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Une fouille au corps en échange d'un touché de seins

17 janvier 2009 à 18h50

Comparution immédiate du 16 décembre, 23e chambre de Paris

Malgré son évidente fatigue, Rodolphe, 28 ans, célibataire et sans enfant, porte beau. Calme, posé, ce magasinier et cariste par intérim comparaît pour « agression sexuelle, outrage et rébellion ». « Vous êtes des pédés, je vais vous niquer, bande de fils de putes », aurait-il dit en substance aux trois policiers, partie civile dans ce dossier.

Ciblé sur les seins

Le 13 décembre, une patrouille de police est appelée pour un différent entre un individu et un fonctionnaire de police en civil, dans un bar du quartier de Barbès, l’« Abracadabra ». Cet « homme de type africain », Rodolphe donc, aurait dans ce bar bousculé une jeune femme en lui « touchant la poitrine ». Le policier en civil intervient en faveur de la victime. Échanges de noms d’oiseaux, puis Rodolphe quitte les lieux. Le policier en civil appelle du renfort. La patrouille part en quête du prévenu. On le retrouve un peu plus loin titubant dans la rue. C’est la garde-à-vue.

Julie, la jeune femme touchée aux seins, porte plainte et raconte sa version des faits aux policiers : « J’étais dans ce bar avec des amis. On venait d’assister à un concert, l’ambiance était bonne et ce gars-là a commencé à me tourner autour. Il m’a dit qu’il n’avait pas envie de dormir tout seul et il s’est montré agressif. Il a caressé les cheveux d’une amie, puis les miens. Je l’ai repoussé. Et c’est là qu’il a touché mes seins, deux fois. C’était ciblé sur les seins, il l’a fait exprès ». La plaignante demande 500€ au titre du préjudice moral.

Le prévenu et son avocat - JPG - 19.8 ko
Le prévenu et son avocat
© O.S.

À l’audience, Rodolphe reconnaît une partie des faits : « Franchement, cela ne me ressemble pas de faire un truc pareil. Je suis plutôt du genre réservé et timide avec les filles. En même temps, je me dis qu’une jeune femme ne porte pas plainte pour rien, mais c’est du raisonnement. Si vraiment j’ai fait ça, je suis prêt à faire des excuses ». Interrogé par la police, un premier témoin présent ce soir-là confirme les dires de Julie : « Oui, il l’a touché au niveau de la poitrine ». Un second soutient que le prévenu a « simplement repoussé » la jeune femme : « Son geste, c’était plutôt un “Va-t-en” qu’un “Je te touche les seins” ».

C’est en garde-à-vue que les choses se corsent pour Rodolphe. Avec 1,6g d’alcool dans le sang au moment de son arrestation, Rodolphe n’est clairement pas dans son état normal. La fouille au corps a chez lui un « véritable effet déclencheur ». La présidente demande au prévenu s’il se souvient de ce qui s’est passé en garde-à-vue : « Je me rappelle de la salle de dégrisement et du fait que je n’avais plus mon pantalon, ni mes chaussures. Je me souviens avoir protesté quand ils ont voulu me fouiller au corps. On m’avait dit que l’on pouvait s’y opposer, je suis pudique et je ne l’ai pas supporté ».

« Bonne nouvelle, vous n’êtes pas psychopathe »

En fait de « protestations », Rodolphe insulte les policiers à maintes reprises. Les trois agents concernés demandent chacun 600 euros de dommages et intérêts « parce qu’ils en ont pris pour leur grade », avance leur avocate. Rodolphe dit s’être expliqué : « Le lendemain, j’ai eu la chance de recroiser ces mêmes policiers et je me suis platement excusé pour ma conduite de la veille. Ils m’ont d’ailleurs dit qu’ils ne me reconnaissaient pas – c’est vrai, apparemment, j’avais dépassé les bornes ». La Présidente acquiesce : « Oui, l’alcool s’était dissipé ».

Avec onze mentions au casier depuis 2002, Rodolphe se tient à carreau depuis mai 2005, date de son dernier délit, un port d’arme prohibé. L’expertise psychiatrique va plutôt dans le sens du prévenu : « Monsieur X lie contact sans difficulté, son discours est adapté, calme, il est coopérant et ne subit pas de changements d’humeur…, lit la Présidente. Le rapport dit que vous n’êtes pas psychopathe, ce qui est une bonne nouvelle pour vous », conclue-t-elle en fermant son dossier.

« Je demande la relaxe »

L’avocat de la défense revient sur le taux d’alcoolémie « proprement ahurissant » de son client ce soir-là : « Au premier relevé, il est à 1,6g – en fin de soirée, on est à 2,5. C’est énorme ! On est proche du coma éthylique. Ce n’est pas une circonstance atténuante, mais c’est une explication. Tout son entourage en convient, l’expertise aussi, mon client est un homme posé, calme. Ce soir-là, il n’était pas maître de ses actes : condamne-t-on quelqu’un en état de semi démence de la même façon qu’un homme en totale possession de ses moyens ? Pour les faits d’agression sexuelle, je demande la relaxe. Pour l’outrage et la rébellion, c’est clair qu’un cocktail détonant – l’alcool et le refus de se soumettre à la fouille au corps – a joué en défaveur de mon client. Il s’en est déjà excusé auprès des policiers. Je demande un Travail d’Intérêt Général ».

Résultats des délibérés. Le tribunal relaxe le prévenu pour « absence d’éléments intentionnels » concernant l’agression sexuelle : Julie X est déboutée de sa demande. Pour les faits de « rébellion et outrage », trois mois avec sursis tombent. Un TIG de 80 heures sur 18 mois est prononcé. Rodolphe devra en plus verser 100 euros à chacun des policiers au titre du préjudice moral.

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4 Messages de forum

  • Et oui quand on subi une fouille au corps avec deshabillage a nu illegal comme chacun sait, il faut dire non pas blah blah mais plutot :

    "je ne donne pas mon accord a cette fouille au corps qui n’a pas ete ordonne par un officier de police judiciaire pour les necessites de l’enquete mais je n’opposerais aucune resistance physique".

    Et puis des sa sortie des cachots, faire une declaration au greffe de la juridiction de proximite des lieux pour demander des dommages et interets a l’agent judiciaire du tresor pour cette violation de l’article 8 de la Convention.

    Si on resume, cette personne a ete detenu illegalement pendant 3 jours, a ete fouille illegalement 3 fois avec deshabillage total (1 commissariat + 2 au depot)…parce qu’il a exprime de facon vocale sa desaprobation a une detention arbitraire et une fouille illegale…mmhh..

    Il faut mieux garder le silence pendant la detention et faire une requete a la Cour europeeene des droits de l’homme si la juridiction de proximite ne lui attribue pas des dommages et interets.

    • Attention à ne pas confondre :
       palpation de sécurité. Un agent de police vous palpe pour vérifier que vous ne portez rien de dangereux (une arme en gros) sur vous. Pas de déshabillage intégral mais il peut vous demander d’ouvrir/retirer votre manteau, voire au pire de retirer vos chaussures. Cette mesure n’est pas réglementée par le code de procédure pénale ou le code de déontologie de la police mais par le règlement général d’emploi de la police. Donc vous ne pouvez vous soustraire à cette mesure visant à assurer la sécurité des fonctionnaires s’ils l’estiment nécessaire.

       Fouille de sécurité Cette fouille est réalisée lorsqu’on est placé en garde-à-vue et est obligatoirement prescrite par un officier de police judiciaire (dans la pratique c’est un gardien de la paix qui la fait sous couvert de la responsabilité de l’opj). Cette fouille s’apparente à une perquisition et implique de se dévêtir intégralement (à poil complet) et de voir tout ses vêtements fouillés. En GAV vous ne gardez que vos vêtements (pas de bijoux, montres, lacets, ceintures …) afin d’éviter les suicides notamment (vous ne pouvez y couper car la police est responsable de votre sécurité).

       Fouille à corps Même chose que précédemment, mais en plus on inspecte l’intérieur de vos orifices naturels (rectum/vagin). Cette mesure n’est appliquée en général que lors de l’admission en maison d’arrêt ou prison.

      • la fouille de sécurité et la fouille au corps impliquent toutes deux la mise à nu, mais seule la fouille au corps est considérée comme une "perquisition", puisqu’on recherche sur la personne des éléments en rapport avec une infraction(arme, drogue…), la fouille de sécurité pouvant elle être effectuée avant un placement en cellule.

        à noter, lors d’une garde à vue, la fouille de sécurité n’est en aucun cas une mesure obligatoire selon la loi. La mesure à appliquer en règle générale est la palpation de sécurité, et le retrait d’objets tels lacets, ceinture, bijoux, sauf si on suspecte la personne d’être dangereuse, auquel cas on peut lui demander de se déshabiller pour fouiller ses vêtements.

        en prison, on parle de fouille intégrale, qui est également une mise à nu, à l’entrée, sortie de l’établissement, après les parloirs… elle n’inclue pas la fouille des orifices internes, qui ne peut être décidée qu’en cas de forte suspicion d’infraction, et doit obligatoirement être réalisée par un médecin requis à cet effet.