'un génocide au Rwanda, ou encore d'un des journaux de ce pays qui, dès le 3 avril 1994, annonçait que les 4 et 5 avril, les esprits allaient s'échauffer, que le 6 avril, il se produirait "quelque chose" (en fait, l'avion qui transportait les présidents du Burundi et du Rwanda allait être abattu ce jour là) et que les 7 et 8 avril, on assisterait àdes "évènements importants..."

Il n'en est que plus étonnant de lire sous la plume de Robert Ménard (fondateur et président de l'ONG "Reporters sans frontières") dans son récent ouvrage "La censure des bien-pensants" (écrit avec Emmanuelle Duverger) que "traumatisés de n'avoir pas pris la mesure des medias extrémistes hutus à la veille du génocide rwandais, et notamment de la tristement célèbre Radio libre des mille collines, nous avons inventé... le concept de medias de la haine", mais qu' à la suite d'une demande d'interdiction de journaux proches du Front National, "la stupidité de cette demande était d'une telle évidence qu'enfin nos yeux s'ouvraient". Pour Robert Ménard, après réflexion, l'appel au génocide ne peut servir d'argument à quelque censure que ce soit, du moment qu'il émane d'un journaliste, car ce serait selon lui l'expression d'une opinion. D'ailleurs, en toute logique, Robert Ménard écrit ensuite que Faurisson, l'universitaire négationniste bien connu, a le droit de prétendre que l'holocauste n'a pas pu exister et donc n'a pas eu lieu; il a le droit de l'écrire et même de l'enseigner à ses étudiants. Cette "dénégation" d'un fait avéré n'est en réalité pas une opinion, mais un mensonge. Et pour Ménard, finalement un mensonge une fois imprimé n'est plus tout à fait un mensonge, puisqu'il a acquis en quelque sorte droit de cité.

Et regardez actuellement le rôle xénophobe et quasiment génocidaire que jouent certains journaux de Côte-d'Ivoire, ce pays qui était naguère un havre de paix sur le continent africain, un modèle de concorde et de développement, oh oui, avec certains traits spécifiquement africains, mais qui passait pour exemplaire sous Houphouët-Boigny, lequel - tel Tito pour la Yougoslavie - avait su donner une unité nationale à une mosaïque d'ethnies, de langues, de religions et d'origines diverses; mais hélas, telle la Yougoslavie de Tito, une fois le fondateur disparu, les successeurs n'ont pas su maintenir l'héritage et les pays ont explosé, implosé - ou sont en voie de le faire. Voilà pourquoi la presse, qui ne parlait presque jamais de la Côte-d'Ivoire heureuse à l'heure de la réussite, en est pleine aujourd'hui à l'heure des violences. La sagesse populaire a donc raison, lorsqu'elle affirme que les peuples heureux n'ont pas d'histoire.

Nous devons bien sûr admettre que des actes de violence ou des évènements effroyables sont plus spectaculaires que des scènes calmes et paisibles, que des maisons détruites par des bombes, des enfants déchiquetés par des mines ou des foules fuyant une catastrophe naturelle ou un génocide, frappent davantage le lecteur ou le téléspectateur, qu'il est plus tentant de remplir les colonnes des journaux ou les écrans de télévision avec des visions d'horreur qu'avec des images de tendresse et de fraternité. Il faut d'ailleurs distinguer entre la presse écrite, qui peut être plus nuancé, plus équilibrée, et l'information visuelle, photographique ou télévisée, qui recherche l'image choc, qui fait intrusion dans les foyers, et qui a de plus l'apparence du vrai, d'une réalité qui ne souffre guère d'interprétation. Ne disait-on pas (dans une ancienne publicité pour Paris-Match) "Le choc des photos, le poids des mots" ? Et une récente légende de photo dans le supplément télé du Nouvel Observateur confirmait explicitement que "des voitures qui brûlent sont toujours beaucoup plus télégéniques que des chèques sans provision" (1er-7 mars 2003).

Il semble d'ailleurs que l'un des tout premiers reportages spectaculaires des actualités françaises avec commentaires en direct ait été l'attentat qui le 9 octobre 1934 coûta à Marseille la vie au Roi Alexandre de Yougoslavie et au ministre français des affaires étrangères Louis Barthou qui l'accueillait.

Il y a d'ailleurs une escalade, ou plutôt une échelle dans l'horreur, où le plus horrible l'emporte sur le "un peu moins horrible". Dans le film récent où onze réalisateurs de divers pays réagissent en onze minutes chacun sur les évènements du 11 septembre, l'Israélien Amos Gitaï montre une jeune journaliste israélienne qui tente de passer à l'antenne avec son reportage sur le vif après un attentat kamikaze dans une rue d'Israël qui a fait plusieurs morts et quelques blessés, et qui est plus en plus furieuse parce que son rédacteur en chef lui refuse l'antenne; c'est seulement à la fin que l'on comprend pourquoi : il y a quelque chose de terrible qui vient de se passer à New York : la tragédie exceptionnelle des Twin Towers a bloqué la tragédie quotidienne de Tel Aviv, et ainsi, en matière d'information, ce n'est pas le mieux qui est l'ennemi du bien, mais le pire qui l'emporte sur le mal. 

Je note d'ailleurs - sans pour autant estimer comme le font certaines organisations sionistes que l'information occidentale sur ce sujet est biaisée - que chaque fois qu'il y a un attentat terroriste ou kamikaze en Israël, une information donnée par une autre source annonce qu'un enfant palestinien a été tué par des balles de l'arme israélienne; on sait que cela s'est hélas passé à plusieurs reprises - à de trop nombreuses reprises -, mais tendez vous-même l'oreille : à chaque attentat, un enfant palestinien tué ? Cela devient trop systématique pour être crédible, mais cela montre que dans l'esprit de certains, l'horreur peut - doit - excuser l'horreur.

Vous connaissez peut-être la formule d'un critique français du siècle dernier, disant que "l'on ne fait pas de bonne littérature avec de bons sentiments" : il semble que ce ne soit pas vrai seulement pour la fiction, mais aussi pour le documentaire et les informations. Le journaliste Laurent Bazin, dans l'une de ses missions "Questions d'actu" qui passe sur LCI, a dit (je cite de mémoire) que "nous autres journalistes, nous devons faire sortir le négatif des choses". Cela se traduit d'ailleurs par la formule anglo-saxonne "Good news is no news" (certains retournent la formule, en disant "No news is good news", mais cela ne fait que renforcer le fait - évident - qu'il faut qu'il se passe quelque chose pour générer de l'information). On se souvient combien nous trouvions irréels et ridicules les films, les monuments et les oeuvres d'art produits sous la doctrine du réalisme socialiste, avec des ouvriers épanouis, de merveilleux paysans, des écoliers rayonnants, des foules enthousiastes, des militants déterminés et béats d'admiration, des soldats farouches mais rassurants, des dictateurs sérieux mais souriants tapotant la joue rose de petites filles émues avec leurs bouquets de fleurs à la main, sous le portrait idéalisé d'un tyran éternellement jeune surmonté d'un soleil éclatant, symbole d'un présent brillant et d'un avenir encore meilleur.

Donc, les mauvaises nouvelles chassent les bonnes, comme le proverbe qui dit "un clou chasse l'autre" ou la loi économique qui affirme que "la mauvaise monnaie chasse la bonne"; mais les catastrophes se chassent également les unes les autres : regardez la première page des journaux; elles sont consacrées jour après jour au même évènement tragique, jusqu'à ce qu'un autre le détrône pour un jour ou quelques jours. Même si tout est relatif : l'irrésistible approche de la guerre en Irak ou les violences en Côte-d'Ivoire le cèdent à la marée noire sur les côtes atlantiques après la catastrophe du pétrolier Prestige, ou au sort de quelques milliers d'automobilistes bloqués par la neige sur les autoroutes.

Le travail pour promouvoir la paix est certainement moins spectaculaire et il se peut bien que quelques rédacteurs en chef préfèrent de mauvaises nouvelles ou des images dramatiques, et pratiquent même une sorte de censure si les correspondants envoient des papiers trop bénins, trop lénifiants. Peut-être même les lecteurs ou les téléspectateurs tourneraient-ils la page ou fermeraient-ils le bouton s'ils trouvent l'émission trop morne. On "zappe" aujourd'hui pour trouver l'émission choc, à moins que ce ne soit pour échapper à toute information, bonne ou mauvaise, et se réfugier dans le divertissement et oublier un monde dont la presse semble dire que tout y va mal. On se souvient même du tollé soulevé il y a quelques années par les images d'une petite fille colombienne en train de se noyer alors que l'inondation montait lentement autour d'elle et finalement disparaître sous l'eau; mais que faisait donc le photographe, se demandait-on, qui, apparemment seul sur les lieux, enregistrait cette scène tragique sans lever le petit doigt pour tenter de sauver la gamine ?

Nous avons en France un prix de Bayeux des correspondants de guerre, créé en 1994 dans cette ville de Normandie à  l'occasion de la commémoration du 50ème anniversaire du débarquement allié; les trophées du 9ème Prix ont été décernés il y a moins d'un mois, en présence de 130 professionnels. Chaque année, le jury (cette fois-ci, il était présidé par Jean-Marie Cavada) accorde des prix au meilleur reportage sur une zone de combats, au meilleur film de télévision, à la meilleure émission radio, à la meilleure photographie d'un conflit. Jean-Marie Cavada a eu la lucidité de reconnaître que dans le monde actuel, "l'information spectacle avance et prend le pas sur la véritable information". Il a également expliqué que la correspondance de guerre tait "l'une des noblesses du métier. Le travail de ces journalistes est remarquable à plus d'un titre : ils s'exposent à des risques, savent garder leur sang-froid et être suffisamment pédagogues pour faire comprendre des situations de conflits souvent complexes." Ces correspondants ont d'ailleurs pays un lourd tribut dans leur tâche puisque nombre d'entre eux sont morts en l'accomplissant.

Mais personne n'a eu l'idée de créer un Prix des correspondants de paix, alors que le fabricant d'explosifs Nobel a créé - àla fin de sa vie, peut-être pour se faire pardonner - le prix Nobel de la Paix. Heureusement, il y a eu la réaction d'une journaliste de TF 1, Marine Jacquemin (d'ailleurs une Lorraine, originaire du département de la Meuse), qui a couvert les évènements d'Afghanistan; à ce propos, au moins dans les médias français, il y a de plus en plus de femmes journalistes envoyées pour couvrir les guerres et les guerillas, au moins dans cette catégorie socioprofessionnelle, la parité hommes-femmes est en train de se réaliser. Donc, cette journaliste qui avait couvert les premiers mois des opérations militaires en Afghanistan, a t si profondément choque par les horreurs dont elle a été témoin (particulièrement les enfants déchiquetés ou mutilés par des mines) qu'elle a créé une organisation non gouvernementale spécifiquement pour s'en occuper. Malheureusement, il n'y a pas beaucoup d'autres exemples.

Pour en revenir à l'ONU, il y a une tendance à oublier les opérations de maintien de la paix couronnes de succès sur le plan militaire comme sur le plan politique (les deux aspects sont actuellement de plus en plus liés), comme le Cambodge, le Nicaragua, le Mozambique, Haïti ou le Timor oriental, et à mettre l'accent sur des échecs patents comme le Rwanda, l'Angola, la Somalie (on se souvient que le débarquement des Marines américains sur les plages somalies fut programmé de manière à coïncider avec les missions de CNN).

 Il y a à peine une semaine, dans la salle de presse des Nations Unies à New York (celle même du deuxième étage où je tenais mes briefings quotidiens, alors que mon bureau se trouvait au 3ème étage, au milieu des bureaux des journalistes et agences de presse), le représentant personnel pour la Bosnie du Secrétaire général Kofi Annan venait faire part aux journalistes de ce que l'opération des Nations unies pour la remise en ordre de la police et de la sécurité publique en Bosnie tait sur le point de se terminer heureusement, et que l'ONU allait passer la main à l'Union européenne; il n'y avait pas dix journalistes présents, alors qu'il y en aurait eu des dizaines s'il tait venu annoncer que la Bosnie était à feu et à sang et que l'ONU y tait impuissante. Je viens de prononcer le mot "sang" : n'est-il pas étonnant de voir les caméras de télévision reculer bien rarement devant la vue du sang et les images de corps ensanglantés, alors que les films de la télévision publicitaire sur les accessoires mensuels féminins les illustrent pudiquement avec du liquide ... bleu p‰le !

Je parlais à l'instant de CNN, la plus ancienne des chaînes d'information en continu, dont on dit parfois qu'elle est "le seizième membre du Conseil de sécurité", et qui a atteint pendant la guerre du Golfe en 1991 ses téléspectateurs les plus nombreux. CNN, créée par Ted Turner (qui a quand même fait don à l'ONU d'un milliard de dollars sur ses bénéfices, soit le montant des arriérés américains au budget onusien) est d'ailleurs dépassé maintenant en audience par la cha”ne Fox News, fonde par Rupert Murdoch, qui joue davantage encore sur ses reportages en terrain de crise. La guerre procure un excellent Audimat, alors que les actions de l'ONU exhalent au mieux de l'indifférence, au pire de l'ennui.

Et l'on souligne que l'ONU pourrait peut-être au mieux perpétuer un statu quo précaire ou maintenir des fragiles équilibres ("l'apparence de l'équilibre, c'est que rien ne bouge; la vérité de l'équilibre, c'est qu'il suffit d'un rien pour tout faire bouger", "écrivait, si ma mémoire est bonne, Julien Gracq dans "Le rivage des Syrtes"). Bien trop souvent, l'ONU peut séparer des belligérants, organiser des désengagements de troupes, mais pas imposer un règlement définitif ou trouver une solution acceptable et accepte par tous, comme c'est le cas au Cachemire (la plus ancienne des missions d'observateurs mises en place par l'ONU, avant même le Proche-Orient), Chypre (problème particulièrement crucial en ce moment en raison des discussions sur l'adhésion de ce pays à l'Union européenne, alors que le problème de la coexistence des deux communautés grecque et turque sur l'”le anciennement britannique est posé depuis l'indépendance de ce pays, c'est-à-dire depuis 1964, et plus encore depuis la quasi-partition de la partie turque en 1974), ou bien entendu le Moyen-Orient. Pourtant, sur beaucoup de ces dossiers, des résolutions ont t adoptes par le Conseil de sécurité ou par l'Assemble générale, mais elles ne sont pas toujours respectées, loin de là, même parfois par les pays qui ont votes. Et combien de traités internationaux ont-ils t signés par une majorité de pays, mais n'ont pas été ratifiés, ou ne sont tout simplement pas respectés ?

Quoi qu'il en soit, n'oublions pas que Winston Churchill a une fois dit que mieux vaut parler, parler, parler, que guerroyer, guerroyer, guerroyer ("Better talk, talk, talk, than war, war, war")...

Les Nations unies ne peuvent réaliser davantage que ce que ses états membres ont la détermination de faire.

Il est bien sûr facile de critiquer l'ONU, de stigmatiser ses échecs, ses inconvénients, son incapacité à faire face aux crises et aux désastres. L'opinion publique est devenue de plus en plus sévère envers l'ONU et généralement envers toutes les organisations internationales, accuses d'être lourdes, inefficaces, coûteuses. Certaines de ces critiques peuvent d'ailleurs avoir un fonds de vérité. Mais notre opinion sur les Nations unies reste encore influence par l'appellation de "machin" que le général de Gaulle a il y a plus de quarante ans employé à son égard (en lui montrant cependant quelques années plus tard davantage de considération), et que nous sommes quotidiennement influencés dans notre jugement sur l'ONU par ce que nous lisons, entendons, ou voyons dans les médias, résultat des analyses et des comptes-rendus d'un corps de journalistes davantage intéressés par les mauvaises nouvelles que par les bonnes, par des évaluations négatives plutôt que positives. Et bien sûr, ces correspondants prétendent ensuite que ce n'est pas forcément leur avis, ni leur évaluation, mais qu'ils doivent présenter les choses de manière à être crus par leurs lecteurs, qui - selon eux - seraient plus réceptifs aux mauvaises nouvelles et à une actualité dramatique.

Alors, qui est responsable de cet état de choses ? L'opinion publique et les lecteurs, fondamentalement pessimistes, qui veulent du sensationnel ? Les rédacteurs en chef, qui exigent des informations choc, pour ne dire choquantes, pour vendre leurs journaux ou grimper à l'audimat ? Les secrétaires de rédaction qui conçoivent des titres accrocheurs dont l'expression ne coïncide pas toujours avec le contenu de l'article (il y a souvent des journalistes qui protestent contre les titres et aussi contre les coupures dans leurs textes, qui ne sont pas de leur fait) ? Les journalistes qui savent sur quel ton écrire ou parler pour passer à l'antenne ou figurer dans la prochaine édition ? Les terroristes ou les guérilleros qui ont compris qu'on passe mieux avec une prise d'otages ou une bombe sur un marché que par des communiqués de presse ou des distributions de tracts ? Les gouvernements qui savent si bien dramatiser les choses lorsqu'ils veulent mobiliser leur opinion publique et utiliser les réactions les plus primaires pour obtenir l'assentiment de leurs populations ? Ou tout simplement la vie, la situation internationale, qui est complexe, difficile, dangereuse, depuis que les hommes vivent en société ("L'homme est un loup pour l'homme") et que les groupes ne savent plus, dans un monde qui bouge et qui est en expansion démographique rapide, conserver la "bonne distance" dont parle Claude Lévi-Strauss dans l'un de ses ouvrages ("Anthropologie Structurale Deux"), citant les tribus amérindiennes qui construisent leurs villages là où ils ne pouvaient plus voir la fume des huttes de leurs voisins, "assez près pour être amis et pas assez loin pour être ennemis."

Une autre question que l'on devrait se poser : comment les lecteurs ou les téléspectateurs réagissent-ils à ces présentations catastrophistes ? Comment réagissent-ils àces images de violence qu'ils reçoivent à leur domicile lorsqu'ils regardent les informations pendant le dîner familial ? Cela les rend-il pessimistes, résignés, indifférents, convaincus qu'il n'y a rien à faire pour améliorer la situation ? Ou est-ce que cela suscite la colère, la révolte, peut-être des réactions violentes, voire terroristes ? Autre possibilité encore, cela engendre-t-il le désir de participer à des campagnes d'opinion, de contribuer à l'action d'ONG pacifistes, de se mobiliser aux côtés d'autres citoyens qui se sentent responsables ? On sait bien que les opinions les plus ancres peuvent changer sous le coup de l'émotion. Je ne suis pas certain que l'on ait vraiment étudié cet aspect des choses, encore qu'en France, depuis quelque temps, l'on discute sur le thème de la violence, notamment àla télévision, comme en témoigne la mission confie àla philosophe Blandine Kriegel. Qu'on le veuille ou non, qu'on le regrette ou non, les images et les textes exercent une influence sur ceux qui les reçoivent; mais le rôle des journalistes est-il simplement de refléter une situation, de décrire objectivement, ou doivent-ils prendre parti, orienter la rédaction ? Et tout notre débat ne tend-il pas àmontrer que les médias privilégient une certaine vision des évènements, d'o une réelle responsabilité dans la problématique internationale.

En conclusion, je voudrais relater quelques exemples personnels.

Je me souviens d'être un fois revenu d'un voyage au Moyen-Orient, juste après la guerre de 1973. La presse internationale tait pleine encore de plaies et de bosses. Et en arrivant à Genève, je tombe en arrêt sur le titre qui barrait la première page d'un quotidien local, je crois que c'était la Tribune de Genève : "Au Petit-Lancy - c'est un faubourg de la ville -, un bambin renversé par un chien" ! Cela vous relativise drôlement les nouvelles dramatiques. Au fond, oui, si c'était ça, la paix, le jour o tous les journaux du monde titreraient sur l'information du jour : "Un bambin renversé par un chien"?

Autre souvenir, plutôt amusant ; à la même poque, alors que l'on se battait au Moyen-Orient et que les opérations militaires au Vietnam n'étaient pas termines, qu'est ce qui a fait un matin la "une" de la presse américaine et même mondiale ? C'tait une photographie de Kissinger assis au premier rang d'une conférence les jambes croises, et l'on voyait nettement un énorme trou dans sa semelle ! Kissinger qui pointait du doigt le rôle croissant des médias lorsqu'il disait : "autrefois, les ambassadeurs me demandaient ce qu'ils devaient faire; aujourd'hui, ils me demandent ce qu'ils doivent dire."

Il est vrai aussi que l'on garde en mémoire (mais là, je n'étais pas présent, c'était en 1960 à l'Assemblée générale de l'ONU) de Krouchtchev martelant son pupitre de sa chaussure pour exprimer son mécontentement devant l'allusion faite par un délégué philippin aux pratiques coloniales russes (et soviétiques) en Asie centrale et en Europe orientale.

J'étais présent dans la salle de l'Assemble générale (présidée cette année là par l'actuel président algérien, Abdelatif Bouteflika, alors ministre des affaires étrangères), quand Yasser Arafat a fait en 1974 sa première apparition àl'ONU; il a mentionné dans son discours qu'il était venu avec une rameau d'olivier dans une main et un fusil dans l'autre - ce qui était bien sûr une rhétorique symbolique pour montrer où se situait l'alternative -, et puis, un photographe a pris un cliché de lui parlant à la tribune, montrant qu'il avait sous sa vareuse un étui à revolver - Arafat a ensuite affirmé qu'il était vide et qu'il avait laissé son revolver au vestiaire... Mais la plupart des journalistes ont souligné le pistolet plutôt que le rameau d'olivier... Et en fait, vingt cinq ans après ce discours, vingt cinq ans après Camp David, le Moyen-Orient est-il aujourd'hui plus près de la paix ou de la guerre ?

Et presque trente ans après que l'ONU ait discuté pour la première fois de la question du terrorisme international après l'attaque de terroristes palestiniens contre les sportifs israéliens aux jeux Olympiques de Munich en 1972, avons-nous fait un réel progrèsès pour mettre fin aux activités terroristes et en éliminer les causes principales ?

Un autre exemple, pour conclure cette intervention. début novembre 1975, j'ai été envoyé par le Secrétaire général comme son représentant personnel et aussi par le Conseil de sécurité, au Maroc, en Mauritanie, en Algérie et en Espagne, pour essayer de persuader les leaders locaux (particulièrement le Maroc) d'annuler la Marche Verte; le défunt Roi Hassan II avait ordonné à 350.000 personnes tenant le Saint Coran dans une main, le drapeau marocain dans l'autre, de traverser du Nord au Sud le Sahara Occidental - alors encore colonie espagnole - pour confirmer la revendication marocaine sur ce territoire. Il y avait un danger sérieux de confrontation militaire, une menace réelle à la paix régionale et à la sécurité internationale, un risque que des centaines ou des milliers de ces manifestants paisibles soient tués dans une confrontation armée avec les troupes espagnoles ou avec les forces nationalistes du Polisario, soutenues par les Algériens.

J'ai réussi à persuader le Roi du Maroc d'en faire une marche symbolique : les 350.000 marcheurs franchiraient la frontière du territoire revendiqué - ce qui lui permettait de faire la démonstration symbolique qu'il avait voulu faire - mais la Marche Verte s'arrêterait huit kilomètres après cette limite : les unités espagnoles étaient postes à dix kilomètres et avaient reçu l'ordre de tirer. J'ai ensuite été chercher à Nouakchott, Alger et Madrid les réponses positives des gouvernements de Mauritanie, d'Algérie et d'Espagne.

La Marche Verte s'est effectivement déroulée comme convenu. Il n'y a pas eu un seul coup de feu. J'ai eu le sentiment que j'avais réussi dans la prévention de conséquences dramatiques et que j'avais sauvé peut-être des centaines de vies. J'ai annoncé fièrement ce résultat au Secrétaire général et au Conseil de sécurité. Tout le monde a été satisfait et m'a chaudement félicité... Mais il n'y a pas eu un article dans la presse internationale, pas une ligne dans aucun journal autre que ceux de la région. Qu'en aurait-il été s'il y avait eu parmi les marcheurs marocains, les militaires espagnols, les combattants du Polisario de multiples victimes ? Je vois d'ici les titres accrocheurs : "Sables sanglants", "Le Sahara à feu et Hassan", "le Rio do Oro devient le Rio de Sangre"...

Mais n'épiloguons pas davantage. Je vous invite quand même à méditer la belle et simple chanson de Renaud et Axelle Red "Manhattan Kaboul", où la violence qui détruit les vies et les rêves du jeune Portoricain travaillant à Manhattan comme de l'adolescente du village afghan peut générer une oeuvre poétique et qui frappe néanmoins les esprits, un peu comme le fameux "Dormeur du Val" de Rimbaud, ce jeune soldat qui dort, souriant, "tranquille, il a deux trous rouges au côté droit". Mais les journalistes doivent-ils être aussi poètes ? Doivent-ils édulcorer l'information, atténuer la tragédie, transcender la réalité ? Et ne sont-ils pas en droit de nous demander qu'on les laisse travailler et qu'on "leur fiche la paix" ?

Je nous souhaite à tous une suite de colloque fructueuse, constructive et paisible. Et n'oubliez pas le bambin renversé par un chien !


Annexe I Il y a trente ans,George Bush (senior) lançait une première offensive contre le terrorisme international

Des effets et des causes... par André R. Lewin Ancien ambassadeur Président de l'Association française pour les Nations unies

Annexe II MANHATTAN - KABOUL,, chanson de Renaud, chante par Renaud et Axelle Red

Petit Portoricain

Bien intégré quasiment New-Yorkais

Dans mon building tout de verre et d'acier

Je prends mon job, un rail de coke, un café

Petite fille Afghane

De l'autre côté de la terre

Jamais entendu parler de Manhattan

Mon quotidien c'est la misère et la guerre

 

Deux étrangers au bout du monde, si différents

Deux inconnus, deux anonymes, mais pourtant

Pulvérisés sur l'autel

De la violence éternelle

 

Un 747

S'est explosé dans mes fenêtres

Mon ciel si bleu est devenu orage

Lorsque les bombes ont rasé mon village

 

Deux étrangers au bout du monde, si diffréents

Deux inconnus, deux anonymes, mais pourtant

Pulvérisés sur l'autel

De la violence éternelle

 

So long ! Adieu mon rêve américain

Moi plus jamais esclave des chiens

Ils t'imposaient l'Islam des tyrans

Ceux-là ont-ils jamais lu le Coran ?

 

Suis red'venu poussière

Je s'rai pas maître de l'univers

Ce pays que j'aimais tell'ment serait-il

Finalement colosse aux pieds d'argile ?

 

Les dieux, les religions

Les guerres de civilisation

Les armes, les drapeaux, les patries, les nations

Feront toujours de nous de la chair à canon

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